mardi 11 août 2009

A vos marques...

Bonjour à tous,

Je suis enfin en mesure de commencer sérieusement à réviser.(parce que jusque là c'était plus du bachotage!) Et oui, à cause de la crise, j'ai bossé à plein temps et plus si affinités jusqu'au 7 août inclus.

Bref, les exams auront lieu les 23 et 24 septembre prochains, ce qui me laisse un peu plus d'un mois. J'en connais qui ont décroché le concours en se mettant à survoler les cours 15 jours avant... Tout est une question de détachement et de gestion du stress à mon sens. Jusque là je n'excellais pas dans ces domaines mais avec les dernières évolutions que j'ai vécues, je crois que je prends tout vraiment beaucoup moins à coeur. Et je ne perd pas espoir de décrocher ce foutu exam.

Je vois que mon projet d'atelier rencontre un succès sans limite (zéro en l'occurrence), ça fait peur. Tant pis, je ferai mes mises en condition d'exam toute seule (sniff).

Pour ceux et celles qui voudraient réviser avec moi (plus on est de fous, plus on rit), je pense que je serait en mesure de sortir de mes bouquins et de me sociabiliser vers le 11 septembre (rien à voir avec le triste anniversaire).

A partir du 21 août, je n'aurai plus de connexion internet à cause de travaux, alors, si vous voulez me joindre pour une chose ou une autre, essayez de le faire avant.

Bonne révision à tous et bon courage!

Droit des successions (Cours)

DROIT DES SUCCESSIONS ET DES LIBERALITES


A la mort d’une personne, ses biens, à l’inverse de son corps, ne sont pas anéantis. Ils survivent à leur titulaire, ce qui explique peut être ce besoin singulier d’immortalité de l’homme dans sa quête d’appropriation des choses.
Les biens du de cujus (= défunt) sont transmis selon les règles posées par les art 720 et s. Cciv.
Ces règles ont été modifiées d’une part par la loi grande loi du 3 décembre 2001, qui est dite loi relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions du droit successoral. D’autre part, ces dispositions ont été modifiées par la loi du 23 juin 2006, entrée en application le 1er janvier 2007, qui en matière de RM change simplement la modification du RM et le régime du PACS. Mais, surtout, elle réforme le droit des successions et des libéralités. Elle modifie le règlement des successions à tous les niveaux cad de la dévolution jusqu’au partage successoral. Il s’agit d’une réforme d’ensemble tant attendue par la pratique. De nombreux congrès de notaires avaient demandé cette réforme, Catala. Cette réforme d’ensemble poursuit 3 objectifs qui ont été mentionnés dans le projet de loi :
Donner plus de liberté pour organiser sa succession en offrant à chacun plus de souplesse pour transmettre son patrimoine dans les meilleures conditions possibles.
Faciliter et simplifier la gestion du patrimoine successoral afin notamment de répondre à des situations particulières « telles que permettre la continuité des entreprises après le décès de l’entrepreneur ou prendre en compte la situation d’un enfant handicapé ».
Accélérer et simplifier le règlement des successions en favorisant le partage amiable et en modernisant la procédure du partage judiciaire.

Introduction :

A) Les définitions

Le terme succession lui-même, dans un sens accessoire et concret, désigne l’ensemble des biens transmis au décès.
Dans sa signification essentielle et abstraite, qui seule nous intéresse dans ce cours, la succession est la transmission du patrimoine du défunt à une ou plusieurs personnes vivantes. Il s’agit d’une transmission à cause de mort. Elle constitue le mode normal mais non pas exclusif de transmission à titre gratuit. Cette transmission à cause de mort est en principe universelle puisqu’elle concerne non seulement l’actif mais aussi le passif. Le patrimoine du défunt (qui est la corrélation d’un actif et d’un passif) est transmis dans son ensemble en tant qu’universalité de droit dès l’instant du décès, même si en pratique un certain temps est nécessaire pour liquider et partager la succession.
Les successeurs du défunt sont en principe désignés par la loi. Ce sont les héritiers. Mais, une personne de son vivant peut décider dans une certaine mesure du sort de ses biens après son décès. Elle peut le faire dans un acte unilatéral qui est le testament, dont les dispositions patrimoniales portant attribution de biens portent le nom de legs.
A l’inverse du testament, la donation est un contrat cad un acte qui exige la rencontre des volontés du donateur et du donataire. Il n’y a pas de donations sans une acceptation expresse du donataire. Il s’agit également d’une transmission à titre gratuit non plus à cause de mort, mais entre vifs. Cette transmission entre vifs, dans la pensée des rédacteurs de 1804, présentait un caractère exceptionnel, même anormal. Elle ne porte que sur les éléments de l’actif. Par donation, on ne peut pas transmettre le passif. La transmission du passif est impossible entre vifs, même si le donataire s’engage à payer les dettes du donateur. Ce dernier n’en reste pas moins tenu personnellement envers ses créanciers.
Le terme libéralité englobe le testament et la donation. Tous 2 sont soumis à des règles communes qui subissent il est vrai aujourd’hui un certain déclin, règles qui protègent la réserve héréditaire.
La réserve héréditaire est la fraction du patrimoine du défunt qui échappe en principe à son pouvoir de volonté pour être dévolu, selon des règles légales et impératives. Par cette dernière définition, on voit ici apparaître le conflit entre 2 systèmes : l’un d’essence individualiste qui veut que la succession soit dévolue par la volonté du défunt, l’autre reposant sur l’idée d’affectation des biens au groupe familial  la dévolution étant alors légale et impérative.

B) Histoire

4 périodes :

1) La Rome antique

Dans la Rome antique, la transmission des biens a pour fondement la volonté individuelle du défunt exprimée dans un testament. Certes, aux origines, la propriété a un caractère familial et le testament a un caractère public et religieux et non pas patrimonial. Aux origines, le testament sert à désigner la personne la plus apte pour entretenir le culte domestique.
Cependant, à l’époque classique, la propriété à Rome perd son caractère familial avec la multiplication des divorces et l’affaiblissement des idées religieuses.
Droit patrimonial et non plus religieux, le droit héréditaire devient le complément nécessaire de la propriété individuelle qui apparaît déjà comme un droit perpétuel et souverain.
Le testament prend sa signification actuelle. Dans la Rome classique, le droit successoral repose tout entier sur l’affection du défunt.
A la fin du droit romain, cette affection apparaît d’une part et en général prouvée. Cela veut dire que le de cujus lègue ses biens dans un testament à qui lui plaît. Les proches parents notamment les enfants, non légataires, n’étant protégés à l’époque que par une sorte de réserve héréditaire prenant le nom de la légitime (qui apparaît proche d’un devoir alimentaire). Cette affection apparaît d’autre part exceptionnellement présumée dans la succession ab intestat. Cette expression est curieuse puisqu’elle est un mélange de latin et de français = qui n’a pas fait de testament. C’est dire, sans qu’importe qu’un défunt ait ou n’ait pas fait de testament, la succession dans la Rome classique a un caractère individuel. Dans la volonté prouvée du défunt s’il y a un testament et dans l’affectation présumée du défunt s’il n’y a pas de testament.

2) Le Moyen Age

Il est marqué par l’opposition entre les pays de droit écrit qui perpétuent le droit romain et de coutumes qui reprennent le système germanique de la copropriété familiale. Cela signifie que les biens d’une personne ne sont pas sa propriété individuelle et exclusive. Ils sont affectés à l’ensemble de sa famille. Au décès, ils sont dévolus par la loi aux membres du groupe familial. À l’inverse des meubles dont le défunt a pu disposer à son gré dans un testament, les immeubles provenant de la ligne paternelle retournent à cette ligne quel que soit l’éloignement de la parenté. Il en va de même pour la ligne maternelle. C’est la fameuse règle que l’on continue d’exprimer en latin : « Paterna paternis, materna maternis ».
Quant au partage, on tient compte non plus de l’origine mais de la nature des biens. On isole en leur seing la succession noble qui en général concerne le fief. Afin que le fief ne soit pas morcelé, l’ancien droit instaure 2 privilèges :
- La masculinité
- La primogéniture

A titre de synthèse de l’ancien droit, régler en fonction de l’origine (pour la dévolution) et de la nature (pour le partage) et non plus de l’affection du défunt, le droit héréditaire (successoral) a ainsi dans les pays de coutumes un fondement légal et impératif.

3) Le Code Civil de 1804

Sous l’influence de la Révolution et par réaction contre l’ancien droit et contre l’ancien Régime, le Code civil de 1804 rétablit l’unité de la succession cad que les biens meubles et immeubles, sans qu’importe leur origine, constituent comme en droit romain, une masse successorale unique que le DIP fera pourtant éclater puisque les immeubles sont soumis à la loi successorale du lieu de leur situation, tandis que les meubles sont régis par la loi du dernier domicile du défunt.
A l’inverse du droit romain, le législateur de 1804 se préoccupe non seulement d’assurer le respect de la volonté du défit mais aussi de protéger en même temps la famille contre une affection désordonnée du de cujus.
Le partage des biens successoraux va répondre aux exigences politiques de l’époque. Les privilèges sont abolis. La grande règle de l’égalité entre héritiers est consacrée. Cette égalité est entendue en 1804 comme une égalité en valeur et en nature, entraînant forcément un morcellement des héritages.
En conclusion, on peut dire qu’en 1804, le droit successoral n’est plus fondé sur l’origine et la nature des biens mais sur la liberté du moins relative du défunt et sur l’égalité entre héritiers.

4) De nos jours

Certes, le principe même de l’héritage, toujours connu et respecté, ne semble plus menacé par les écoles socialistes en raison notamment des expériences il y a quelques années des exemples soviétiques.
Héritages supprimés en 1918 dans le bloc soviétique = en Union soviétique, l’héritage a été rétablit en 1919 tel qu’il existe dans les pays libéralistes de nos jours.
Cependant, la question se pose du fondement actuel de ce droit compte tenu des mérites respectifs de chacune des conceptions retenues par l’histoire.
D’une part, la conception subjective du droit romain reprise en 1804 présente l’avantage d’intégrer les droits successoraux dans une même masse. Mais, l’égalité en nature des héritiers présente l’inconvénient de conduire au morcellement des exploitations (ce qui n’est plus rentable).
La conception retenue dans l’ancien droit par les pays de coutumes, parfois appelées conception objective, a les mérites inverses. Elle rompt l’unité des successions mais elle ne conduit pas au morcellement des propriétés.
Notre droit positif, dans le cadre d’une conception dualiste du droit successoral, paraît opérer une savante synthèse entre ces 2 conceptions.
D’une part, les règles de transmission (de dévolution) tendent à respecter, dans une certaine mesure, la volonté du défunt. La liberté testamentaire, quoique limitée, est reconnue. Les règles de dévolution ont surtout accru, à la suite de la réforme du droit de la filiation en 1972 et à la suite de la loi de 2001, l’égalité entre tous les héritiers, qu’ils s’agissent d’enfant légitimes ou naturels.
D’autre part, le sort des biens est pris en considération dans les opérations de liquidation, spécialement lors du partage successoral. Le législateur moderne (Réforme 1961 notamment) entend éviter autant que faire se peut le morcellement des exploitations en substituant comme le fait la loi du 23 juin 2006 une simple égalité en valeur à l’égalité en nature.

PARTIE I LA TRANSMISSION DU PATRIMOINE DU DE CUJUS


Aux termes de l’art 720 Cciv, les successions « s’ouvrent par la mort au dernier domicile du défunt ».
Les litiges éventuels sont tranchés par le TI de ce dernier domicile.
En principe, la succession s’ouvre à la date indiquée sur l’acte de décès.
L’art 722 Cciv, tel que rédigé par la loi de 2001, apporte à la prohibition des pactes sur succession futures (qu’il reprend) une nouvelle formulation, dont la loi de 2006 fait écho dans la nouvelle rédaction de l’art 1130 al 2 Cciv. Ce sont 2 articles essentiels.
L’art 722 Cciv dispose « les conventions qui ont pour objet de créer des droits ou de renoncer à des droits sur tout ou partie d’une succession non ouverte ou d’un bien en dépendant ne produisent effet que dans les cas où elles sont autorisées par la loi ».
L’art 1130 al 2 Cciv dans la rédaction 2006 dispose « On ne peut cependant renoncer à une succession non ouverte ni faire aucune stipulation sur pareille succession même avec le consentement de celui de la succession duquel il s’agit que dans les conditions prévues par la loi ». (il y aura beaucoup de cas prévus par la loi).
Ces 2 textes appellent un commentaire dans l’introduction de cette partie. En effet, ces textes réaffirment un principe tout en soulignant un recul.

A) Le principe de la prohibition des pactes sur succession future

Conformément au droit romain, le Code de 1804 a posé le principe de la prohibition des pactes sur succession future. Cela veut dire que les actes tendant à disposer de tout ou partie d’une succession non encore ouverte sont par principe nuls.
Les héritiers présomptifs ne peuvent disposer par anticipation de leur droit à venir dans la succession d’une personne encore vivante. Ces conventions créées selon les jurisconsultes romains ce que l’on appelle un « votum mortis » cad un souhait de mort.
Le Code de 1804 avait étendu la prohibition des pactes sur succession future aux conventions conclues de son vivant par une personne sur sa propre succession.
Selon les rédacteurs du Code de 1804, il serait dangereux de régler irrévocablement le sort de sa succession, l’auteur de ce règlement anticipé risquant fort de le regretter par la suite.
Le législateur de 1804 entendait que chacun conserve intact jusqu’à sa mort sa liberté testamentaire, d’autant qu’un testament est quant à lui toujours révocable du vivant de son auteur. C’est la raison pour laquelle le Code de 1804 n’apportait que de rares exceptions à cette prohibition des conventions sur les successions non encore ouvertes.
2 institutions créées en 1804 apportaient une exception :
La donation-partage
L’institution contractuelle





La difficulté pour la jp a consisté le plus souvent à déterminer si une convention méritait ou non d’être qualifiée de pacte sur succession future, spécialement lorsque ladite convention comporte un terme ou une condition.
Ex : n’est pas un pacte sur succession future la tontine qui est la clause en vertu de laquelle un bien acheté en commun par 2 personnes sera réputé appartenir en entier au survivant. Cette convention ne tombe pas sous le coup de la prohibition de l’art 1130 Cciv parce que chacun des acquéreurs est depuis l’origine (la signature de la convention) propriétaire du bien sous la condition du prédécès de l’autre. Mixte 27 novembre 1970 (D1970 p 81).
Ex : Dans un arrêt Civ1 30 mai 1985 (Bull Civ I p 155 n°173), la Cour a décidé que n’est pas non plus un pacte sur succession future la promesse unilatérale de vente qui retarde la levée de l’option du bénéficiaire après le décès du promettant car seule l’exécution du droit déjà né du bénéficiaire et non pas sa naissance est retardé jusqu’au décès.

(NB : prendre Cciv et lire les autres exceptions sur cette notion sous l’art 1130 Cciv).

Ex : En revanche, est un pacte sur succession future la vente d’un bien qui prendra effet au décès du vendeur avec versement du prix au tiers que désigne le vendeur.
Civ1 13 juin 1979 (D 1980 p 553). Renvoi aux autres exemples dans le Code.

Force est de constater qu’au cours des ans depuis 1804, et plus encore à l’époque contemporaine (depuis 2001 et 2006), le principe de la prohibition des pactes sur succession future subit un très sérieux déclin, un recul.

B) Le recul de la prohibition des pactes sur succession future

La prohibition des art 722 et 1130 Cciv n’existe que tout autant qu’une exception ne lui est pas apportée par le législateur lui-même.
C’est ainsi que la loi du 13 juillet 1965 sur les RM a validé la clause commerciale (le développer) ainsi que le pacte successoral prévoyant qu’en cas de décès d’un associé, la société continue avec ses héritiers ou seulement avec les associés survivants (art 1868 Cciv). Essentiellement et surtout, la loi de 2001 et surtout de 2006 établissent 2 exceptions majeures :
- Le mandat à effet posthume
- La renonciation anticipée à l’action en réduction

1) Le mandat à effet posthume

Ce mandat, tout à fait original, n’est pas sans rappeler l’institution anglo-saxonne de la fiducie et permet au défunt de désigner de son vivant un mandataire avec pour mission de gérer tout ou partie de la succession (art 812 Cciv qui est nouveau).
Ce mandat porte atteinte aux droits des héritiers sur les biens successoraux. C’est pourquoi, il est soumis à des conditions de forme et de fond. Dans le droit commun du mandat, on veut représenter le mandat par un mandataire. Ici, en matière successorale, c’est la mandant qui le conclu pour représenter un hériter incapable  il n’a pas pour effet de représenter le mandant. C’est pourquoi on dit qu’il est proche de la fiducie.
Il ne peut être donné que sous la forme authentique.
Il doit être accepté par le mandataire dans les mêmes conditions de forme.
Il doit être accepté par le mandataire avant le décès (art 812-1 al 3 et 4 Cciv).
Il doit être donné pour le compte et dans l’intérêt d’un ou plusieurs héritiers désignés (voilà la plus grande originalité qui le rapproche de la fiducie GB).
Il doit être motivé par un î sérieux et légitime, que va apprécier le notaire (art 812-1 al 1er).
Sa durée est en principe limitée à 2 ans, mais c’est prorogeable une ou plusieurs fois par décision du juge. Cette durée est éventuellement de 5 ans, prorogeable dans les mêmes conditions si l’inaptitude ou l’age des héritiers le justifient, ou s’ils existent des biens professionnels à gérer (l’institution est mise au service de l’entreprise)  Art 812-1 al 2 Cciv à lire impérativement.
Le mandataire, quant à lui, peut être toutes personnes physiques (héritiers déjà dans les affaires) ou morale (société, banque) capables, à l’exception du notaire chargé de régler la succession. Ce ne peut pas être un mandataire de cette institution (art 812 Cciv).

2) La renonciation anticipée à l’action en réduction

La loi du 23 juin 2006 revient sur la prohibition des pactes sur succession future et autorise désormais les héritiers réservataires (exception à la réserve) à renoncer à exercer l’action en réduction avant l’ouverture de la succession de leur auteur.
Donc, c’est là une exception majeure. Un tel pacte successoral, qui est un pacte sur succession future, est depuis le 1er janvier 2007 valable. Mais, il est soumis à des conditions.
Il doit être fait au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires désignés.
Il ne produit ses effets qu’après l’acceptation des bénéficiaires de cette renonciation anticipée qui peut elle-même concerner tout ou partie de la réserve du renonçant ou qui peut concerner une libéralité portant sur un bien déterminé.
Des conditions de forme strictes et impératives encadrent l’acte de renonciation anticipée à demander l’action en réduction.
Il doit s’agir obligatoirement d’un acte authentique spécifique cad ne contenant que la renonciation et être reçu par 2 notaires afin que l’acte soit établi de façon éclairée et sans pressions extérieures, chaque renonçant doit le signer en présence des 2 seuls notaires (seul dans le bureau)  ne faisant pas partie de la même SCP.
Sous le bénéfice de ces développements, il convient de souligner que le mécanisme de la transmission successorale, qui s’opère par le seul effet du décès et en vertu de la loi, s’exprime à travers d’une part la dévolution (cad la détermination des successibles cad aptes à hériter) et d’autre part, l’acquisition de la succession (il ne suffit pas pour recueillir les droits et obligations du de cujus d’avoir une vocation successorale : encore faut-il l’accepter).












TITRE 1 La dévolution de la succession

Qui est appelé à recueillir le patrimoine du défunt ?
Notre droit concilie la protection de la famille et la liberté, donc la volonté du cujus (beau sujet de partiel).
Il existe une dévolution légale qui s’applique à la totalité de la succession SI le défunt n’a fait aucune libéralité.
La dévolution légale peut ne concerner qu’une partie des biens cad celle dont le de cujus n’a pas disposé à titre gratuit. Elle peut encore s’appliquer à des biens que le défunt avait donné de son vivant, mais qui sont réintégrés dans l’actif successoral pour reconstituer la réserve héréditaire.
La succession ab intestat est précisément la dévolution selon les règles fixées par la loi. Les libéralités sont de nature à modifier la dévolution légale. La liberté du disposant n’est que partielle en présence d’héritiers réservataires.
Ce pouvoir du disposant, qui va donc être plus ou moins étendu, de modifier pendant sa vie la dévolution légale trouve son expression dans ce que l’on appelle la dévolution volontaire.


Sous-Titre 1 La dévolution légale

La dévolution légale est dominée par la promotion des droits du conjoint survivant et des enfants naturels. C’est ce que l’on appelle la succession ab intestat. Cette succession implique l’examen des conditions requises pour succéder, et d’autre part, des personnes désignées comme successibles.


Chapitre 1 Conditions requises pour succéder

2 conditions sont nécessaires :

Section 1 Exister

L’art 725 Cciv dispose : « Pour succéder, il faut exister à l’instant de l’ouverture de la succession ou ayant déjà été conçu, naître viable ».
L’exigence est double. Pour être appelé à la succession, il faut, d’une part, être né, du moins avoir été conçu avant le décès du dé cujus.
En vertu de la grande règle, « infans conceptus pro nato habetur », l’enfant posthume, dès lors qu’il a été conçu avant la mort de son père, peut recueillir sa succession. Pour cela, encore faut-il qu’il naisse vivant (l’enfant mort-né ne recueille pas la succession) et viable (al 2).
Renvoi à l’art 311-1 Cciv qui fixe la date de la conception = l’enfant est présumé être conçu entre le 300e et le 180e jour avant sa naissance.
D’autre part, pour succéder au défunt, il faut lui survivre. Du moins, il ne faut pas être déjà en état d’absence déclaré (art 1128 Cciv). La date déterminante étant celle de la transcription du jugement déclarant l’absence. Il suffit que l’héritier ait survécu un instant, si bref soit-il, au de cujus pour qu’il recueille sa succession. D’où l’importance de fixer l’ordre des décès lorsque 2 personnes, dont l’une avait vocation à succéder à l’autre, périssent dans un même événement. L’ordre des décès est établi par tous moyens (art 725-1 al 1er Cciv).
Le nouvel art 725 al 2 Cciv abroge la fameuse théorie des comourants qui établissait des présomptions arbitraires de survie fondées sur l’age et sur le sexe. Ce nouvel article dispose : « Si cet ordre ne peut être déterminé, la succession de chacune d’elles est dévolue sans que l’autre y soit appelé ».

Pierre + --------Cécile

Règlement séparé de la succession
Luc + ------ Sophie

Pierre a pour épouse Cécile. Il a pour fils Luc qui est marié à Sophie. Pierre et Luc ont un accident et meurent tous 2. Que va-t-il se passer ? De 2 choses l’une :
D’une part, si l’ordre des décès est établi, il faut alors à nouveau distinguer 2 hypothèses :
- Soit Pierre décède le 1er = sa succession sera partagée entre son fils qui lui survit et sa femme Cécile.
- Soit Luc décède le 1er= sa succession sera répartie entre Sophie, Pierre et Cécile.
Si l’ordre des décès n’est pas établi (on ne sait pas lequel des 2 est mort le 1er), il va y avoir un règlement séparé d’une part de la succession de Pierre (toute la succession ira à sa femme cad Cécile), quant à la succession de Luc, elle sera dévolue toute entière à Sophie qui est son conjoint survivant.
L’art 725-1 al 2 Cciv ajoute toutefois : « Si l’un des co-décédé laisse des descendants, ceux-ci représentent leur auteur dans la succession de l’autre lorsque la représentation est admise ».

Pierre



Laurent Luc Lucien



Marc

Pierre a 3 enfants = Pierre décède après Luc. Luc lui-même est décédé et laisse un enfant Marc. S’il y a un règlement séparé des successions, celle de Luc ira tout entier à Marc, et la succession de Pierre ira tout entier à Laurent et Lucien.
Or, une exception est apportée à ce règlement séparé par le jeu de la représentation. La succession de Luc va toujours toute entière à Marc. Celle de Pierre ira à concurrence d’un tiers chacun à Laurent, Marc et Lucien  c’est le mécanisme de la représentation.

Section 2 Ne pas être exclu

Peuvent être exclus de la succession par une disposition testamentaire les héritiers non réservataires. La loi du 3 décembre 2001, art 726 – 729-1 nouveau Cciv, exclut pour sa part de la succession l’héritier indigne. L’indignité présente une analogie avec la révocation des libéralités pour cause d’ingratitude (art 955 Cciv). C’est une sorte de déchéance que la loi inflige à l’héritier coupable d’un tort grave envers le défunt ou envers sa mémoire.
Sans en modifier fondamentalement le principe, la loi du 3 décembre 2001 (c’est important) infléchit le régime de l’indignité dans les nouveaux art 726 à 730 Cciv.


De la forme opérée par cette loi, 2 idées maîtresses se dégagent :

D’une part, la loi nouvelle met fin au caractère rigide et étroit des règles qui avaient été posées dans le Code de 1804. En effet, à côté des causes obligatoires d’indignité, regroupant les condamnations les plus graves (peine criminelle ou avoir volontairement donné ou tenté de donner la mort, ou porté des coups ou commis des violences ayant entraîné la mort du défunt = art 726 nouveau Cciv  l s’agit là d’une cause obligatoire d’indignité car cette cause entraîne obligatoire l’indignité de son ou ses auteurs), la loi de 2001 a créé des causes facultatives d’indignité. Ces causes facultatives peuvent conduire leur auteur à être déclaré indigne de succéder au défunt. C’est le juge ici qui a tout pouvoir d’appréciation. On les retrouve à l’art 727 Cciv et ne sont pas exhaustives.
Ex : coups et blessures, faux témoignage, non assistance au défunt, dénonciation calomnieuse contre le défunt.
Idée générale qui peut être reprise dans un épreuve de synthèse = Avec ces causes facultatives cad des causes qui sont à la discrétion du TGI du lieu d’ouverture de la succession, nous pénétrons sur le terrain comme le disait Roubier de la règle flexible, souple, nuancée, dans une matière qui a pourtant un caractère fortement répressif. On est à la limite du droit pénal. En décidant désormais « que n’est pas exclu de la succession le successible frappé d’une cause d’indignité prévue aux art 726 et 727 Cciv, lorsque le défunt postérieurement aux faits et à la connaissance qu’il en a eu, a précisé par une déclaration expresse de volonté qu’il entend le maintenir dans ses droits héréditaires, la loi nouvelle de 2001 cad en l’occurrence le nouvel art 728 Cciv accentue encore la flexibilité du droit de l’indignité ».

D’autre part, la loi nouvelle met fin à l’injustice dont étaient victimes les enfants de l’indigne.

Jean



Joël Julien Jérôme



Gérard

Jean a 3 fils : Joël, Julien (qui a un fils se prénommant Gérard) et Jérôme.
Selon le Code de 1804, si Julien a porté des coups et blessures ayant entraîné la mort de Jean, si Julien est indigne, la succession de Jean se partageait entre Joël et Jérôme. Pourquoi un tel raisonnement ? C’était un raisonnement de rigueur juridique, qui aboutit ici à une injustice. Si Julien est indigne de succéder à Jean, Gérard ne pourra pas venir à la succession de Jean car la représentation ne joue pas pour Julien (solution de 1804).
Depuis la loi du 3 décembre 2001, il est admis que Gérard puisse représenter Julien, et la succession de Jean va être partagée en 3 entre Joël, Gérard et Jérôme. Cette règle est juste, même si elle trahit le mécanisme de la représentation (car on ne peut pas en principe avoir plus de droits que celui que l’on représente). Ici, Gérard aura plus de droits de Julien car il pourra succéder à Jean. Gérard qui n’a pas commis de faute envers Jean ne doit pas être victime de la faute qu’a commise Julien. Il viendra donc à la succession de Jean. En d’autres termes, les enfants de l’indigne qui ne pouvaient venir précédemment sous l’empire de 1804 à la succession que de leur propre chef, peuvent désormais venir à la succession par la représentation  art 729-1 et 755 nouveau Cciv.

Parallèle avec la loi de 2006 = la loi de 2001 apporte cette innovation considérable que désormais on représente un indigne. Donc, la représentation est admise en matière d’indignité. Et, la loi de 2006 admet que l’on puisse représenter un renonçant. Là encore, c’est une véritable révolution juridique en faveur de la justice contre la rigueur du droit.

Chapitre 2 La détermination légale des successibles

C’est celui qui est appelé à la succession.
L’art 732 Cciv, conformément au droit romain et à l’inverse des pays de coutume, ne considère en principe ni la nature ni l’origine des biens pour en régler la succession.
La succession est dite ordinaire parce que normale et unitaire. Tous les biens en principe sont soumis aux mêmes règles de dévolution. Ce principe d’unité est exceptionnellement écarté sous la forme d’un droit de retour légal. Actuellement, il y a 2 droits de retour légaux :
- Légal de l’art 757-3 Cciv créé par la loi de 2006 au profit des frères et sœurs en cas d’adoption
- Légal qui concerne aussi l’adoption simple

C’est ce que l’on appelle les successions anomales cad une succession qui ne va pas être toute entière dévolue sur le fondement du principe d’unité.

Section 1 La succession ordinaire

Elle est dévolue aux héritiers ab intestat. Si le de cujus ne laisse aucun successible, sa succession reviendra à l’Etat.

Sous-Section 1 Les droits des héritiers

Rappel qui consiste à préciser la terminologie classique employée en matière successorale, encore que certains termes ont un sens juridique précis ont été balayé par les lois de 2001 et 2006 qui emploieront le langage classique. On ne parlera que du langage classique.
Mot descendant = Permet d’indiquer tous ceux qui sont issus du défunt cad les enfants, petits-enfants, arrières petits-enfants… La loi de 2006 n’a pas réutilisé le mot descendant. La loi les énonce chacun.
Mot ascendant = Ce sont les parents dont est issu le défunt. Contrairement aux descendants, ils se répartissent en 2 catégories. Là encore, il y a un écart entre le langage classique et le langage de la loi. Il y a ce que classiquement on appelait les ascendants privilégiés qui sont le père et la mère. Ils ne peuvent pas être représentés par d’autres personnes. La loi les énonce chacun d’eux. A côté d’eux, on trouve les ascendants ordinaires qui sont tous les autres ascendants autres que le père et la mère.
Mot collatéral = Dans le sens le plus précis, ce sont les parents qui ont avec le défunt un auteur commun. On en distingue 2 catégories : d’une part, les collatéraux privilégiés qui sont les frères et sœurs du défunt ainsi que leurs descendants. Attention, on peut désormais dire que la représentation joue pour les descendants et les collatéraux privilégiés. En d’autres termes, la représentation ne joue jamais pour les ascendants ordinaires et collatéraux ordinaires. D’autre part, on a les collatéraux ordinaires sont tous les autres qui ont un lien de parenté avec le défunt, soit l’oncle, la tante ou le cousin.

Sous le bénéfice de ce rappel, la détermination des successibles repose sur 3-4 notions fondamentales.

L’ordre

Il regroupe une catégorie de parents. Dans le droit successoral, même si la loi de 2001 fait semblant de l’ignorer, il y a 4 ordres d’héritiers avec une hiérarchie.
Le 1er ordre : ce sont les descendants.
Le 2ème ordre est mixte : il est composé à la fois des ascendants privilégiés et des collatéraux privilégiés.
Le 3ème ordre : ce sont les ascendants ordinaires.
Le 4ème ordre : ce sont les collatéraux ordinaires.

Qu’en est-il du conjoint survivant ?
Ce n’est pas un parent. C’est un allié de son conjoint. Il a une situation hybride et complexe car tantôt il appartient au 1er rang, tantôt, il vient au 2ème ordre et est exclu plus ou moins par les enfants.
En principe, chaque ordre exclu le suivant.

Le degré

Il s’agit à l’intérieur de chaque ordre de la proximité de la parenté avec le défunt. Chaque degré correspond à une génération. Le degré de parenté entre descendants et ascendants sera donc fixé par le nombre de générations qui les séparent.
Ex : le petit-fils est parent au 2ème degré de son grand-père.

Entre collatéraux, il faut d’abord remonter à l’ancêtre commun avant de redescendre. C’est ainsi que 2 cousins germains sont parents au 4ème degré :
1 qui remonte à la mère
2 qui remonte à la grand-mère
3 qui remonte à la tante
4 qui descend au cousin


La ligne

La ligne est dite directe lorsqu’il s’agit de la descendance ou de l’ascendance. 2 lignes reliées par un ancêtre commun sont dites collatérales. Cette notion est encore utilisée pour distinguer les parents unis au défunt par le père= ligne paternelle, de ceux qui se rattachent au défunt par la mère= ligne maternelle.

La fente

Elle consiste précisément à diviser la succession entre 2 parts égales. L’une revient à la famille paternelle et l’autre à la famille maternelle.

Père Mère Grand-père maternel
Grand-mère maternelle




Fils



Attention, en droit successoral, on utilise la fente mais il n’y a pas dans chaque partie de refente.
La petite-fille se situe au 2ème degré en ligne directe par rapport à sa grand-mère.
Le neveu se situe au 3ème degré en ligne collatérale par rapport à son oncle.

Sous le bénéfice de ces notions de base,on va déterminer les droits des héritiers ab intestat, qui ne sont pas les mêmes selon qu’il y a ou pas un conjoint survivant.

1) Les droits successoraux des parents en l’absence de conjoint survivant

On suppose qu’il n’y a pas de conjoint survivant.
L’art 733 nouveau du Cciv (grand apport loi 2001) dispose que : « La loi ne distingue pas selon les modes d’établissement de la filiation pour déterminer les parents appelés à succéder ».
Il aurait fallu dire que la loi ne distingue plus car il a fallu attendre la loi de 2001 pour que l’égalité entre les filiations légitimes et naturelles soient complètes.
Dans l’Ancien droit, les enfants naturels ne disposaient d’aucune prérogatives. La famille était légitime. On ne rentrait dans la famille que par le mariage.
Le législateur révolutionnaire (jusqu’à 1804) a adopté une position extrême inverse. Il y avait égalité totale entre les enfants légitimes et naturels. Le Code de 1804 reconnaît des droits successoraux aux enfants naturels simples qui étaient inférieurs à ceux des enfants légitimes. Mais, ce Code de 1804 écarte de la succession de leur auteur les enfants adultérins et incestueux.
La loi du 3 janvier 1972, après avoir décidé que l’enfant naturel entre dans la famille de son auteur et qu’il a en principe les mêmes droits qu’un enfant légitime, va établir néanmoins une discrimination au détriment des enfants adultérins. Ils ne recevaient que la moitié que ce qu’ils auraient eu s’ils avaient été légitimes (ancien art 760 Cciv).
Avant même que n’intervienne la loi de 2001, il faut savoir que la CEDH a le 1er février 2000 condamné la France pour violation à raison de cette discrimination pour violation de nos engagements internationaux en termes d’égalité. C’est l’arrêt Mazureck (D2000 p 157 et p 322).
Enfin, la loi du 3 décembre 2001 , pour se conformer à cet arrêt, a supprimé l’amputation des droits successoraux qui frappaient les enfants adultérins en présence d’enfants du conjoint survivant ou d’enfants légitimes issus du mariage au cours duquel l’adultère a été commis. Afin de parvenir à une égalité totale dans le droit patrimonial de la famille, afin de parvenir à une égalité totale des filiations légitimes et naturelles, la loi de 201 a abrogé toutes les dispositions du Code, notamment le dernier alinéa de l’art 334, 334-7, 908 et 908-1 Cciv relatifs aux libéralités ; a changé la rédaction des art 915 à 915-2 Cciv concernant la réserve et a abrogé l’art 1097-1 Cciv. Cet ancien article ne permettait pas un enfant adultérin de se prévaloir d’une faculté reconnue aux enfants légitimes la conversion de l’usufruit de la veuve en rente viagère.
Nous dirons que cette unification de l’ordre des descendants est un facteur de simplification pour le juriste. Globalement, aujourd’hui, la composition et la hiérarchie des ordres demeurent inchangées, même si la formulation de la loi de 2001 est différente. Renvoi à l’art 734 Cciv en vertu duquel il existe bien 4 ordres d’héritiers. Chaque ordre prime le suivant.

A) Les descendants

Ils excluent tous les autres héritiers. Le descendant du degré le plus proche exclu à son tour tous les autres descendants. L’art 744 al 2 Cciv permet de dire que le fils du défunt exclu par exemple ses propres enfants. Et si le défunt laisse au degré le plus proche plusieurs descendants, la succession est partagée entre eux par parts égales.






Jean +


Pierre Paul



Chantal + Sylvie


Joelle

Il faut comprendre que le seul respect de la proximité du degré aboutirait à faire dépendre la succession du hasard des décès.
Ex : Jean a 2 fils, Pierre et Paul, qui ont chacun 1 fille. Jean meurt le 1er. Pierre et Paul se partage par moitié sa succession, lesquels transmettront à leur mort respectivement à Chantal et Sylvie les biens par eux recueillis dans la succession de leur père Jean.
Supposons maintenant que Pierre meurt avant son père Jean = la seule règle de la proximité des degrés attribuerait au décès de Jean toute la succession à Paul. Ce qui revient à dire que Chantal, fille de Pierre prédécédé, ne serait jamais appelée à recevoir une fraction des biens successoraux ayant appartenus à son grand-père Jean. Précisément, la technique de la représentation prévue à l’art 751 Cciv permet d’éviter ce résultat injuste.
L’art 752 Cciv nous dit que : « La représentation est une fiction juridique qui a pour effet d’appeler à la succession les représentants aux droits du représenté ».
La représentation a lieu à l’infini dans la succession directe descendante.
Concrètement, Chantal viendra à la succession de son grand-père Jean, et si Chantal étant elle-même prédécédée, laissant une fille Joëlle, celle-ci viendra à la succession de son arrière-grand-père Jean.
La représentation ne joue qu’en ligne descendante et en ligne collatérale privilégiée. Elle ne joue jamais pour les ascendants et collatéraux ordinaires.
L’art 754 Cciv dispose : « On représente les prédécédés. On ne représente les renonçants que dans les successions dévolues en ligne directe ou collatérale ». C’est le grand apport de la loi de 2006 qui ajoute « On peut représenter celui à la succession duquel on a renoncé ».
Depuis la loi de 2001, les enfants d’un héritier indigne peuvent le représenter ainsi que les enfants du renonçant (depuis la loi de 2006) peuvent le représenter.
Dans tous les cas où la représentation est admise, le partage de la succession s’opère par souches comme si le représenté venait à la succession. S’il y a lieu, ce partage s’opère par subdivisions de souches. A l’intérieur d’une souche ou d’une subdivision de souches, le partage se fait pas tête (art 753 Cciv).










André +



1/3 Anatole + 1/3 Antoine 1/3 Aristide



1/6 Béatrice 1/6 Brigitte +


1/18 Camille 1/18 Catherine 1/8 Clothilde


On a supposé que André, Anatole et Brigitte soient prédécédés.
Si donc plusieurs enfants représentent leur parent prédécédé, ils ne recevront au total que la part qu’aurait eu ce parent.
A défaut de descendant et toujours en l’absence de conjoint survivant, peuvent être appelés à la succession les ascendants et les collatéraux.

C) Les ascendants et collatéraux

Sous le bénéfice des distinctions qui vont suivre, on constate ici et parfois une incidence de la fente. La fente qui ne s’applique jamais aux descendants ni aux collatéraux privilégiés, c’est la division de la succession en 2 parts égales dont l’une revient à la famille paternelle et l’autre à la famille maternelle.
Art 747 Cciv dispose : « Lorsque la succession est dévolue à des ascendants, elle se divise par moitié entre ceux de la branche paternelle et ceux de la branche maternelle ».
Art 748 Cciv précise : « Dans chaque branche succède à l’exclusion de tout autre l’ascendant qui se trouve au degré le plus proche ».
La technique de la fente a son origine lointaine dans la règle « paterna paternis, materna maternis ». Elle a pour seul et unique but de faire régner une égalité entre les lignes. Afin de mesurer l’exacte incidence de la fente dans la dévolution ab intestat, il faut envisager l’étude des ascendants et collatéraux privilégiés, et d’autre part, des ascendants et collatéraux ordinaires.

a) L’ordre mixte : ascendants et collatéraux privilégiés

Il s’agit en principe du 2ème ordre d’héritier dont la particularité est d’être un ordre mixte puisqu’il est composé à la fois et d’une part des seuls pères et mères (il n’y a pas de représentation en ligne ascendante), et d’autre part, il est composé des frères et sœurs du défunt ainsi que leurs descendants parce que la représentation joue en ligne collatérale privilégiée.
La dévolution successorale s’opère différemment selon que les ascendants et collatéraux privilégiés viennent ou pas en concours.

) Concours des ascendants et collatéraux privilégiés :
A défaut de descendants, les pères et mères reçoivent chacun ¼ de la succession. Les collatéraux privilégiés se partagent le solde cad la moitié de la succession si les pères et mères sont tous 2 vivants, et les ¾ de la succession si l’un des pères et mères est décédé.
1/4Père Mère 1/4 Père+ Mère 1/4

+ +

Frère (solde 1/2) Frère 3/4

Ex 1 = On suppose que le de cujus laisse un père, une mère et un frère.
Ex 2 = On suppose que le de cujus laisse sa mère vivante et un frère vivant. Le père est décédé. Il n’y a qu’un ascendant vivant.

) Absence de concours entre ascendants et collatéraux privilégiés
Par hypothèse, viennent seuls à la succession soit les ascendants privilégies, soit les collatéraux privilégiés.
Le défunt laisse des ascendants privilégiés mais pas de descendants privilégies = Lorsque d’une part, les pères et mères sont tous 2 vivants, chacun prend la moitié de la succession. Attention, c’est ici une application de la fente (alors que lorsqu’il y a 2 enfants, ils reçoivent la moitié mais ce n’est pas l’application de la fente). Conformément à l’art 747 Cciv, la fente partage en 2 parts égales la succession.
On suppose que le de cujus laisse son père et sa mère, on doit avoir le réflexe d’appliquer la fente.

Père Mère

½ ½

Fente

Lorsque, d’autre part, un seul des pères et mères est vivant, cet ascendant privilégié reçoit la moitié de la succession s’il existe des ascendants ordinaires dans l’autre ligne. C’est encore une application de la fente. La succession est dévolue pour moitié à l’ascendant privilégié non décédé et pour moitié aux ascendants ordinaires de l’autre ligne.

Grand-père paternel
1/2


Père + Mère
1/2


Défunt


Ex : Le de cujus laisse sa mère. En ligne maternelle, il y a la mère. En ligne paternelle, le père est décédé. Mais, le père est mort alors que son propre père est vivant. Le grand-père est vivant. Dans cette hypothèse, la fente joue. Il va donc y avoir moitié d’un côté et de l’autre.




Grand-père Grand-mère
Paternel paternelle
¼ ¼



Père+ Mère
1/2


Défunt


Ex : Les 2 ascendants viennent en concours de la succession. Attention, ce n’est pas ici l’application de la refente. Il n’y a pas en droit successoral de refente dans la ligne paternelle.
2 explications sont à donner :
- Selon Grimaldi (n°101 de son ouvrage chez Litec), les ascendants privilégiés n’appartiennent au 2ème ordre d’héritiers que s’il existe par ailleurs des collatéraux privilégiés. Nous avons déjà étudié ce cas dans le concours entre les ascendants et collatéraux privilégiés. Dans cette hypothèse, les pères et mères comme les frères appartiennent au 2ème ordre d’héritiers et viennent ensemble à la succession. Dans tous les autres cas, notamment lorsqu’un ascendant privilégié vient à la succession en concours avec un ascendant ordinaire, l’auteur nous dit que ledit ascendant privilégié est alors ravalé dans le 3ème ordre d’héritier au même titre que les ascendants ordinaires.

Grand-père paternel
1/2


Père + Mère
1/2


Défunt

Le de cujus laisse sa mère et seulement un grand-père paternel. L’auteur nous dit que dans ce cas, la mère n’est plus dans le 2ème ordre d’héritiers parce qu’elle exclurait le 3ème ordre d’héritier et raflerait toute la succession. La mère est donc ravalée dans le 3ème ordre d’hériter et tout se passe comme si on avait en concours un ascendant privilégié et un ascendant ordinaire. Le grand-père paternel recevra donc la moitié de la succession.
Cette explication n’est pas convaincante. On peut donner une 2nde explication.

- En tout état de cause et comme le confirment les art 734 et 739 Cciv cad sans qu’il importe que les ascendants privilégiés soient oui ou non en concours avec des collatéraux privilégiés, dans les 2 cas, l’ascendant privilégié continue à être dans le 2ème ordre d’héritiers. Autrement dit, dans notre exemple, la mère fait toujours partie du 2ème ordre d’héritier. Mais, on pourrait dire qu’elle exclurait le grand-père paternel. Elle fait toujours partie du 2ème ordre d’héritiers, mais il est préférable de dire que la règle de l’ordre est ici infléchie par la règle de la fente. C’est une application de la fente successorale. Voilà pourquoi la mère n’aura que la moitié puisque la règle de l’ordre est contrariée par la fente. La fente apporte donc une exception à la règle de l’ordre. On remarque que Grimaldi ne s’est pas soucié de savoir si la fente joue ou pas.or, on sait que la fente joue en ligne ascendante. Donc, il faut concilier la règle de l’ordre avec celle de la fente.

A défaut d’ascendants ordinaires dans l’autre ligne, l’ascendant privilégié en vie reçoit toute la succession.

Père + Mère




Défunt

Ex : Le de cujus laisse seulement sa mère. De l’autre côté, tout le monde est mort. Puisqu’il n’y a pas personne, on ne fait pas jouer la fente. La mère recueille la totalité de la succession.
Tel est le cas si le défunt, outre l’ascendant privilégié dans une ligne, ne laisse dans l’autre ligne que des collatéraux ordinaires.

Cousin germain Mère




Défunt

Ex : le cousin n’est qu’un collatéral ordinaire, donc il ne reçoit rien.

Le défunt laisse des collatéraux privilégiés mais pas d’ascendants privilégiés : les frères, sœurs et leurs descendants excluent toujours les parents des 3ème et 4ème ordres cad que les frères, sœurs et leurs enfants, parce qu’ils appartiennent au 2ème ordre, excluent toujours les ascendants ordinaires et les collatéraux ordinaires. En d’autres termes, les collatéraux privilégiés reçoivent ici toute la succession sans qu’il y ait lieu de distinguer, depuis la loi du 3 décembre 2001, entre les frères et sœurs germains, consanguins et utérins.
Germain = en droit, cela signifie que les 2 frères ont le même père et la même mère.
Consanguin = signifie même père mais pas même mère
Utérin = signifie même mère mais pas même père.

Défunt Frère

1) Frère germain (Marc) = 1/3
2) Frère consanguin (Luc) = 1/3
3) Sœur utérin (Béatrice) = 1/3

Ex : Le de cujus laisse 2 frères et une sœur. Aujourd’hui, on ne regarde plus ces qualités. Chacun de ces collatéraux privilégiés viennent à la succession dans la même proportion, soit 1/3 chacun.



b) Les ascendants et collatéraux ordinaires

) Les ascendants ordinaires = le 3ème ordre d’héritiers
Les ascendants ordinaires sont des ascendants autres que les pères et mères cad les grands-pères, grands-mères… Ils forment le 3ème ordre d’héritiers.
Les art 747 et 748 Cciv invitent à distinguer 2 hypothèses :
1ère hypothèse : Il y a des ascendants ordinaires dans les 2 lignes.

Grand-père paternel Grand-mère


Père + Mère +


Défunt


La fente joue lorsque, selon l’art 747 Cciv, la succession est dévolue à des ascendants. Elle se divise par moitié entre ceux de la branche paternelle et ceux de la branche maternelle. En d’autres termes, la succession est partagée par moitié entre les 2 lignes.
L’art 748 Cciv précise quant à lui que « Dans chaque branche, l’ascendant ordinaire au degré le plus proche exclu tout autre ascendant ordinaire qui serait à un degré plus éloigné ». Dans son alinéa 2, l’art 748 Cciv précise que « Les ascendants au même degré succèdent par têtes ».

2ème hypothèse : Il n’existe d’ascendants ordinaires que dans une seule ligne.
Ils recueillent toute la succession cad qu’ils éliminent les collatéraux ordinaires. L’art 748 dernier alinéa dispose que « A défaut d’ascendants dans une branche, les ascendants de l’autre branche recueille toute la succession ». Donc, lorsque le de cujus ne laisse des ascendants ordinaires que dans une seule ligne, ils recueillent toute la succession. La solution est la même s’il y a des ascendants ordinaires dans une seule ligne et dans l’autre ligne, uniquement des collatéraux ordinaires.
Les ascendants ordinaires excluent toujours les collatéraux ordinaires en application de la règle de l’ordre. En d’autres termes, les héritiers du 3ème ordre excluent toujours ceux du 4ème ordre.
Les collatéraux ordinaires constituent bien le 4ème et dernier ordre d’héritiers.

) Les collatéraux ordinaires = le 4ème ordre d’héritiers
Lorsqu’ils sont appelés à la succession, oncles, tantes, cousins, jusqu’au 6ème degré (ce qui implique qu’il n’y ait aucun autre héritier d’un ordre préférable), la succession est d’abord divisée en 2 moitiés. L’une va aux collatéraux ordinaires de la ligne paternelle, l’autre est dévolue à ceux de la ligne maternelle. Ce qui veut dire qu’ici, la fente joue.
C’est ce que nous dit l’art 749 Cciv : « Lorsque la succession est dévolue à des collatéraux autres que les frères et sœurs ou leurs descendants, elle se divise par moitié entre ceux de la branche paternelle et ceux de la branche maternelle ».
L’art 750 Cciv apporte les précisions suivantes : « Dans chaque ligne, le collatéral au degré le plus proche hérite à l’exclusion de tout autre. S’il y a plusieurs collatéraux au même degré dans la ligne considérée, ils succèdent par têtes. A défaut de collatéral dans une branche (= ligne), les collatéraux de l’autre branche recueilleront toute la succession ».
Conclusion :
La loi du 3 décembre 2001 (mis à part le cas particulier des frères, sœurs consanguins, germains et utérins) n’a pas modifié les droits des héritiers en l’absence de conjoint survivant. La formulation « ça et là » est différente, mais les principes n’en sont pas pour autant affectés. Tel n’est plus le cas, en revanche, de la vocation successorale du conjoint survivant qui constitue l’axe majeur de la réforme du 3 décembre 2001.

2) Les droits successoraux des parents en présence du conjoint survivant

Une vue d’ensemble de la condition financière du conjoint survivant déborde largement sa vocation successorale (beau sujet de partiel). En effet, la condition financière dépend tout d’abord de la moitié de la retraite du défunt.
Également, lorsque le de cujus a été prévoyant, il peut être bénéficiaire d’une assurance-vie.
Ex : le mari pendant sa vie cotise à un organisme d’assurance-vie et encore faut-il qu’il désigne comme bénéficiaire sa femme. Le con,joint survivant, bien souvent est le bénéficiaire de l’assurance-vie contractée par le défunt. Le capital de cette assurance revient au conjoint survivant sans aucun droit à payer car ce n’est pas du droit successoral.
Il faut aussi tenir compte des droits qu’il recueille au titre de la liquidation du RM. A titre de rappel, l’attribution de la communauté universelle assortie d’une clause d’attribution intégrale de la communauté est une technique de prévoyance conjugale (ex sujet sur la prévoyance conjugale). Cela consiste en fin de vie à changer de RM en prévoyant le régime de la communauté universelle.
Enfin, dernière technique de prévoyance conjugale qu’est la donation entre époux. Elle conserve son utilité dans le domaine des libéralités.
Nous nous en tiendront exclusivement ici à la vocation successorale ab intestat du conjoint survivant.
Pour nous en tenir à cette vocation successorale, le maître mot est celui de promotion spectaculaire des droits du conjoint survivant. Aussi longtemps que la famille reposait sur les seuls liens du sang, le conjoint survivant qui n’est qu’un allié (pas un parent) n’avait pas de vocation successorale. Tout au plus, avait-il droit à quelques aliments. Le conjoint survivant, en d’autres termes, n’avait pas de vocation héréditaire dans la mesure était réservée aux parents. Lui attribuer des biens héréditaires eut été courir le risque insupportable à l’époque de les faire sortir de la famille parentale, ce risque se réalisant avec le remariage du conjoint survivant.
Le Code de 1804 ne lui reconnaissait une vocation successorale qu’en l’absence de parents au degré successibles cad qu’en l’absence de parents jusqu’au 12ème degré (loi 31 décembre 1917 qui a ramené la vocation héréditaire au 6ème degré).
Le conjoint survivant n’avait pas davantage la saisine jusqu’en 1958. Parce que n’ayant pas la saisine, il est un successeur irrégulier cad celui qui n’a pas la saisine (par rapport au successeur qui a la saisine). C’est une ordonnance du 23 décembre 1958 qui lui a reconnu la saisine.
Tandis que le soucis de conservation des biens déclinait dans une famille devenue instable, d’autant qu’il s’agit le plus souvent d’une fortune que le défunt a lui-même acquise et non d’une fortune transmise, la promotion du conjoint a pu commencer. L’affection est plus vivement ressentie en principe envers celui ou celle dont on a partagé les joies et les peines qu’envers les ascendants que l’on a oubliés, ou les cousins que l’on a jamais connu.
Après les lois de 1891 et 1925 qui ont attribué au conjoint survivant des droits successoraux en usufruit, les lois de 1930 et 1957 ont franchi un nouveau pas en lui attribuant, dans certains cas, des droits en pleine propriété.
La loi du 3 janvier 1972 relative à la filiation les a aménagés (droits successoraux en pleine propriété) de manière à tenir compte des droits successoraux reconnus par ce texte aux enfants adultérins (droits qui, sous l’empire de la loi de 1972, était inférieurs à ceux des enfants légitimes cad qu’ils ne recevaient que la moitié de ce qu’ils auraient eu s’ils avait été légitimes. D’où condamnation de la France par la CEDH avec arrêt Masureck).
La loi du 3 décembre 2001 supprime la discrimination successorale des enfants adultérins et réalise une nouvelle et spectaculaire ascension du conjoint survivant.
On est conjoint survivant, au sens du droit successoral, tout autant qu’il y a eu mariage. En d’autres termes, les droits du conjoint survivant sont subordonnés à l’existence du mariage jusqu’au jour du décès.
Si le divorce avait été prononcé ou si le mariage avait été annulé, le survivant ne peut rien prétendre dans la succession de son époux. Il a seulement droit à la prestation compensatoire.
C’est une approche totalement nouvelle que la loi du 3 décembre 2001 aux droits légaux du conjoint survivant. Cette approche est nouvelle car, à côté et d’une part, des droits ab intestat singulièrement accrus du conjoint survivant, elle lui reconnaît d’autre part et dans une certaine mesure un droit au maintien de ses conditions d’existence.

Sous1) Droits ab intestat du conjoint survivant

Nous disons droits ab intestat car une donation entre époux reste possible, donation qui augmenterait encore ces droits ab intestat.
Quels sont les droits ab intestat ?
On distingue d’une part la vocation ab intestat et d’autre part la réserve du conjoint survivant.

A) La vocation ab intestat du conjoint survivant

Les art 756 et s. Cciv établissent la vocation ab intestat du conjoint successible au travers du triptyque suivant :

1) En présence de descendants

En présence de descendants, faibles dans les successions qui n’étaient pas ouvertes avant le 1er juillet 2002, puisque limités au ¼ en usufruit (ancien art 767 al 2 Cciv), la vocation ab intestat du conjoint survivant a été singulièrement augmentée par la loi du 3 décembre 2001. Mais, cette loi distingue selon que les enfants sont ou pas issus du même lit.

a) Enfants issus du même lit

Art 757 Cciv : le conjoint successible a le choix entre l’usufruit de la totalité des biens existants ou la pleine propriété du quart des biens.
Les art 757-1 et s. Cciv posent 4 règles quant aux modalités d’exercice de cette option :
Les droits du conjoint survivant sont incessibles tant qu’il n’a pas opté (art 758-1 nouveau Cciv).
L’option entre l’usufruit et la propriété se prouve par tous moyens (art 758-2 Cciv). En pratique, les notaires vont rédiger une déclaration d’option.
Tout héritier peut inviter par écrit le conjoint survivant à exercer son option. Faute d’avoir pris partie par écrit dans les 3 mois de la réception de ladite lettre, le conjoint survivant est réputé avoir opté pour l’usufruit (art 758-3 Cciv).
Le conjoint survivant est également réputé avoir opté pour l’usufruit s’il décède sans avoir pris parti (art 758-4 Cciv).

L’usufruit est le droit de jouir et d’en tirer les revenus. Si les biens sont frugifères, le conjoint va récolter les fruits des biens. Ex : récolter les loyers.
L’option pour l’usufruit a l’avantage de procurer au conjoint des revenus jusqu’à son décès sans faire sortir le bien de la famille. A la mort du conjoint survivant, l’usufruit va s’éteindre et rejoindre la nue-propriété des enfants. Les biens seront alors la pleine propriété des enfants et les biens ne sont pas sortis de la famille par le sang.
Si les enfants ont les moyens de sortir au conjoint une rente viagère, celle-ci, à la demande des enfants, pourra prendre la place de l’usufruit.
Économiquement, le résultat est le même pour le conjoint survivant. L’avantage de fournir une rente viagère est que l’on évite pour les enfants le démembrement de la propriété. Le régime de conversion de l’usufruit en rente viagère n’a pas été modifié par la loi du 3 décembre 2001. Si tous les héritiers nu-propriétaires demandent cette conversion, le tribunal l’attribuera. En revanche, s’ils sont en désaccord, le tribunal jouit d’un pouvoir souverain d’appréciation.
La faculté de conversion n’est pas susceptible de renonciation. Les héritiers ne peuvent pas en être privés par la volonté du prédécédé (art 759-1 nouveau Cciv).
La conversion de l’usufruit en rente viagère peut être demandée jusqu’au partage (Cf TD).

b) Enfants non issus du même lit

Il résulte de l’art 757 Cciv que lorsque le défunt laisse un ou plusieurs enfants qui ne sont pas tous issus des 2 époux, le conjoint survivant ne peut pas opter pour l’usufruit. En d’autres termes, il recueille obligatoirement le ¼ en pleine propriété de la succession.
Pourquoi cette solution ?
L’examen de la jp montre que le recours à l’usufruit est souvent source de contentieux en présence d’enfants du défunt d’un lit différent. De plus, il n’est pas rare qu’une faible différence d’age sépare les enfants du 1er lit du de cujus de son conjoint survivant (c’est ça qui est important). Aussi, il ne conviendrait pas de transformer en nu-propriétaire à perpétuité des enfants qui auraient le même âge ou presque le même âge que le conjoint survivant usufruitier. C’est la raison pour laquelle les auteurs de la réforme ont jugé préférable de ne pas prévoir, dans le cadre de la dévolution légale, un usufruit au bénéfice du conjoint survivant sur des biens dont la nue-propriété reviendrait à des enfants du défunt d’un autre lit. La solution la plus simple consiste à accorder au conjoint survivant le ¼ en pleine propriété de la succession du défunt.

2) En présence du père et (ou) de la mère

Il résulte de l’art 757-1 nouveau Cciv que si, à défaut d’enfants ou de descendants, le défunt laisse ses pères et mères, le conjoint survivant recueille la moitié de la succession. Le père aura ¼ et la mère aura ¼. Si l’un des 2 est prédécédé, la part du ¼ qui lui serait revenue s’il avait été vivant est dévolue au conjoint survivant. En d’autres termes, en présence seulement du père ou de la mère, ce dernier reçoit ¼ de la succession, et le conjoint survivant recueille les ¾ de la succession.
La question se pose de savoir sur quelle masse de biens calculer puis exercer les droits en pleine propriété du conjoint survivant ?
La question se pose en présence d’enfants car le conjoint a ¼ en pleine propriété, aussi en présence des pères ou mères car il a ¾ en pleine propriété, et la question se pose aussi en présence de père ou de la mère, ½ en pleine propriété.
Les art 758-5 al 1 et 2 Cciv, 758-5 al 1 et 2 Cciv invitent à distinguer d’une part la masse de calculs de la masse d’exercice.



a) Masse de calculs

Elle est précisée par l’art 758-5 al 1er Cciv. C’est après de très longs débats parlementaires que la solution la plus favorable pour le conjoint survivant a été retenue.
Le calcul en pleine propriété du ¼ (en présence d’enfants) , de ½ (en présence père et mère) ou des ¾ de la succession (en présence père ou mère) est effectué sur une masse faite de tous les biens existants au décès de son époux, auxquels sont réunis fictivement ceux dont le défunt aura disposé soit par acte entre vifs (donation), soit par acte testamentaire au profit de successibles sans dispense de rapport.
Cela signifie que sont réunis fictivement (ce n’est qu’une opération comptable) aux biens existants tous les biens donnés ou légués en avancement d’hoirie. En d’autres termes, seuls échappent à la masse de calculs les biens donnés ou légués avec dispense de rapport cad les biens donnés ou légués à titre préciputaire.
En appliquant à cette masse la quotité des droits en pleine propriété du conjoint survivant (le ¼, la ½ ou les ¾), on obtient le maximum en valeur de la vocation successorale en pleine propriété du conjoint successible.

b) Masse d’exercice

Art 758-5 al 2 Cciv qui prévoit cette masse d’exercice.
Quel que soit le chiffre obtenu par le calcul précédent, les droits en pleine propriété du conjoint survivant sont limités en raison des biens sur lesquels ils peuvent effectivement porter. Cette masse d’exercice comprend seulement les biens laissés par le défunt (à l’exception de tous les biens donnés ou légués).
Les biens donnés ou légués en avancement d’hoirie sont pris en compte pour la masse de calculs au titre d’une réunion fictive, mais ne sont pas pris en compte pour la masse d’exercice des droits en pleine propriété du conjoint survivant.
Il faut encore soustraire les biens nécessaires pour constituer la réserve des enfants (plus de réserve pour les ascendants) et pour assurer le droit de retour de l’art 757-3 Cciv.
Il faut comprendre que les dispositions de l’art 758-5 nouveau Cciv afférentes aux masses de calculs et d’exercice du droit en pleine propriété du conjoint survivant, ne concernent que les hypothèses où il vient à la succession en présence de descendants (art 757 Cciv), en présence du père et (ou) de la mère (art 757-1 nouveau Cciv).

3) Dans tous les autres cas

Art 757-2 nouveau Cciv.
Dans tous les autres cas cad « en l’absence d’enfants ou de descendants du défunt et de ses pères et mères », le conjoint survivant recueille toute la succession. C’est ici que la promotion du conjoint survivant est la plus spectaculaire.
Dans toutes les successions ouvertes depuis le 1er juillet 2002, le conjoint survivant, en principe, élimine les collatéraux privilégiés cad les frères et sœurs du défunt ainsi que leurs descendants (dans le droit antérieur à la réforme de 2001, en présence de frères ou sœurs du défunt, le conjoint survivant n’avait qu’un droit d’usufruit de moitié de la succession  ancien art 767 Cciv).
Aujourd’hui, le conjoint survivant a droit à toute la succession cad qu’il élimine les collatéraux privilégiés et leurs descendants. Mais, attention, cette attribution intégrale de la succession au conjoint survivant est doublement tempérée par un droit de retour légal, d’une part, et par une créance d’aliments, d’autre part.

D’une part, un droit de retour légal de moitié :
Il résulte de l’art 757-3 Cciv que le législateur de 2001 a aménagé le principe de l’attribution de la succession au conjoint survivant en permettant de conserver certains biens pour partie dans la famille par le sang. Il s’agit ici des frères et sœurs du défunt, ainsi que de leurs descendants.
Dorénavant, les biens que le défunt avait reçu de ses pères et mères par succession ou donation et qui se retrouvent en nature dans sa succession, reviennent pour moitié en toute propriété aux frères et sœurs du défunt ou à leurs descendants.
Il faut une autre condition à savoir qu’il faut que lesdits frères et sœurs ou descendants soient issus du même parent décédé à l’origine de la transmission. C’est là ce que l’on appelle un droit de retour légal. L’autre moitié reste dévolue au conjoint survivant.

D’autre part, une créance d’aliments :
Elle est prévue par l’art 758 al 1er Cciv : « Lorsque le conjoint survivant recueille la totalité ou les ¾ des biens en pleine propriété, les ascendants du défunt autres que les pères et mères (ascendants ordinaires) qui sont dans le besoin bénéficient d’une créance d’aliments contre la succession du prédécédé ».
En d’autres termes, les grands-parents sont écartés de la succession par le conjoint survivant, mais s’ils sont dans le besoin, ils peuvent lui réclamer une pension alimentaire dont le propre est d’être prélevée sur la succession.
La loi du 3 décembre 2001 n’a pas seulement accru la vocation successorale du conjoint survivant. Elle lui a conféré dans certains cas des droits réservataires.

D) La réserve héréditaire du conjoint survivant

Le conjoint survivant est non seulement un héritier qui élimine les collatéraux, mais il est aussi un héritier réservataire sous 2 conditions (art 914-1 Cciv).
Un droit réservataire du ¼ est reconnu au conjoint survivant à 2 conditions :
- Il ne doit pas être engagé dans une procédure de divorce
- Il faut qu’il y ait absence de descendants ou d’ascendants.

2 illustrations :
Une illustration positive cad qu’il y a existence de la réserve : le défunt laisse seulement un frère légataire universel (c’est celui qui a tout ce qui est possible sauf la réserve) et son conjoint survivant. Il n’y a ni descendant ni ascendant. Dans ce cas, le frère ne recueillera que les ¾ de la succession, bien qu’étant légataire universel. En effet, le conjoint survivant a une réserve d’1/4 de la succession.
Une illustration négative cad qu’il y a absence de réserve : le défunt laisse son conjoint survivant, sa mère et son frère légataire universel. Il y a donc un ascendant privilégié. Donc, le conjoint survivant n’a pas de réserve et n’est donc pas réservataire. Cela veut dire que le frère légataire universel reçoit toute la succession (d’autant que l’ascendant privilégié n’a plus de réserve) à l’exception du droit au logement temporaire qui est reconnu au conjoint survivant dans le cadre du maintien de ses conditions d’existence.

Sous2) Contribution au maintien des conditions d’existence du conjoint survivant

La rupture du mariage entraîne des changements de conditions de vie auxquels le droit n’est pas insensible (ex de sujet partiel).
La prestation compensatoire compense autant que faire se peut en cas de divorce la disparité des niveaux de vie entre époux. En cas de veuvage, un ensemble de dispositions tendent à assurer dans une certaine mesure un maintien au profit du survivant des époux de ses conditions d’existence. Ces dispositions créées par la loi du 3 décembre 2001 concernent le logement et la pension.

A) Droit au logement

Thème majeur (beau sujet de synthèse avec les RM) de la loi du 3 décembre 2001, la protection du cadre de vie du conjoint survivant se concrétise d’une part dans la création de droits nouveaux, et d’autre part, dans le renforcement de droits existants.

1) Création de droits nouveaux

Il s’agit d’une part d’un droit temporaire au logement, et d’autre part, d’un droit viager au logement.

a) Droit temporaire au logement

Art 763 Cciv : « Si à l’époque du décès le conjoint successible occupe effectivement à titre d’habitation principale un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, il a de plein droit pendant 1 année la jouissance gratuite de ce logement ainsi que du mobilier compris dans la succession qui le garnit (al 1). Si son habitation était assurée au moyen d’un bail à loyer, les loyers lui en seront remboursés par la succession pendant l’année au fur et à mesure de leur acquittement (al 2). Ces droits prévus au présent article sont réputés effets directs du mariage et non droits successoraux (al 3). »
Ce droit au logement en tant qu’effet direct du mariage a un caractère d’ordre public.

c) Droit viager au logement

Art 764 Cciv : « Le conjoint successible, qui occupait effectivement à l’époque du décès à titre d’habitation principale un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, a sur ce logement jusqu’à son décès un droit d’habitation et un droit d’usage sur le mobilier compris dans la succession le garnissant ».
L’art 765-1 Cciv nouveau dispose : « Le conjoint survivant dispose d’1 an à partir du décès pour manifester sa volonté de bénéficier de ses droits d’usage et d’habitation ».
La loi du 3 décembre 2001 reconnaît ici au conjoint survivant, à travers ce droit viager, les droits réels des art 625 et s. Cciv.
Mais, cette loi accuse en la matière la spécificité au travers tant de leur nature (de ces droits réels) que de leur régime.

) Nature des droits d’habitation et d’usage
Ces droits réels ont une nature successorale cette fois-ci qui n’est pas réservataire. Il ne s’agit pas, à la différence du droit temporaire au logement, d’un effet direct du mariage. Leur nature successorale est confirmée par l’art 765 Cciv qui organise l’imputation de leur valeur (égale à 60 % de la valeur de l’usufruit des biens qu’il concerne) sur la valeur des droits successoraux recueillis par le conjoint.




2 choses l’une :
Si, d’une part, la valeur de ces droits d’habitation et d’usage est inférieure à celle de ses droits successoraux, le conjoint survivant peut prendre le complément sur les biens existants.
Si, d’autre part, la valeur de ces mêmes droits est supérieure à celle de ses droits successoraux, le conjoint n’est pas tenu de récompenser la succession à raison de l’excédent. Mais, cette prérogative (le droit de jouissance, d’habitation et d’usage viager), à la différence de la jouissance temporaire, n’est pas d’ordre public. Cela veut donc dire que le défunt peut l’écarter, mais à la seule condition de le faire par un testament authentique (devoir de conseil de notaire pour lui déconseiller de le faire)
Art 764 al 1er Cciv.
Le texte, pour qu’il n’y ait pas d’équivoque, prend soin de préciser que cette décision du défunt est sans incidence sur les droits d’usufruit que le conjoint recueille en vertu soit de la loi, soit d’une libéralité (cf art 764 al 2 Cciv).

) Régime des droits d’habitation et d’usage
Ces droits empruntent pour partie le régime du droit commun (cf cours droit des biens). En particulier, l’interdiction de céder ou louer les lieux  art 631 et 634 Cciv, et l’obligation de supporter la charge des frais d’entretien  art 635 Cciv (ainsi que les frais de contribution).
Toutefois, les garanties prévues à l’art 626 Cciv (caution, inventaire des lieux) ne sont pas ici obligatoires. Mais, le conjoint ou les autres héritiers peuvent exiger qu’il soit dressé un inventaire des meubles et un état de l’immeuble soumis au droit d’habitation et d’usage  art 764 al 4 Cciv.
2 particularités qui résultent d’une part de l’art 764 dernier alinéa Cciv, et d’autre part, de l’art 766 Cciv.
L’art 764 dernier alinéa Cciv dispose que par dérogation aux art 631 et 634 Cciv « Lorsque la situation du conjoint fait que le logement grevé du droit d’habitation n’est plus adapté à ses besoins, le conjoint ou son représentant peut le louer à un usage autre que commercial ou agricole afin de dégager les ressources nécessaires à de nouvelles conditions d’hébergement ». Le conjoint survivant va louer le logement et avec, le loyer, il ira dans un logement plus propice à sa situation.
L’art 766 Cciv dispose : « Le conjoint successible et les héritiers peuvent par convention convertir les droits d’habitation et d’usage en une rente viagère ou en capital. Cette conversion en rente viagère ou en capital des droits d’habitation et d’usage doit être autorisée par le juge des tutelles si on compte parmi les héritiers un incapable mineur ou majeur ».

4) Le renforcement des droits existants

La loi du 3 décembre 2001 a renforcé les droits existants.
Il s’agit, d’une part, du renforcement de l’attribution préférentielle du logement au profit du conjoint survivant, attribution préférentielle qui n’était que facultative jusqu’à la réforme de 2001 et qui devient obligatoire. Cf art 832 Cciv qui a été modifié en ce sens.
D’autre part, il s’agit du renforcement de la cotitularité du bail prévue par l’art 1751 Cciv. Désormais, en cas de décès d’un époux, le conjoint survivant cotitulaire du bail dispose d’un droit exclusif sur celui-ci sauf renonciation expresse.
En outre, lors du décès du locataire, le bail est transféré au conjoint.

Les conditions d’existence du conjoint survivant ne concernent pas seulement le logement, mais aussi ses ressources financières : les droits à pension.




E) Droit à pension

Art 767 Cciv

Les auteurs de la réforme de 2001 avaient un temps proposé d’instaurer au profit du conjoint survivant un droit à la maintenance. Cela aurait voulu dire que les héritiers auraient été contraints de maintenir au conjoint survivant un train de vie identique à celui qui était le sien avant le décès du prémourant. Les parlementaires ont fait observé que les conséquences financières de ce droit à la maintenance (notamment lorsqu’il y a avait un grand train de vie des époux) aurait pu conduire et contraindre les héritiers à renoncer à la succession : cela leur coûterait plus cher de maintenir le conjoint survivant avec le même train de vie que de renoncer à la succession.
C’est la raison pour laquelle le législateur a renoncé à ce projet. La loi de 2001 se contente, reprenant ou presque à l’identique la disposition de l’art 207-1 Cciv, de décider que la succession de l’époux prédécédé doit une pension au conjoint survivant qui est dans le besoin (art 767 nouveau Cciv).
On suppose que le conjoint survivant n’a pas assez de ressources personnelles (c’est là qu’intervient le RM) et qu’il ne reçoit pas assez pour vivre au titre de la dévolution successorale. Alors, il peut demander une pension prélevée sur l’hérédité dans l’année du décès. Ce délai se prolonge en cas d’indivision jusqu’à l’achèvement du partage.
Cette créance a une nature mixte.
D’une part, de son caractère successoral, il résulte qu’elle est due par la succession de l’époux prédécédé et elle est due d’après l’importance de l’actif successoral et non d’après les ressources des héritiers. En d’autres termes, il n’y aura rien si la succession est déficitaire.
D’autre part, il a une nature alimentaire. En effet, cette pension confère au conjoint survivant la qualité de créancier et sera donc payé par préférence aux légataires, sauf le jeu de l’art 927 Cciv.

Que se passe-t-il lorsque le de cujus ne laisse ni conjoint survivant, ni parents au degré successible, et lorsqu’il n’y a pas d’héritiers ou de légataires, la succession revient à l’Etat.

Sous-Section 2 Les droits de l’Etat


Ils sont de 2 ordres : l’Etat est un successeur irrégulier et il faut connaître quelques notions relatives à l’impôt successoral.

1) l’Etat : un successeur irrégulier

Art 768 Cciv : A défaut d’héritier, la succession est acquise à l’Etat.
Réclamée par l’Etat à défaut de parents ou de légataires, la succession est dite en déshérence. On parle en revanche d’une succession vacante lorsqu’elle n’est réclamée par personne pas même par l’Etat. Un curateur, depuis 1940, l’administration des domaines, venant alors la liquider (art 814 Cciv).
Le régime des successions vacantes en déshérence a été modifié et unifié par la loi de 2006.
C’est l’administration des domaines qui exerce au nom de l’Etat son droit à une succession en déshérence. Des précautions sont prises pour le cas où des héritiers apparaîtraient ultérieurement : apposition de scellées, inventaire.
L’administration des Domaines demande ensuite au TGI dans le ressort duquel la succession est ouverte l’envoi en possession de l’Etat. Cette demande est formée par requête (par assignation ni contradiction). Elle est publiée afin que les héritiers, s’il en existe, se manifestent (art 770 Cciv). Tant que l’Etat n’est pas envoyé en possession, il recueille la succession en vertu d’un droit de souveraineté et il n’est pas un héritier subséquent. La conséquence pratique est que l’exhérédation cad le fait d’écarter tous les héritiers dans un testament, sans désigner pour autant un légataire, ne peut priver l’Etat de sa vocation successorale  Civ1 11 mai 1968 (D1968 p 514).
Une fois qu’il est envoyé en possession, il épouse la qualité d’héritier. La loi de 2006 renforce les droits de l’Etat après son envoi en possession. Il est alors pleinement un héritier et il ne s’agit plus d’un droit de souveraineté. La condition est alors hybride suivant l’envoi en possession ou pas.
C’est ainsi que comme les héritiers, comme tous successibles, il peut engager les actions interrogatoires contre les héritiers taisants. L’art 771 Cciv prévoit cette action interrogatoire afin de contraindre les héritiers taisants à opter. Surtout, il faut retenir la disposition de l’art 807 nouveau Cciv. Il résulte de cette disposition qu’un héritier renonçant ne peut désormais plus revenir sur son option après que l’Etat ait été envoyé en possession.
En fait, cette vocation successorale particulière de l’Etat (en raison de sa condition juridique hybride) ne représente pas grand chose par rapport à la manne que représente les droits de succession.

2) L’Etat et l’impôt successoral

À l’occasion d’un héritage, l’Etat réclame son dû. Dans un arrêt ancien du 13 mars 1855 = la Cour de Paris avait considéré que la perception des droits de mutation par décès (impôt successoral) s’exerce moins à titre de privilège que de prélèvement sur les biens de la succession. La Cour de Paris, en d’autres termes, considérait que l’Etat redevenait propriétaire d’une fraction des biens successoraux à la mort d’une personne. En effet et par définition, le prélèvement est exercé par un propriétaire, du moins un copropriétaire. Le privilège, quant à lui, concerne un droit de créance et non pas comme le prélèvement un droit réel.
Fonder l’impôt successoral sur un prélèvement et non sur un privilège impliquait un retour au système féodal, en particulier au prix de l’investiture.
CCass 23 juin 1857 (Siret 1857 I p 401) = elle a condamné le fondement de l’impôt successoral attribué par la Cour d’Appel de Paris en 1855 car ce fondement a été jugé « contraire à la plénitude de l’indépendance du droit de propriété individuelle tel qu’il est défini par l’art 544 Cciv ». La CCass conclut en disant que « le droit de mutation constitue par lui-même non un droit réel sur les biens du redevable mais une obligation purement personnelle de celui-ci ».
C’est par le pied de la déclaration de succession que l’administration exerce son droit de contrôle et perçoit son dû sur l’héritage.

A) La Déclaration de succession

A partir d’elle sont calculés par le notaire et contrôlés par l’administration, les droits de successions.
C’est une étape incontournable de toute succession dès lors que le défunt laisse des biens. Dans les 6 mois du décès, les héritiers et légataires sont tenus de déposer à la Recette des Impôts du dernier domicile du défunt une déclaration remplie sur un imprimé spécial fourni par l’administration, qui constitue une photographie des biens du de cujus et de leur valeur au jour du décès.
Par exception, l’administration fiscale n’exige pas de déclaration de succession lorsque les héritiers sont les enfants ou le conjoint, mais surtout lorsque l’actif brut de la succession (avant déduction des dettes) n’excède pas 50.000 €. Dans tous les autres cas, la déclaration de succession est obligatoire, même si aucun droit de succession n’est dû (en raison des abattements pas ex).

Ce n’est pas à proprement parler un acte notarié même si c’est presque toujours le notaire qui la remplit. Il faut avoir une maîtrise totale des RM pour savoir ce qui revient à la personne notamment en vertu des reprises et récompenses. Ensuite, ce calcul est très technique car il y a des abattements et des biens sont exonérés.
Une fois cette déclaration remplie, elle doit être déposée avec le règlement des droits de succession, sous peine d’intérêts de retard de 0,40% par mois retard (4,80% pour une année).
La valeur des biens successoraux est évaluée au jour du décès. Le mobilier concernant le logement est forfaitairement évalué à 5% de l’ensemble des autres meubles et immeubles avant déduction du passif. Il arrive que le de cujus laisse beaucoup de biens immobiliers et peu de meubles = c’est la raison pour laquelle le CGI permet de se soustraire des 5% à la condition de faire un inventaire notarié (pour échapper à la déclaration de succession).
Il existe aussi au point du vue fiscal une évaluation de la nue-propriété et de l’usufruit.
Cette évaluation est fonction de l’age de l’usufruitier.
Ex : si l’usufruitier a moins de 21 révolu, la valeur de l’usufruit est égale à 90% et la valeur de la nue-propriété à 10%. Au fur et à mesure que l’usufruitier vieilli (avec un age plus avancé), la valeur de l’usufruit va diminuer dans les proportions fixées par le CGI.


F) Les droits de succession

Les droits de succession sont l’exemple type d’un impôt sur le capital. Ce n’est pas un impôt sur les revenus. Cet impôt existait déjà en droit romain. Mais, il faut noter que cet impôt est amoindri, parfois supprimé, dans des Etats modernes qui vont de l’avant (ex : l’île Maurice).
Il est proportionnel et progressif. Il est fonction du lien de parenté ou d’alliance unissant le successeur au défunt.
Pour le moment, on a 3 points :
Entre époux, on a un abattement de 76.000 €. Ensuite, on a des tranches qui sont taxées de 5% jusqu’à 40%.
Entre parents en ligne directe, on a un abattement de 50.000 € et on a des tranches qui sont taxées de 5% à 40%.
Entre frères et sœurs (collatéraux privilégiés), on a un abattement de 5.000 € et on a ensuite 2 tranches : l’une à 35% et l’autre à 45%. Au-delà du 4ème degré et entre étrangers, l’impôt successoral est de 60%.
L’impôt successoral, au-delà de la redistribution des richesses qu’il peut opérer, poursuit comme la plupart des impôts des finalités diversifiées. Par l’octroi d’exonérations, d’abattements et de réductions de droits (lorsque l’héritier a lui-même des enfants) et de certaines facilités de paiement, le législateur met en œuvre une politique économique familiale voire culturelle. C’est la raison pour laquelle les monuments historiques ont une législation particulière. L’impôt successoral peut aussi favoriser certaines formes d’exploitation agricoles, forestières. Par sa réduction, abattement, il peut être encouragé pour faciliter la natalité. C’est par l’impôt successoral que l’on a incité par des exonérations à la restauration du patrimoine culturel de la France.
L’impôt successoral ne concerne pas seulement la succession ordinaire car s’applique à la succession anomale.






Section 2 La succession anomale

Par dérogation au principe général posé par la R2volution française de l’unité de la succession, certains biens et selon à qui ils appartiennent vont être dévolus selon leur origine. C’est ce qu’on appelle le droit de retour légal qui souligne le particularisme de la succession anomale (contraire à la norme) cad que les biens sont dévolus non pas dans un principe d’unité mais en fonction de leur origine.
Ce droit de retour légal qui seul caractérise la succession anomale ne doit pas être confondu avec le droit de retour conventionnel qui n’est que l’application d’une condition résolutoire. Seul le droit de retour légal constitue une succession anomale.

1) Le droit de retour légal (particularisme de la succession anomale)

Il existe actuellement, et depuis la loi de 2006, 3 droits de retour légaux :
Le 1er droit de retour légal est le plus ancien et a été créé par la loi du 11 juillet 1966. Cette loi a aménagé un droit de retour des biens de l’adopté simple au profit des membres de la famille adoptive, d’une part, et de la famille d’origine d’autre part. Attention, il ne concerne que l’adoption simple et non pas l’adoption plénière car l’adoption plénière détruit tout lien de filiation par le sang. Il n’existe alors plus qu’une seule famille : celle de l’adoptant et là la succession est dévolue selon le droit commun. En revanche, l’adoption simple se caractérise par une superposition de 2 familles : celle de l’adoptant et celle par le sang. Si l’adopté meurt sans descendant ni conjoint survivant, les biens donnés par l’adoptant ou recueilli dans sa succession retournent à l’adoptant ou à ses descendants. En revanche, les biens que l’adopté avait reçu de ses pères et mères à titre gratuit retournent pareillement à ces derniers.
Il n’y a pas unité de la succession, mais dualité, les biens étant dévolus en fonction de leur origine.
Le 2ème droit de retour légal a été créé par la loi du 3 décembre 2001. Comme l’écrit un auteur, il n’a pas été significativement modifié par la loi de 2006. Ce droit de retour a été déjà étudié car il s’agit d’un droit de retour reconnu aux frères et sœurs du défunt en présence du conjoint survivant, lorsque le défunt n’a laissé aucune descendance et que ses parents sont prédécédés. Art 757-3 Cciv.
Le 3ème droit de retour légal a été créé par la loi du 23 juin 2006. Cette loi a augmenté le nombre de successions anomales. Il a été créé au profit des pères et mères. Les ascendants privilégiés bénéficient d’un droit de retour légal sur les biens qu’ils avaient donnés au défunt. Ce droit de retour a été institué par le législateur de 2006 car il a supprimé la réserve des ascendants. Ce droit de retour s’exerce à concurrence des quotes-parts fixées à l’art 738 al 1er Cciv, soit ¼ des pères et mères donateurs. La valeur ainsi prélevée s’impute en priorité sur les droits successoraux du donateur. Si le droit de retour ne peut pas s’exercer en nature, il s’exerce alors en valeur dans la limite de l’actif successoral (art 738-2 Cciv).

La succession anomale issue d’un droit de retour légal est gouvernée par la provenance, l’origine du bien. Il s’agit d’une véritable succession à laquelle l’impôt successoral va s’appliquer. Et cela, à la différence du droit de retour conventionnel qui n’est que l’application d’une condition résolutoire.




2) Le droit de retour conventionnel (l’application d’une condition résolutoire)

Il est prévu aux art 951et 952 Cciv. Il s’agit de la clause par laquelle le donateur stipule que les biens donnés par lui reviendront au décès du donataire, si le donataire meurt avant le donateur. Si la condition se réalise cad que le donataire meurt avant le donateur, la donation est résolue rétroactivement cad que le donateur est censé n’avoir jamais perdu la propriété des biens donnés. Cela entraîne 2 conséquences :
D’une part, si les biens ont été aliénés par le donataire sans le consentement du donateur cad sans que ce dernier n’ait expressément renoncé à l’exercice de son droit de retour, ledit donateur pourra les reprendre entre les mains du 1/3 acquéreur, sauf le jeu de l’art 2279 Cciv.
Pareillement, les constitutions de droits réels (hypothèques) consentis par le seul donataire vont être rétroactivement anéanties.
D’autre part, le donateur reprend le bien objet de la donation et qui est l’objet du droit de retour conventionnel, sans être tenu des dettes de la succession. En effet, ce n’est pas une succession mais une condition résolutoire. C’est ici l’application non point d’une succession anomale mais d’une condition résolutoire. La donation est donc rétroactivement anéantie. Il s’agit d’une condition casuelle et non pas potestative (laquelle est interdite) car la condition à savoir le prédécès du donataire ne dépend pas de la volonté du donateur (condition casuelle). Donc, cette condition est valable. de plus, comme il s’agit d’une condition résolutoire, son mécanisme n’est pas une exception à la règle de l’irrévocabilité des donations.
Dans la pratique, le droit de retour conventionnel est presque systématiquement dans ce que l’on appelle les donations-partage (qui ont été élargies dans leur champ d’application par la loi de 2006).
Ce droit de retour fait l’objet des plus grandes attentions de la part des banquiers. Le banquier qui prête de l’argent au donataire va prendre en général une garantie sur ses biens. S’il prend comme garantie le bien objet d’un droit de retour conventionnel, il devra demander au donateur (cas de responsabilité du notaire qui en fait la demande) son consentement pour que l’hypothèque lui soit opposable.
















Sous-Titre 2 La dévolution volontaire

La dévolution légale ou plutôt la désignation des héritiers en résultant ne s’impose pas au dé cujus. Il peut exhéréder cad écarter de sa succession tel ou tel héritier à la condition qu’il ne soit pas réservataire. Il peut de son vivant rompre l’équilibre qui résulte de la dévolution légale.
Naturellement, on s’aperçoit que le pouvoir de modifier la dévolution légale n’est pas sans limites. Il faut savoir tout d’abord que ce pouvoir de modifier la dévolution légale ne peut résulter que d’une donation-partage ou d’un testament, cad d’une libéralité. Les libéralités, parce qu’elles appauvrissent leur auteur, sont soumises à des conditions particulières qui ont été modifiées, pour certaines, par la loi de 2006. Ces conditions particulières tendent à protéger d’une part le disposant lui-même (donateur ou testateur) dont le consentement, sous l’effet de la maladie ou de la séduction, serait vicié. Ensuite, ces conditions particulières viennent protéger l’entourage du disposant cad d’une part, sa famille (conjoint et enfants) contre des libéralités trop importantes faites à des étrangers, et d’autre part, sont protégés les créanciers qui peuvent exercer une action paulienne. Dans un cas particulier, le conjoint est réservataire. Enfin, ces conditions protègent l’ordre public contre des buts illicites.
La grande idée à retenir (partiel) est qu’en matière de libéralité, la loi de 2006 a voulu, contrairement au Cciv de 1804, donner à chacun des disposants plus de libertés que par le passé de manière à organiser sa succession et à adapter le droit aux évolutions sociologiques. En d’autres termes, la loi moderne a accru le pouvoir de modifier la dévolution légale. Parallèlement, la loi de 2006 a en quelque sorte restreint les limites de modifier la dévolution légale.

Chapitre 1 Le pouvoir de modifier la dévolution légale

Ce pouvoir trouve toujours son expression dans une libéralité. La libéralité est aujourd’hui définie par la loi de 2006 dans le Code Civil.
La libéralité est tous actes conventionnel (donation, donation-partage) ou unilatéral (testament) réalisé à titre gratuit.
L’enrichissement du patrimoine du bénéficiaire (donataire ou légataire) par suite d’une appauvrissement de son auteur trace les contours de la libéralité envisagée dans son genre. Mais au sein d’un même genre, il y a plusieurs espèces de libéralités.

Section 1 La libéralité envisagée dans son genre

La libéralité est l’unique source de la dévolution volontaire. Elle s’exprime dans une notion générique qui est soumise à des conditions de validité propres.

Sous-Section 1 La notion de libéralité

On s’interroge sur cette notion car il est essentiel de savoir ce qu’est une libéralité. Seules les libéralités sont soumises à des conditions strictes. Et, par opposition aux actes onéreux, les libéralités peuvent être taxées jusqu’à 60%.
Seules les libéralités, au plan civil, sont soumises aux règles qui protègent la famille comme le rapport et la réduction. Il appartient aux juges du fond, sous le contrôle de la CCass de donner à l’acte sa véritable qualification. Si le doute subsiste, l’acte sera qualifié à titre onéreux car les libéralités constituent dans la vie économique l’exception, et les règles applicables aux libéralités sont des règles d’exception, donc d’interprétation stricte.
La libéralité, par essence, est un acte à titre gratuit. Donc, sont exclus les actes par lesquels une partie reçoit un avantage en contrepartie de l’avantage qu’elle procure à l’autre.
Ces actes (tels la vente) ne sont pas des actes à gratuit, ils sont à titre onéreux. Dans les actes à titre onéreux, il y a réciprocité des avantages, à l’inverse des actes à titre gratuit.
De plus, tous les actes à titre gratuit ne sont pas pour autant des libéralités car il y a des actes à titre gratuit qui n’appauvrissent pas leur auteur. Seuls sont des libéralités les actes de disposition à titre gratuit.
C’est ainsi que ce que l’on appelle des actes de bienfaisance ne sont pas des libéralités. Les actes à titre gratuit sont de actes de disposition. Le disposant testateur ou donateur transfère un droit de son patrimoine à celui du bénéficiaire. Et, il le fait avec une intention libérale, sans contrepartie cad à titre gratuit.
Le transfert d’un droit, d’une part, et l’intention libérale, d’autre part, sont les 2 éléments, le 1er matériel, le 2ème psychologique, de la libéralité.

1) Le transfert d’un droit (acte de disposition)

La libéralité, pour qu’elle soit qualifiée comme telle, nécessite le transfert d’un droit réel, d’un droit de créance ou d’un droit intellectuel. Ce transfert implique d’une part un appauvrissement du disposant, et d’autre part, un enrichissement corrélatif du bénéficiaire.

A) Un appauvrissement du disposant

Des règles spéciales aux libéralités comme le rapport (opération par laquelle l’héritier qui a reçu du donateur ou testateur aujourd’hui de cujus des biens, les reverse dans la masse à partager), la réduction (peut faire l’objet d’une renonciation = action par laquelle un héritier réservataire fait rentrer dans la masse successorale un bien donné ou légué par le de cujus et il le fait rentrer dans la masse successorale dans la seule limite de la reconstitution de la réserve héréditaire) ne se conçoivent que tout autant qu’on est en présence d’un acte qui a appauvri le disposant car ces opérations ont pour but de réintégrer des biens ou droits dans son patrimoine. C’est essentiel car il n’y a libéralité que tout autant qu’un appauvrissement du disposant se réalise. Faute d’appauvrissement, ce qu’on appelle les contrats de services gratuits (cautionnements, prêts sans intérêts, travail gratuit) ne sont pas des libéralités. C’est en ce sens que l’on dit toujours qu’il n’y a pas de donation de services. Le cautionnement n’est pas une donation. Au moment où il est constitué, il n’y a pas transfert de valeur et appauvrissement du disposant. La caution fait seulement disposer le créditeur principal de son crédit. Et même si la caution est appelée à payer le créancier, elle dispose d’un recours contre le débiteur principal, ce qui montre qu’on n’est pas en présence d’une libéralité.
En l’absence d’appauvrissement réel et conséquent, la jp refuse de soumettre en principe (pas toujours) aux règles de la libéralité les présents d’usage comme un pourboire.
Les règles relatives à la révocation et à la réduction des libéralités ne s’appliquent pas aux présents d’usage.

G) Un enrichissement corrélatif

Un lien de causalité doit exister entre l’appauvrissement de l’un et l’enrichissement de l’autre. Ce lien de causalité est lui-même source de difficultés en présence d’une renonciation à un droit.
Si, d’une part, la renonciation à un droit suppose l’accord de son bénéficiaire, il y a libéralité. C’est le cas de la remise de dettes.
En revanche, si la renonciation à un droit est purement abdicative, tel étant le cas de la renonciation à une succession, à un usufruit, le bénéficiaire de la renonciation tient son droit de la loi et non plus de la volonté du disposant. Il n’y a pas dans ce cas libéralité.

2) L’intention libérale

L’intention libérale a fait l’objet d’une thèse de Sophie Lambert. Quels sont ses éléments ?
C’est ce que l’on appelle en latin : l’animus donandi ». Il recoupe de la part du disposant 2 idées :

A) La liberté

La libéralité est comme tout acte juridique l’expression d’une volonté. Plus précisément, le régime des libéralités protège la liberté du disposant. 3 règles en attestent.
La nullité de la libéralité pour erreur sur la personne n’existe pas pour les actes à titre onéreux.
Les incapacités sont fondées sur une présomption de captation.
La révocabilité pour cause d’ingratitude, le disposant n’ayant pas voulu gratifié un donataire ou légataire ingrat.

H) La gratuité

L’intention du disposant ne doit pas comporter de contrepartie. L’intention doit être gratuite. C’est la raison pour laquelle ne sont pas des libéralités les actes accomplis en rémunération de services rendus. De même, ne sont pas des libéralités des actes accomplis en exécution d’une obligation naturelle (cf L2) parce qu’une telle obligation, bien que non sanctionnée par le droit, pèse alors sur le débiteur.
La libéralité avec charges se présente elle-même comme un acte mixte. Elle est en principe une libéralité. Mais, elle cesse de l’être pour le montant de la charge. Comme le montre ladite thèse, la notion de libéralité est une notion complexe et relative. Selon l’intérêt à protéger, un même acte sera ou non qualifié de libéralité.
L’exemple le plus frappant est celui de la constitution par les parents d’une dot à leurs enfants. Cet acte est une libéralité au regard de la réduction et du rapport. En revanche, cet acte devient un acte à titre onéreux à l’égard de l’action paulienne. Cela montre bien la relativité de la notion de libéralité, qui n’exclut pas l’existence de conditions communes à toutes les libéralités.


Sous-Section 2 Les conditions de validité

Elles sont communes à toutes les libéralités. Il y a 4 conditions de validité :
- La volonté et la capacité qui sont des conditions personnelles
- L’objet et la cause qui sont des conditions objectives relatives à l’acte

1) Les conditions personnelles

Ce sont les conditions relatives à la personne du disposant et du bénéficiaire.
Ces conditions personnelles trouvent leur expression dans la volonté et dans la capacité.




A) La volonté

Puisque la donation est un contrat, la rencontre des volontés est nécessaire. L’acceptation du donataire doit être expresse. A défaut, il n ‘y a pas donation.
Le testament est un acte unilatéral. La volonté du légataire (celui qui reçoit le testament) va s’apprécier à la mort du testateur. Si le légataire refuse son legs, le testament deviendra caduc.
La donation ainsi que le testament appauvrissent le disposant. C’est un acte grave. C’est la raison pour laquelle les incapacités sont plus importantes que dans le droit commun.
Pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit. En la matière, la preuve de l’insanité d’esprit est facilitée une fois que le disposant est mort.
2 remarques :
- À la différence des actes à titre onéreux (art 1489-1 Cciv), il n’est pas nécessaire en matière de libéralités que l’acte contienne en lui-même la preuve du trouble mental.
- Le secret médical ne fait pas ici obstacle à la production par les héritiers de certificats médicaux établissant la maladie mentale du disposant.
Des particularités affectent en outre la théorie générale des vices du consentement. On a appris que l’erreur n’est sanctionnée que si elle porte sur la substance de la chose. En matière de libéralités, l’erreur est également sanctionnée si elle porte sur la personne du bénéficiaire. Le dol est également plus largement interprété en matière de libéralités.
C’est ainsi ce que l’on appelle la captation, elle engendre la nullité non seulement lorsqu’elle émane du gratifié mais aussi lorsqu’elle émane d’un tiers.

I) La capacité

Il s’agit d’apprécier d’une part la capacité du disposant et du bénéficiaire qui chacun pris isolément doit être capable de disposer ou de recevoir = ce sont les incapacités respectives du disposant et du bénéficiaire,, et d’autre part, on a des incapacités corrélatives du disposant et du bénéficiaire cad qu’elles tiennent à un rapport particulier tels que par ex le malade et son médecin.
Pour les donations, la capacité des parties est appréciée au moment de la rencontre des volontés. Pour le testament, lorsqu’il s’agit d’incapacité corrélative, il faut se placer à la date de l’élaboration du testament. C’est ainsi que le testament sera quand même nul si le malade, au jour du décès, n’est plus malade. Pour les incapacités qui ne sont pas corrélatives, pour le testament, on doit distinguer le testateur et le légataire. Le testateur doit être capable au moment de la confection du testament. Ce qui veut dire que le testament est vicié et nul si le testateur a testé en période d’incapacité bien qu’il soit mort en période de capacité. Lorsqu’un mineur teste entre l’âge de 16 et 18 ans, son testament ne vaut que pour la moitié de la quotité disponible. Cela est vrai même si, au décès, l’enfant est devenu majeur. La capacité du testateur est une condition toujours nécessaire. Le testament est nul s’il y a incapacité du testateur. Pour le légataire, on fait la distinction entre la capacité de jouissance et la capacité d’exercice. La capacité de jouissance est la capacité à être titulaire d’un droit. Dans notre matière, c’est d’être titulaire du legs. La capacité s’apprécie au moment du décès du testateur. La capacité d’exercice est la capacité à exercer tout seul le droit (à défaut on doit recourir à un assistant ou un représentant). Le droit dont le légataire devient propriétaire par le legs s’apprécie non pas lors du décès du testateur, mais au moment où le légataire accepte le legs.
Le moment d’appréciation de la capacité obéit à des règles plus complexes pour les incapacités respectivement propres au disposant et au bénéficiaire, que pour les incapacités qui leur sont corrélatives.



1) Les incapacités respectives du disposant et du bénéficiaire

a) Les incapacités du disposant

Concernant les incapacités de jouissance (interdiction de disposer à titre gratuit)
Les incapacités à titre pénal ont été supprimées par le nouveau Code pénal de 1994. Les incapacités de jouissance pour le disposant sont aujourd’hui essentiellement des incapacités protectrices. On retrouve l’idée selon laquelle il s’agit de protéger le disposant encore fragile contre un appauvrissement irréfléchi. C’est la raison pour laquelle nous avons des règles dérogatoires au droit commun concernant le mineur et le majeur.

Pour le mineur, s’il est émancipé, il a une pleine capacité de jouissance. Il est pleinement capable de disposer à titre gratuit.
S’il n’est pas émancipé, une nouvelle distinction s’impose : la donation et le testament.
 La donation = le mineur non émancipé ne peut faire aucune donation. Pas plus d’ailleurs que son administrateur légal ou son tuteur. C’est une véritable incapacité de jouissance, à disposer du droit, alors que dans le droit commun, le mineur est simplement frappé d’une incapacité d’exercice (il est incapable de mettre en œuvre le droit). on a une exception pour le mineur non émancipé qui se marie. Avec les mêmes autorisations que pour son mariage (avec l’autorisation des mêmes personnes qui autorisent son mariage), il peut consentir par contrat de mariage à son futur conjoint les mêmes donations que s’il était majeur (art 1095 et 1398 Cciv).
 Le testament =jusqu’à l’âge de 16 ans, le mineur est frappé d’une incapacité totale de tester (incapacité de jouissance). Entre l’âge de 16 et de 18 ans, certes il peut tester mais il ne peut léguer que la moitié de la quotité disponible (art 904 Cciv).

Pour le majeur, s’il est en tutelle, il y a un principe et des dérogations. Le principe est que la libéralité, quelle qu’elle soit, est nulle même si elle a été consentie dans un intervalle lucide. La tutelle établit une présomption irréfragable d’aliénation mentale continue (art 504 Cciv).
Les dérogations sont prévues par l’art 505 Cciv : après avis médical, le juge peut restituer une capacité partielle au majeur en tutelle. Surtout, la loi de 2006 a procédé à une extension du pouvoir de disposer à titre gratuit du majeur protégé. 2 aménagements notables :
- Depuis le 1er janvier 2007, le 1er aménagement concerne les testaments. La nullité de droit du testament fait par le majeur après l’ouverture de la tutelle souffre désormais d’une exception : lorsque le Conseil de famille a préalablement autorisé le majeur en tutelle à tester avec l’assistance de son tuteur.
- Le 2ème aménagement concerne les donations. A la liste des personnes pouvant bénéficier de donations faites au noms du majeur en tutelle comprenant les descendants et le conjoint sont ajoutés ses frères et sœurs ou leurs descendants (art 505 Cciv).

Quant est-il lorsque le majeur est en curatelle ? Dans ce cas, il peut tester librement (art 513 Cciv). Mais, pour les donations, il est frappé d’une incapacité d’exercice.

Concernant les incapacités d’exercice :
Il n’y a pas d’incapacité d’exercice pour le testament. Le testateur est soit frappé d’une incapacité de jouissance (mineur de 16 ans), soit il est dans une situation de capacité. Les incapacités d’exercice sont, pour la donation, plus nombreuses. Il y a incapacité d’exercice pour le majeur en curatelle car il faut l’assistance du curateur et de même pour le majeur en tutelle.



b) Les incapacités du bénéficiaire

Il faut distinguer le bénéficiaire personne physique et le bénéficiaire personne morale.

Le bénéficiaire personne physique :
2 remarques :
- Même s’il est assisté ou représenté, le bénéficiaire ne peut recevoir une libéralité (incapacité de jouissance = de recevoir à titre gratuit) s’il n’est pas encore conçu au jour de la donation pour une donation, ou jour du décès du testateur pour un testament. Par ailleurs, le bénéficiaire est incapable de recevoir à titre gratuit s’il n’est pas né vivant et viable (pour apprécier le jour où le bénéficiaire est conçu et en application de l’art 906 Cciv, il y a lieu d’appliquer l’adage « infans conceptus pro nato habetur »).
- L’assistance ou la représentation du gratifié est nécessaire lorsqu’il est placé sous un régime de protection. C’est ainsi que pour le mineur non émancipé, la libéralité doit être acceptée par son administrateur légal. Le majeur en curatelle bénéficiaire doit être assisté par son curateur. Le majeur en tutelle est représenté par son tuteur, qui devra avoir l’autorisation du Conseil de famille en cas de libéralité avec charge.

Le bénéficiaire personne morale :
On distingue les personnes morales de droit public et de droit privé.
D’une part, les personnes morales de droit public (commune, Etat…) ont toujours la capacité de jouissance pour recevoir une libéralité. Parfois, l’acceptation est subordonnée à une autorisation administrative (du préfet pour le département, conseil municipal pour une commune). C’est seulement ici une incapacité d’exercice.
D’autre part, pour les personnes morales de droit privé, la situation est plus complexe. Le régime le plus défavorable est celui des associations (art 910 et 937 Cciv). Seules les associations reconnues d’utilité publique sont aptes à recevoir une libéralité et qui plus est avec autorisation. En revanche, les syndicats professionnels, les sociétés civiles et commerciales ainsi que les GIE ont tous la pleine capacité de jouissance et d’exercice.

5) Les incapacités corrélatives du disposant et du bénéficiaire

Pourquoi incapacité corrélative ?
Ces incapacités n’existent que dans le rapport entre 2 personnes déterminées.
On craint en effet une influence abusive et il s’agit de l’influence abusive que le bénéficiaire de la libéralité pourrait avoir sur le disposant. C’est le cas du tuteur : il ne peut rien recevoir à titre gratuit de son pupille majeur ou mineur tant que le compte des tutelles n’a pas été apuré (art 907 Cciv). C’est le cas aussi des médecins, pharmaciens, ministres du culte qui ont soigné, aidé ou assisté une personne atteinte d’une maladie dont elle est morte (art 909 Cciv). Les officiers de marine sont incapables d’être gratifié par leurs passagers dans un testament qui serait fait à bord du navire lors d’un voyage maritime.

2) Les conditions relatives à l’acte

A l’inverse des actes à titre onéreux qui peuvent avoir pour objet une chose future, la donation ou le legs d’un bien à venir est en principe nul (art 943 Cciv). Mais, il y a une exception avec l’institution contractuelle cad une donation de biens à venir entre époux qui n’est autorisée que par contrat de mariage ou pendant le mariage.


La libéralité doit aussi avoir une cause. La cause doit être licite. Mais, pour apprécier la licéité de la cause, il convient de distinguer d’une part les libéralités pures et simples, et d’autre part, les libéralités sous conditions ou avec charge.

A) Les libéralités pures et simples

La libéralité doit être causée. L’existence de la cause est ici l’intention libérale. L’intention libérale est ce que l’on appelle en latin « l’animus donandi » cad l’intention de donner. L’intention de donner ne doit pas avoir une cause illicite. La question s’était posée si les libéralités faites entre concubins ou entre un homme marié et sa maîtresse sont valables ?
Jadis, on distinguait selon que la libéralité avait pour cause la reconnaissance d’un devoir passé ou selon que la libéralité tendait à rémunérer ou à poursuivre les relations adultères. Dans le 1er cas, la libéralité était valable. Dans le 2nd cas, elle était nulle.
Mais, depuis un arrêt de principe de la CCass du 3 février 1999 (JCP 1999 II 10083), la distinction énoncée est abolie. C’est ainsi que la CCass dans son attendu de principe nous dit : « N’est pas contraire aux bonnes mœurs la cause de la libéralité dont l’auteur entend maintenir la relation adultère qu’il entretient avec le bénéficiaire. En conséquence, doit être cassé pour violation des art 1131 et 1133 Cciv l’arrêt d’appel qui prononce la nullité d’une libéralité consentie par un homme marié à sa maîtresse ». L’arrêt de la CA avait annulé la libéralité en retenant que la disposition testamentaire n’avait été prise que pour poursuivre et maintenir une liaison encore très récente (et avait fait application de la distinction traditionnelle). Donc, les libéralités entre concubins ne connaissent plus de limitations.

J) La libéralité sous condition ou avec charge

Il faut distinguer la condition et la charge, bien que dans certains cas, cela se recoupe.
La condition est un événement futur et incertain dont dépend l’obligation, et auquel est suspendue la réalisation ou la résolution de la libéralité.
Ex : on donne sa maison si la foudre tombe sur la maison du bénéficiaire.
La condition est nulle si elle dépend de la seule volonté du disposant. Ce qui est nul c’est de dire qu’on donne la maison que si on veut (potestatif). Elle est valable dans tous les autres cas, et notamment dans le cas où elle ne dépend que partiellement du disposant.
Ex : on donne la maison que si je gagne au Loto. Condition partiellement potestative mais pas totalement. Donc, elle est valable.
La condition est en principe distincte de la cause. En effet, la cause répond à la question : Pourquoi la libéralité ?
La condition, en revanche, est une modalité de la libéralité. Mais, la condition dépendant de la volonté non plus du disposant mais du gratifié (ex : je donne ma maison si le bénéficiaire se marie) tend à se confondre avec la cause. Pourquoi ? Parce qu’elle exprime le mobile déterminant. Il en est spécialement ainsi pour les charges incombant au gratifié.

La libéralité avec charge : la charge est beaucoup plus qu’un événement car c’est carrément une obligation que le disposant exprime au gratifié, gratifié qui en acceptant la libéralité s’engage à exécuter la charge.
La charge est parfois stipulée dans l’intérêt du gratifié.
Ex : je donne 1.000 € par mois si le bénéficiaire poursuit ses études.
La charge peut être stipulée dans l’intérêt du disposant.
Ex : je donne ma maison si le bénéficiaire me nourrit.


Lorsque la charge est stipulée dans l’intérêt du disposant, l’acte a alors un caractère mixte. En effet, l’acte est à titre onéreux à concurrence de la charge (la nourriture) et pour le surplus (si la valeur de la maison est supérieure à la charge), c’est une libéralité.
Enfin, la charge peut être stipulée dans l’intérêt d’un tiers.
Ex : je donne tel bien à charge de le transmettre à l’enfant du bénéficiaire qui doit naître.

Lorsqu’on étudiera ce que l’on appelle depuis 2006 les libéralités graduelles et résiduelles, on s’apercevra qu’il s’agit de libéralités avec charge.
Qu’il s’agisse d’une charge ou d’une condition, il ne faut pas que la charge ou condition soit contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs.
2 questions se posent :

1) L’appréciation de la licéité des charges et conditions

Les Cours et tribunaux se penchent sur la cause impulsive et déterminante de la charge ou condition. Notamment, on a eu un cas qui a donné lieu à beaucoup de jp. En effet, il est arrivé que le de cujus, de son vivant, fasse une libéralité ou donne un bien à son conjoint, à charge pour lui de ne pas se remarier.
Question : la libéralité est-elle valable ?
Pour la jp, la libéralité n’est valable que si elle est inspirée par des motifs respectables qui ne doit pas être la jalousie posthume mais qui doit être l’intérêt de la famille ou des enfants. Il est fréquent qu’une libéralité comporte une clause interdisant au bénéficiaire d’aliéner les biens à lui donnés ou légués.
La Civ1 20 novembre 1985 (Defresnois 1986 p 472) a jugé licite la clause interdisant au donataire d’aliéner le bien donné pendant la vie du donateur afin de garantir l’exercice d’un droit de retour conventionnel.
Selon la jp, les clauses d’inaliénabilité qui sont certes contraires à la libre-circulation des biens, sont néanmoins licites lorsqu’elles sont limitées dans le temps et lorsqu’elles sont justifiées par un intérêt sérieux.
La loi du 3 juillet 1971 (grande loi) a consacré cette jp dans un nouvel art 900-1 Cciv. Toutefois, lorsqu’elles sont licites, ces clauses n’ont plus un effet absolu. En effet, il résulte de la loi de 1971 que le donataire ou légataire peut être judiciairement autorisé à disposer du bien si « l’intérêt qui avait justifié la clause a disparu ou s’il advient qu’un intérêt plus important l’exige ».
La loi du 4 juillet 1984 a généralisé cette possibilité dans le nouvel art 900-2 Cciv au profit de toutes libéralités, conditionnelles ou avec charge. C’est ainsi que cette loi dispose « Tout gratifié peut demander que soit révisé en justice les conditions et les charges grevant les donations ou les legs qu’il a reçu lorsque, par suite d’un changement de circonstances, l’exécution en est devenue pour lui soit extrêmement difficile, soit sérieusement dommageable ».
Voir sur ce point arrêt CE 19 février 1990 Commune d’Aiguilles (JCP 1990 II 21535).
La mise en œuvre de cette faculté qui est prévue par la loi de 1984, plus précisément par l’art 900-2 Cciv, est organisée par les art 900-3 à 900-7 Cciv.
Le juge, non seulement doit apprécier la licéité de la charge, mais doit aussi sanctionner les conditions et charges illicites.

6) La sanction de l’illicéité des charges et conditions

C’est une question classique qui n’a pas évolué. Il est classique de souligner la contradiction entre 2 textes.
 Art 900 Cciv = cet article déclare simplement non écrite la condition ou la charge non écrite. Donc, le bénéficiaire profite de la libéralité comme si elle était pure et simple. Autrement dit, il est simplement dispensé de remplir la condition ou charge illicite. Pourquoi un tel texte ? Il a été posé en 1804 et a été motivé par des considérations politiques. À l’époque, il s’agissait avant tout de lutter contre les conditions ou charges tendant à restaurer l’Ancien régime. Alors, le meilleur moyen pour lutter contre ces clauses était de permettre au bénéficiaire de la libéralité de dénoncer la charge ou clause illicite sans perdre pour autant le bénéfice de la donation ou legs.
 Art 1172 Cciv = cet article est propre aux actes à titre onéreux. On s’aperçoit qu’il annule l’acte à titre onéreux en son entier dès lors qu’il contient une condition ou charge illicite.
Les tribunaux ont eu à résoudre la contradiction des 2 textes. Ils l’ont fait à partir de la 1ère moitié du 19ème siècle. Les cours et tribunaux ont dépassé la contradiction des 2 textes en utilisant la théorie de la cause. D’autant que la justification politique de l’art 900 Cciv avait perdu son actualité. Pour résumer cette jp, peu importe depuis ces arrêts qui datent de 1850, aujourd’hui que l’acte soit à titre gratuit ou onéreux. De 2 choses l’une, si la condition ou la charge illicite est le motif déterminant de l’acte à titre onéreux ou gratuit, cet acte sera annulé en son entier. En revanche, si la charge ou condition illicite n’est pas le motif déterminant de l’acte, ledit acte reste valable car seule ladite charge ou condition étant réputée non écrite.

Les conditions et charges apparaissent dans les différentes espèces de libéralités.

Section 2 La libéralité envisagée dans ses espèces

Le désir de gratifier autrui n’est pas sans danger, spécialement pour la famille du disposant. C’est la raison pour laquelle le Code civil ne permet de concrétise ce désir qu’à travers le testament, acte unilatéral, ou une donation, contrat à titre gratuit, qui forment les libéralités ordinaires. Mais, il existe aussi des libéralités particulières qui parfois ne représentent plus les dangers habituels des actes à titre gratuit. C’est notamment le cas lorsque la libéralité facilite la fondation d’une nouvelle cellule familiale ou qu’elle réalise du vivant du donateur le partage de ses biens avec ses présomptifs héritiers = libéralités particulières.
Sous-Section 1 Les libéralités ordinaires

L’art 893 Cciv dispose : « On ne pourra disposer de ses biens à titre gratuit que par donation entre vifs ou par testament dans les formes ci-après établies ».

1) Le testament

L’art 895 Cciv le définit en ces termes : « Le testament est un acte par lequel le testateur dispose pour le temps où il n’existera plus de tout ou partie de ses biens, acte qu’il peut révoquer ».
Tout d’abord, le testament, à l’inverse de la donation, est un acte unilatéral. L’acceptation du légataire n’intervient qu’après le décès. En d’autres termes, l’acceptation du légataire n’est pas nécessaire à la validité du testament. D’ailleurs, si le légataire refuse le legs, on dira que le testament devient caduc et non pas nul.
Ensuite, le testament est un acte personnel. A l’inverse de la donation, il n’admet aucune représentation.
En outre, le testament est un acte à cause de mort à l’inverse de la donation entre vifs.
Enfin, le testament est un acte révocable jusqu’à la mort du testateur à l’inverse de la donation. Pourquoi est-il révocable ? Le législateur juge inopportun que la personne prenne avant la fin de sa vie des dispositions définitives sur le sort de ses biens à sa mort. C’est la raison pour laquelle il peut être révoqué jusqu’à la mort du testateur.
Ces caractères nous invitent à étudier l’acte sous l’angle de son établissement et de son sort.

A) L’établissement du testament

1) La forme du testament

Nous verrons par la suite qu’il existe des exceptions au formalisme de la donation entre vifs (ex : le don manuel qui est une donation qui ne nécessite pas d’écrit). En revanche, pour le testament, il n’y a pas d’exceptions cad qu’il nécessite toujours un écrit, même lorsqu’il n’est pas rédigé en la forme authentique. En ce sens et puisque l’écrit est une condition de validité, nous dirons que c’est toujours un acte solennel cad que l’écrit n’est pas seulement exigé pour la preuve du testament. L’écrit est une condition de validité du testament (qu’en est-il du legs verbal ? Il est en principe nul puisqu’il n’y a pas d’écrit. Mais, néanmoins, la jp considère qu’il emporte à la charge de l’héritier une obligation naturelle que ce dernier peut transformer s’il le veut en obligation civile en exécutant ledit legs ou en s’engageant à le faire  Civ1 27 décembre 1963, JCP 64 IV p 19).
Plusieurs personnes ne peuvent pas tester dans un seul et même acte. L’art 968 Cciv prohibe les testaments conjonctifs. Mais, une même personne peut faire son testament en plusieurs fois. C’est ainsi que l’on appelle en droit le codicille le 2nd testament qui ajoute quelque chose au 1er.
Le Code civil offre au choix du testateur 4 formes de testaments :
- La 1ère est tombée en désuétude et n’est pas pratiquement jamais utilisé = le testament mystique où le testateur présente à un notaire devant 2 témoins le testament par lui signé, clos et scellé. Le notaire dresse sur l’enveloppe du testament ce que l’on appelle un acte de suscription. Cet acte constate la présentation du testament et la déclaration du testateur que le contenu du pli est son testament. Seuls sont utilisés en pratique les 3 autres formes de testament.
- Le testament olographe
- Le testament authentique
- Le testament international depuis la Convention de Washington du 26 octobre 1973, laquelle a été ratifiée par la France le 1er décembre 1994 : l’intérêt de ce testament provient de ses conditions de forme qui ont été assouplies. Certes, ce testament doit être fait par écrit, mais pas obligatoirement de la main du testateur. Surtout, ce testament peut être rédigé dans n’importe quelle langue. Il doit être signé par le testateur en présence de 2 témoins sans condition de nationalité.

a) Le testament olographe

Le mot vient du grec « olos » = seul ; « graphei »= écriture.
Art 970 Cciv : le testament olographe ne sera point valable s’il n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testateur. Le texte ajoute qu’il n’est assujetti à aucune autre forme.
Il doit obligatoirement être écrit de la main du testateur. Tout autre procédé d’écriture tel que la dactylographie entraîne sa nullité. Pourquoi ? On dit que cela implique sa spontanéité.
La date est très importante pour apprécier la capacité du testateur (cf. s’il a plus ou moins de 16 ans). Elle doit comprendre le quantième (le jour), le mois et le millésime. Il faut savoir qu’il existe une jp abondante qui a tendu du moins jusqu’en 1983 a assouplir le formalisme légal.
 Civ1 9 mars 1983 (D 1984 p 641) à comparer avec
 Civ1 8 mars 1988 (D 1989 p 110).
Lire la chronique de Grimaldi D1984 Chronique n°253.
Chronique de Fédal JCP 1989 I n°3423
Le testament qui n’est pas signé est nul.

Afin de contrôler sa perte et sa régularité, Il est conseiller d’écrire ou de faire contrôler son testament par un notaire. Il est d’ailleurs conseiller de le déposer chez le notaire qui va l’enregistrer au Fichier Central Des Dernières Volontés (situé à Venelles).
Le testament olographe, bien que situé chez le notaire, reste un acte sous seing privé. Selon le droit commun des actes juridiques, c’est à celui qui se prévaut d’un acte sous seing privé qu’il incombe de prouver que telle signature incombe à celui auquel il l’attribue. En pratique, ce sera au légataire à prouver que l’écriture et la signature du testament sont bien celles du défunt.
La jp déroge à cette règle lorsque le testament institue un légataire universel ayant la saisine (art 1008 Cciv). Alors, c’est aux héritiers qu’incombe la charge de la preuve.
Le testament par acte public (authentique) a la force probante quant à lui, des actes attachés aux actes authentiques.

d) Le testament par acte public (authentique)

Il est reçu soit par 2 notaires, soit par 1 notaire en présence de 2 témoins. La loi de 2006 a supprimé la condition de nationalité française en ce qui concerne les 2 témoins. Désormais, il suffit que les témoins comprennent la langue française et qu’ils soient majeurs, ainsi que la jouissance de leurs droits civils.
Il est dicté par le testateur et il est écrit par le notaire ou un de ses clercs. Il peut être dactylographié. Il est ensuite lu au testateur. Enfin, il est signé par tous cad par le testateur, le notaire, les 2 témoins. L’avantage de ce testament est sa force probante. L’inconvénient est qu’il n’est pas secret.
On appelle testament privilégié le testament qui est soumis à des formes particulières, expressément visées par le Code dans des situations où il n’est pas possible de s’assurer de la présence d’un notaire. Principaux testaments privilégiés : les formes de ce testament ont été modernisées par la loi de 2006. Ils ont fait l’objet d’un toilettage. Cette mesure concerne les testaments des militaires et marins d’Etat (art 981 Cciv), des testaments faits dans un lieu où toute communication est impossible en raison d’une maladie contagieuse (art 985 Cciv), enfin, les testaments faits dans une île d’un territoire métropolitain ou d’une TOM où il n’existe pas d’office notarial (art 986 Cciv). Un décret du 7 février 1991 (JCP 1991 III 64564) régit les attributions notariales des agents diplomatiques et consulaires. C’est le consul de France qui a les prérogatives d’un notaire en matière de testament à l’étranger.

7) Le contenu du testament

Le testament peut recueillir des dispositions fort diverses (cf. celui de l’Abbé Pierre qui contient notamment la disposition sur ses funérailles). Il peut contenir des dispositions extrapatrimoniales, à la condition qu’il soit rédigé par acte authentique. Le testament peut prévoir la reconnaissance d’un enfant naturel.
Une question se pose : en matière de filiation, la reconnaissance d’un enfant est irrévocable. Mais, il existe une exception lorsque l’enfant est reconnu par acte authentique. Le propre du testament est de pouvoir toujours être révoqué jusqu’à la mort du testateur. Celui qui teste par acte authentique et qui reconnaît une filiation naturelle, le testament est toujours révocable
En général, les dispositions sont d’ordre patrimonial comme la reconnaissance d’une dette. On trouve souvent l’identité des légataires. Il dispose de ses biens pour le temps où il n’existera plus. Plus rarement, le testateur désigne une personne pour surveiller la bonne exécution du testateur : l’exécuteur testamentaire qui a fait l’objet d’une réforme par la loi de 2006.



a) La dévolution testamentaire

Le testateur peut modifier la dévolution légale de 2 manières opposées mais qui reviennent au même : il peut le faire par exhérédation (cad exclusion) ou par attribution (cad donnant lieu à un legs).
Ces 2 manières reviennent au même.
Ex : Sabine a 3 sœurs. Le résultat est le même qu’elle exhérède les 2 premières ou qu’elle institue légataire universelle la dernière.
Exclure c’est disposer.

) L’exhérédation
Cela signifie que le testateur exclut de sa succession une personne qui serait normalement appelée par la loin dans la mesure du moins où il ne s’agit pas d’un héritier réservataire (il peut seulement être privé de la quotité disponible, à moins qu’il y ait eu une renonciation anticipée à la réserve). En l’absence de réserve, l’exhérédation peut être totale. S’il n’y a pas d’héritier réservataire, on aboutit à la vacance de la succession.
Civ1 11 mars 1968 (D1968 p 541).
Dans la pratique, l’exclusion ne procède pas d’une exhérédation mais plutôt de l’institution d’un légataire universel. Ce dernier est appelé à tout recueillir et il y a exclusion de tous les héritiers non réservataires.


) Le legs
L’art 1003 Cciv distingue 3 catégories de legs.
Le legs universel et legs à titre universel emportent la transmission d’une universalité tant active que passive. Enfin, le legs particulier.
Concernant le legs universel, il confère au légataire la vocation à recevoir tout le patrimoine du défunt. C’est la vocation à la totalité qui caractérise ce legs et ce n’est pas le fait que le légataire recueillera toujours le tout. Fréquemment d’ailleurs, il y a institution par le testateur d’un légataire universel alors qu’il y a un héritier réservataire. Mais, il prendra tout sauf la réserve. Mais, le legs universel ne s’appliquera qu’à la quotité disponible.
Il faut comprendre que le légataire universel peut ne recueillir aucun bien de la succession. Tels est le cas lorsque le testateur institue un légataire universel et qu’il lègue à titre particulier chacun des biens de son patrimoine. La condition du légataire universel est proche de celle d’un héritier ab intestat cad qu’en principe, il est tenu au passif, il a la possibilité de n’accepter la succession qu’à concurrence de l’actif et en principe, il dispose du mécanisme de la saisine. Il n’a pas à demander la délivrance de son legs, dans la mesure du moins où il n’y a pas d’héritier réservataire.
Concernant le legs à titre universel, c’est un legs qui donne droit à une fraction de l’universalité. L’art 1010 Cciv précise qu’il donne droit à une quote-part de tous les biens d’une même nature. Il donne droit à une quote-part de tous les meubles, ou immeubles, ou une fraction de tous les meubles ou immeubles. La différence avec le légataire universel est que le légataire à titre universel n’a jamais vocation au tout. C’est ainsi qu’en présence de 2 légataires universels, par l’effet de la renonciation de l’un, l’autre recueillera le tout en vertu de sa vocation universelle. En revanche, c’est différent s’il y a institution de 2 légataires à titre universel. Le légataire à titre universel est tenu des dettes et des charges de la succession du testateur que pour sa part et portion (cad à concurrence de ce qu’il reçoit)  art 1012 Cciv.
Concernant le légataire à titre particulier, l’art 1010 Cciv le présente comme une catégorie résiduelle. C’est ainsi que ce texte déclare particulier tout legs qui n’est ni universel ni à titre universel. Ce qui caractérise le legs particulier, c’est qu’il ne donne jamais droit à une universalité.

Il donne droit à un bien particulier et déterminé. Pour léguer un bien déterminé, le testateur doit en être propriétaire. Quid s’il lègue la chose d’autrui ? Art 1021 Cciv : le legs est en principe nul. Mais, la nullité ne frappe pas les choses de genre (legs d’une somme d’argent). Par ailleurs, le testateur pourrait imposer aux héritiers d’acquérir un bien déterminé et d’en transmettre la propriété à un tiers. Dans ce cas, il n’y a pas legs de la chose d’autrui. Il y a simplement une charge imposée à l’héritier. Cette charge est valable comme telle, sauf si elle venait amputer la réserve (Civ1 9 novembre 1959 ; JCP 1960 II 11584).

Lorsque le legs porte sur une chose indivise, il faut alors distinguer 2 cas :
- Le 1er cas est celui où le legs concerne la fraction d’un bien indivis appartenant au testateur. Ce legs est valable car le testateur ne fait que léguer son droit de copropriété sur la chose indivise.
- Le 2ème cas est celui où le legs porte sur un bien déterminé compris dans une masse indivise cad dans une masse en indivision entre le testateur et d’autres personnes. Il faut, dans ce cas, alors attendre le résultat du partage. Le legs sera valable si le bien est mis au lot du testateur et sera nul dans le cas inverse.
Rappel : une exception est apportée à cette règle pour le legs par un époux d’un bien de communauté (art 1423 Cciv).

La crainte que les héritiers ou légataires universels ou à titre universel n’exécutent pas les legs particuliers peut conduire le testateur à désigner un exécuteur testamentaire.

e) L’exécution testamentaire

L’exécuteur testamentaire est désigné dans un acte sous forme de testament pour veiller à l’exécution des dernières volontés du testateur. Sans bouleverser la philosophie de l’exécution testamentaire, la loi de 2006 propose une nouvelle rédaction des textes légaux sur l’exécution testamentaire qui viennent étendre le champ et la durée des pouvoirs reconnus à l’exécuteur testamentaire. Ce faisant, le législateur de 2006 a veillé à distingué clairement le nouveau statut de l’exécuteur testamentaire de celui d’un mandataire successoral dont les pouvoirs sont plus encadrés. En réalité, l’exécuteur testamentaire est une sorte de mandataire, mais qui s’écarte du droit commun du mandat. Aux termes de la nouvelle définition donnée par l’art 1025 Cciv, la mission de l’exécuteur testamentaire est précisée par rapport aux textes actuels. En effet, l’art 1025 nouveau Cciv dispose : « Le testateur peut nommer un ou plusieurs exécuteurs testamentaires jouissant de la pleine capacité civile pour veiller ou procéder à l’exécution de ses volontés ».
L’exécuteur testamentaire qui a accepté sa mission est tenu de l’accomplir. Il est tenu de rendre compte de sa mission dans les 6 mois suivant la fin de ladite mission.
Convergence avec le mandat : il assume la responsabilité d’un mandataire à titre gratuit.
La mission de l’exécuteur testamentaire est en principe gratuite. Néanmoins, il est coutume de lui remettre un bien, ce qu’on appelle « un diamant ».
Les frais supportés par l’exécuteur testamentaire dans l’exercice de sa mission sont à la charge de la succession (art 1034 Cciv).
L’exécuteur testamentaire peut prendre des mesures conservatoires utiles à la bonne exécution du testament. C’est ainsi qu’il peut faire procéder dans les formes de l’art 789 Cciv à l’inventaire de la succession en présence ou non d’héritiers après les avoir dûment appelés (art 1029 Cciv). Ce dernier texte dispose que « L’exécuteur testamentaire peut provoquer la vente du mobilier à défaut de liquidités suffisantes pour acquitter les dettes urgentes de la succession ».



Le testateur peut accroître s’il le souhaite les pouvoirs de l’exécuteur testamentaire. C’est ainsi qu’en l’absence d’héritiers réservataires acceptants (et seulement dans ce cas), le testateur peut habiliter l’exécuteur testamentaire à disposer en tout ou partie des immeubles de la succession, à recevoir et placer les capitaux et à payer les dettes et charges de la succession. Dans le silence du testament et si le testateur ne lui a pas conféré la saisine, son rôle est très mince puisqu’il ne manie pas les deniers. Sa mission sera de surveiller l’exécution du testament en exerçant au besoin une action en justice. Si la validité du testament est contestée (par ex les héritiers), c’est l’exécuteur testamentaire qui justifie en justice la validité du testament.
Ne pas confondre nullité, caducité et révocabilité du testament.

K) Le sort du testament

Le testament n’est exécuté qu’à la mort du testateur.
D’où 2 hypothèses :
Le cas où le testament ne vient pas à effet
Le cas où le testament vient à l’effet

1) Le testament ne venant pas à effet

Le testateur peut révoquer son testament jusqu’à sa mort (art 895 Cciv). La révocation peut être expresse.
Ex : rédaction d’un nouveau testament disant que les anciennes dispositions sont révoquées ;
Mais, elle peut être tacite. C’est ainsi qu’il y a révocation d’un legs particulier si le testateur aliène un bien faisant l’objet d’un legs particulier.
Indépendamment de la volonté du testateur, ses dernières volontés peuvent ne pas venir à effet par suite d’une nullité (pour inobservation d’une condition de forme par ex) ou par suite d’une destruction du testament (en pratique, il est toujours conseillé au notaire de ne jamais se dépouiller du testament. Lorsqu’il règle la succession, il doit donner connaissance à tous les héritiers des dernières volontés du défunt. Il ne doit pas s’en dépouiller car on a vu un cas où un héritier se mettre à manger l’héritier = donc toujours le garder dans sa main).
Il peut aussi être l’objet d’une révocation judiciaire.
Ex : pour cause d’ingratitude ou pour inexécution des charges.
Enfin, le testament est l’objet d’une caducité si le légataire meurt avant le testateur (art 1039 Cciv).

8) Le testament venant à effet

a) Naissance des droits des légataires

Le droit du légataire s’ouvre à la mort du testateur. Cette naissance a lieu par transmission pour le légataire universel ou à titre universel, d’une part, par acquisition pour le légataire particulier, d’autre part.

) La transmission
Le décès opère transmission du patrimoine ou d’une fraction de son patrimoine au profit des légataires universels ou à titre universels. Donc, le légataire, comme l’héritier prolonge la personne du défunt. Il s’agit dans les 2 cas d’une succession à l’actif et au passif, à concurrence de ce que doit recueillir le légataire. C’est ainsi que lorsqu’il est en concours avec les héritiers réservataires, le légataire universel ne paie les dettes du défunt que dans la proportion de ce qu’il reçoit.

) L’acquisition
Le légataire va être dans une situation analogue à celle d’un acquéreur. C’est le cas du légataire particulier. Il reçoit un bien déterminé et non pas une universalité ou une quote-part de l’universalité. Le légataire particulier, du moins lorsqu’il s’agit d’un legs d’un corps certain, reçoit un droit réel opposable à tous.

f) Exécution des droits des légataires

L’exécution des droits des légataires, aux termes de l’art 1007 Cciv : « Tout testament olographe ou mystique, doit au décès du testateur être déposé chez un notaire s’il ne l’a pas été encore fait avant d’être mis à exécution ».
La question se pose de savoir comment le légataire entre en possession du legs ?
Nous verrons à propos des héritiers qu’on appelle saisine l’investiture légale qui confère aux héritiers, en dehors de tout fait matériel d’appréhension, la possession des biens héréditaires et l’exercice des droits et actions du défunt. Justement, les héritiers ont la saisine. L’Etat n’a pas la saisine car il doit être envoyé en possession.
On a ici 2 hypothèses :

) Le légataire a la saisine
Seul le légataire universel a la saisine et à la condition que le de cujus ne laisse aucun héritier réservataire. Bien qu’ayant la saisine, le légataire universel institué par un testament olographe ou mystique doit demander au Président du TGI du lieu d’ouverture de la succession l’envoi en possession des biens (art 1008 Cciv).

) Le légataire n’a pas la saisine
Le légataire qui n’a pas la saisine, cad le légataire universel en présence d’héritiers réservataires, le légataire à titre universel ou à titre particulier, doit demander la délivrance de son legs. La délivrance du legs ne se confond pas toujours avec le paiement. Par la délivrance, le successible reconnaît l’existence du droit du légataire. Par le paiement, il exécute le legs. La distinction de ces 2 notions présente un intérêt lorsque 2 personnes différentes ont qualité, l’une pour délivrer le legs (l’héritier), l’autre pour le payer (l’exécuteur testamentaire). En d’autres termes, la délivrance du legs apparaît en définitive comme une sorte de saisine indispensable pour investir le légataire qui par hypothèse n’a pas la saisine, de l’exercice de ses droits afin de parvenir au paiement de son legs.
Enfin, tout d’abord, le légataire universel non saisi (art 1004 Cciv) demande la délivrance de son legs aux héritiers réservataires. Ensuite, le légataire à titre universel doit demander la délivrance de son legs aux héritiers réservataires s’il y en a ou, à défaut, au légataire universel, et à défaut, aux héritiers saisis. Enfin, le légataire particulier demande la délivrance de son legs aux mêmes personnes que le légataire à titre universel (art 1014 al 2 Cciv).

La délivrance d’une donation ne se conçoit pas parce que la donation est un acte entre vifs.

 2) Les formes de la donation entre vifs

La donation entre vifs, à l’inverse du testament, est le mode contractuel normal de disposition à titre gratuit.
Définition : La donation est un contrat en principe solennel par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement d’un bien au profit du donataire qui accepte.


A) En la forme

Il doit être rédigé en minute par-devant notaire (art 931 Cciv). Le consentement du donataire doit être expressément donné à peine de nullité. C’est le principe de la solennité.
Ce principe comporte 3 exceptions :
- Le don manuel : C’est la donation faite par la remise d’objets mobiliers (ex : somme d‘argent) quelle que soit la valeur. Il est remis de la main à la main. C’est donc un contrat réel. La formalité est ici la remise matérielle de la chose qui remplace l’acte authentique. A défaut de remise matérielle, la donation est nulle.
- La donation déguisée est déguisée sous les apparences d’un acte à titre onéreux. Ex : on organise une vente mais dans laquelle le prix ne sera jamais payé. Elle est valable, sauf entre époux (mais il y a des exceptions).
- La donation indirecte : donation qui est réalisée par le mécanisme d’un autre acte juridique. Ex : un bien a une valeur de 200.000 € et est vendu pour 150.000 €. Il y a donation indirecte à concurrence de la différence, soit pour 50.000 €.

L) Au fond

La donation, comme le testament au décès, dépouille irrévocablement et immédiatement le donateur. Donc, il faut le protéger. Le Cciv le protège de 2 manières.
D’une part, il entend décourager tout donateur qui doit savoir qu’après l’acte de donation, il ne dispose d’aucun moyen de repentir. C’est la raison pour laquelle le législateur renforce l’irrévocabilité du contrat. Concrètement, il interdit toute clause qui tendrait d’une façon ou d’une autre à réserver au donateur la possibilité de reprendre le bien donné. C’est la raison pour laquelle est nulle, sauf entre époux, la donation de biens à venir car le donateur pourrait révoquer la donation en se refusant à acquérir le bien à venir. De même, est nulle, sauf entre époux, la donation à cause de mort.
D’autre part, la loi retient diverses circonstances qui légitiment à ses yeux la révocation de la donation après exécution. C’est ainsi qu’il peut y avoir :
- Soit révocation judiciaire dans 2 cas : ingratitude du donataire (attentat à la vie du donateur par le donataire) ou inexécution des charges ;
- Soit révocation de plein droit : ici, le droit a évolué. Jusqu’au 1er janvier 2007, les donations consenties par un donateur sans enfants étaient révoquées de plein droit par la survenance d’un enfant de ce donateur, même posthume (art 960 ancien Cciv). C’est ce que l’on appelait la révocation de plein droit pour survenance d’enfant. La pratique notariale a considéré que cette disposition contenue dans cet article, qui à l’origine avait pour but de protéger le donateur dès lors qu’il y avait survenance d’un enfant, était source d’insécurité juridique et portait atteinte à la liberté de transmettre des biens. Dans l’exposé des motifs de la loi de 2006 (TD), le législateur n’a certes pas supprimé la révocation, mais il lui donne désormais un caractère facultatif. Désormais, il n’y a plus révocation de plein droit, mais une révocation facultative pour cause de survenance d’enfant  art 960 et 961 Cciv.

Sous-Section 2 Les libéralités particulières

Il s’agit des donations matrimoniales, notamment les donations entre époux, qui n’ont pas été sérieusement modifiées par le législateur de 2006. Il s’agit d’autre part, et en revanche, de libéralités qui ont été profondément modifiées par le législateur de 2006 qui portaient avant le nom de substitution fidéicommissaire et de legs de residuo. Les substitutions fidéicommissaires sont devenues les libéralités graduelles et le legs de residuo est devenu une libéralité résiduelle. Attention erreur dans les plaquettes de TD.

1) Les donations matrimoniales

Les donations matrimoniales ont fait l’objet d’une faveur du Code civil dans la mesure où elles s’expriment dans le contrat de mariage. En revanche, le législateur de 1804 a nourri une crainte à l’égard des donations entre époux faites pendant le mariage : celle que dans les rapports entre époux, qu’il y ait une influence de l’un sur l’autre. C’est la raison pour laquelle le législateur de 1804 a posé de la grande règle de la révocabilité des donations entre époux faites pendant le mariage.
La particularité des donations matrimoniales provient du fait qu’elles peuvent être soit des donations entre vifs cad qui portent sur des biens présents), soit des donations à cause de mort cad que dans les rapports entre époux, la donation va porter sur la succession du donateur. C’est ce que l’on appelle dans la théorie juridique l’institution contractuelle (= donation de biens à venir qui est à cause de mort interdite en droit commun mais valable entre époux). Ceci dit, ces donations peuvent être conclues soit par contrat de mariage, soit au cours du mariage.

A) La donation par contrat de mariage

Il s’agit soit d’une donation faite par des tiers (ex : les parents) au profit des futurs époux dans le contrat de mariage = c’est une constitution de dot, soit d’une donation de l’un des futurs époux à l’autre dans le contrat de mariage.

M) Les donations entre époux au cours du mariage

Les donations entre époux au cours du mariage ont une histoire tourmentée. Elle était nulle dans la Rome antique car on craignait l’influence d’un époux sur l’autre.
Le Cciv la déclare valable. Mais pour assurer la liberté des époux, cette donation est considérée comme révocable ad nutum. En raison de sa révocabilité, la donation entre époux pendant le mariage a rarement pour objet des biens présents. Le plus souvent, elle porte sur des biens que l’époux donateur laissera à son décès. Le plus souvent, il s’agit d’une institution contractuelle que la pratique notariale désigne sous le nom de donation au dernier vivant. C’est ainsi qu’en présence d’enfants, l’institution contractuelle ou donation de biens à venir entre époux portera sur la quotité disponible la plus large entre époux au jour du décès. Cette quotité disponible est donnée par l’art 1094 Cciv. Il s’agit soit du ¼ en pleine propriété et des ¾ en usufruit, soit de la totalité en usufruit, soit de la quotité disponible la plus large en faveur d’un étranger.
Ici, l’option de l’époux donataire est exercée par lui lors du décès du donateur.

2) Les libéralités particulières réformées par la loi du 23 juin 2006 (libéralités graduelles et résiduelles)

Il s’agit des libéralités graduelles ou résiduelles, et des libéralités partages.






S/s-Paragraphe 1 Les libéralités graduelles et résiduelles

Ces 2 types de libéralités sont des libéralités à double détente. Une personne peut, avec les mêmes biens, gratifiés successivement 2 bénéficiaires en réglant elle-même au profit du 2nd le sort de ses biens dans la succession du 1er. Pour assurer l’efficacité de la transmission au 2nd gratifié, la liberté du 1er est restreinte plus ou moins largement selon qu’il s’agit de libéralités graduelles ou résiduelles.

A) Les libéralités graduelles

Le terme est nouveau dans le Code civil car introduit par la loi de 2006. Avant cette loi, on parlait de substitution. Il s’agissait plus exactement de substitution fidéicommissaire. En principe, elles étaient interdites. En effet, il était interdit de faire une libéralité à une personne en lui imposant de conserver sa vie durant les biens reçus sans les aliéner pour les transmettre à sa mort à un autre bénéficiaire désigné d’avance. Le législateur de 1804, sous l’influence de la R2vilution, avait peur que par ce mécanisme soient reconstitués les privilèges d’ancien régime. C’est la raison pour laquelle ces substitutions étaient interdites.
Cependant, par exception, il était permis à un père ou à une mère, à un frère ou à une sœur, de donner ou de léguer la quotité disponible de ses biens à un enfant ou à un frère, à charge pour celui-ci de conserver les biens et de les restituer à sa mort aux enfants qu’il aurait eus lui-même.
Cette distinction des substitutions fidéicommissaires et prohibées, et de par exception de celles qui étaient autorisées, a laissé place avec la loi de 2006 à un régime permissif en ce sens que de façon plus générale aujourd’hui, les libéralités graduelles sont permises. Il s’agit d’une libéralité avec charge de transmettre.
A fait une libéralité à B, à charge de la transmettre à C.
L’objectif du législateur est de laisser au testateur ou donateur une plus grande liberté de choix. Par exemple en faveur d’un enfant handicapé, quitte pour les frères et sœurs à recevoir en 2nd et après sa vie ces biens.
Le nouvel art 1048 Cciv donne la définition suivante : « Une libéralité peut être grevée d’une charge comportant l’obligation pour le donataire ou légataire (le grevé) de conserver les biens ou droits qui en sont l’objet et de les transmettre à son décès à un 2nd gratifié désigné dans l’acte ».
Cette libéralité ainsi consentie ne peut produire son effet que sur les biens ou droits identifiables à la date de la transmission et subsistants en nature au décès du grevé.
Si le grevé est héritier réservataire du disposant, la charge ne peut être imposée que sur la quotité disponible.
L’art 930 Cciv prévoit néanmoins que le donataire peut accepter dans l’acte de donation que la charge grève tout ou partie de sa réserve.

Les droits du 2nd gratifié s’ouvrent à la mort du grevé. Le 2nd gratifié est réputé tenir ses droits de l’auteur de la libéralité. On peut déduire des art 1055 et 1056 nouveau Cciv que le 2nd gratifié doit accepter la donation graduelle pour en bénéficier. Le 2nd gratifié ne peut pas être à son tour soumis à l’obligation de conserver et de transmettre.
Les art 1048 et s. Cciv mettrent l’importance sur le devoir de conseil du notaire en la matière. C’est ainsi que le notaire doit attirer l’attention sur l’importance de prescrire des garanties et des sûretés pour la bonne exécution de la charge (art 1052 Cciv).

L’auteur d’une donation graduelle peut la révoquer à l’égard du 2nd gratifié tant que celui-ci n’a pas notifié, dans les formes requises en matière de donation, son acceptation au donateur (art 1055 Cciv).
C’est le mécanisme de la substitution fidéicommissaire reconnu aujourd’hui comme valable.

B) Les libéralités résiduelles

La loi de 2006 a consacré ici la pratique de ce que l’on appelait le legs de residuo. Aux termes de l’art 1057 Cciv, une libéralité peut prévoir qu’une personne sera appelée à recueillir ce qui subsistera du don ou legs fait à un 1er gratifié à la mort de ce dernier. La différence entre libéralités graduelles et libéralités résiduelles : avec la libéralité résiduelle, le 1er bénéficiaire (le grevé) n’est pas obligé de conserver le bien et ne doit transmettre au 2ème bénéficiaire que ce qui restera du bien à sa mort. En d’autres termes, la libéralité résiduelle oblige le 1er gratifié à transmettre les biens subsistants. En revanche, elle ne l’oblige pas à conserver les biens reçus (art 1058 Cciv).
Lorsque les biens qui sont l’objet de la libéralité résiduelle, ont été aliénés par le 1er gratifié, les droits du 2nd gratifié ne se reportent ni sur le produit de ces 1ère aliénations ni sur les nouveaux biens achetés par le grevé.
Le 1er gratifié ne peut disposer par testament des biens donnés ou légués à titre résiduel. Toutefois, lorsque le 1er gratifié est héritier réservataire, il conserve la possibilité de disposer entre vifs ou à cause de mort des biens qui ont été donnés en avancement de part successorale (en avancement d’hoirie). La loi renvoie pour les libéralités résiduelles au régime des libéralités graduelles. Cf art 1061, 1049, 1051, 1052, 1055 et 1056 Cciv.

S/s-Paragraphe 2 Les libéralités-partage

Ce sont les donations-partages et testaments partage trouvaient leur expression dans ce qu’on appelait avant 2006 les partages d’ascendants. On est passé à la notion de libéralités-partage.
Les partages d’ascendants, qui étaient prévus par le Cciv, traduisaient l’exercice d’une certains magistrature familiale. En effet, le père de famille rassemblant autour de lui ses enfants organisait entre eux la répartition de ses biens. C’était le visage traditionnel de la donation-partage. Et, un schéma analogue pouvait être réalisé sans la présence simultanée de l’ascendant et descendants avec un partage aménagé par testament (le testament-partage).
L’intérêt de ces mécanismes était de pacifier les relations entre les héritiers présomptifs respectueux de l’autorité morale du père de famille, dont la sagesse devait dicter les meilleurs choix dans la composition et l’attribution des lots.
Cette institution de la donation-partage a connu un très grand succès d’autant qu’il y avait un régime fiscal favorable : le but était d’inciter les parents à la transmission de leurs biens à leurs enfants. Et, au fil des années, de nouveaux facteurs ont poussé à un élargissement de la donation-partage. On s’est rendu compte qu’il était très difficile de transmettre une entreprise. Le législateur est donc intervenu en 1988 pour permettre à un tiers (une personne autre que l’enfant) d’être attributaire de l’entreprise. De plus, on a assisté à l’allongement de la durée de la vie, qui place en position d’activité non pas la 1ère mais souvent la 2nde génération suivant celle du titulaire du patrimoine. Ce sont bien souvent les petits-enfants qui auraient besoin des biens de leurs grands-parents. Le législateur a donc mis en place des donations transgénérationnelles. C’est ainsi que désormais, depuis la loi de 2006, au partage fait par les ascendants du C.civ, succèdent les libéralités)partages qui sont ouvertes à tous par la loi de 2006.

A) L’extension du champ d’application des libéralités-partage

La loi de 2006 est venue étendre le champ d’application des donations et testaments partages aussi bien quant aux personnes que quant aux biens.


1) Extension du domaine quant aux personnes

Sous l’empire du Code civil de 1804, les libéralités-partage ne pouvaient être consenties que par les pères et mères, et autres ascendants, à leurs enfants et descendants. Afin que les libéralités-partage deviennent un véritable outil de transmission successorale, le législateur de 2006 a étendu leur champ d’application selon 2 orientations :
D’une part, l’art 1075 Cciv a été réécrit de façon à permettre à toutes personnes de réaliser la distribution et le partage de ses biens et de ses droits entre ses présomptifs héritiers. C’est ainsi que si une personne n’a pas d’enfants, elle peut réaliser une donation-partage au profit de ses frères et sœurs, ou à défaut de frères et sœurs, au profit de leurs descendants. La seule condition requise est que le gratifié doit être un présomptif héritier du disposant au jour de l’acte.
D’autre part, c’est une extension verticale en quelque sorte en ce sens que le disposant peut faire la distribution et le partage de ses biens entre des descendants de degré différent (art 1075-1 Cciv). Il n’est pas nécessaire, dans ce cas, que les descendants de degré différent soient des présomptifs héritiers.
Ex : une personne qui a un enfant unique peut faire une donation-partage entre cet enfant unique et les descendants de cet enfant unique.
Dans la donation-partage transgénérationnelle, le partage va s’opérer par souche.

9) Une extension du domaine quant aux biens

Jusqu’à présent, outres les meubles et immeubles du de cujus, seule une entreprise individuelle pouvait être transmise par le mécanisme de la donation-partage. La notion d’entreprise a été largement entendue par le législateur de 2006. Il est maintenant possible de réaliser une donation-partage de droits d’une société exerçant une activité à caractère industriel, commercial, artisanal, agricole ou libéral. Il suffit que le disposant exerce dans cette société une fonction dirigeante.

B) La donation-partage

Une personne distribue et répartit ses biens entre ses successeurs. C’est donc un partage comme s’il s’agissait de régler la succession d’un défunt. Mais, comme cette succession n’est pas encore ouverte, la transmission des biens s’opère non par dévolution successorale mais par voie de donation. Comme l’opération a lieu du vivant du disposant, celui-ci va conserver nécessairement certains biens et peut même en acquérir d’autres.
Lors du décès du disposant, le patrimoine du défunt sera composé de tout ce qui n’aura pas été compris dans la masse à partager de la donation-partage.
La donation-partage est réalisée soit dans le cadre familial (à l’origine, il n’y avait que les donateurs qui étaient des ascendants et les donataires qui étaient des descendants, alors qu’aujourd’hui, on peut trouer des collatéraux), en vertu de l’art 1075-2 Cciv, il est permis d’inclure au nom des bénéficiaires d’une donation-partage, une ou plusieurs personnes qui ne sont pas ses descendants ou ses successibles (du donateur) précisément lorsque la masse des biens à partager comprend une entreprise à caractère industriel, commercial, artisanal ou libéral.
Il existe 2 possibilités de donation-partage :
Les donations-partages conjonctives sont consenties par des époux en communauté de biens.
Les donations-partages cumulatives sont celles où un des 2 parents est décédé et où le parent survivant et les enfants vont réunir dans une seule masse la succession du prémourant et les biens du survivant.


Les effets de la donation-partage :

Il faut distinguer les effets du vivant du disposant et de ceux à la mort du disposant.
De son vivant, il faut distinguer les rapports du disposant avec les bénéficiaires de l’acte. Dans ces rapports, on retrouve les liens de donateur à donataire. Par conséquent, le disposant est immédiatement dépouillé des biens donnés. Les donataires ne sont pas tenus des dettes du donateur. La révocation judiciaire pour ingratitude ou inexécution des charges est applicable.
Dans les rapports des donataires entre eux, on assiste à des rapports de co-partageants à co-partageant. Par conséquent, si l’un des descendants est évincé des biens qui sont mis dans son lot, il peut immédiatement recourir en garantie contre les autres (action en garantie du partage). Par ailleurs, toutes les créances d’un co-partageant sont garanties par le privilège de co-partageant (comme le privilège de vendeur en matière de vente).
Au décès du disposant, le décès de l’ascendant ouvre sa succession, mais les biens compris dans la donation-partage en sont exclus. Si les donataires acceptent la succession concernant lesbiens qui n’étaient pas compris dans la donation-partage, ils n’ont pas à faire le rapport des biens dont ils sont allotis dans la donation-partage. En effet, les biens compris dans la donation-partage ont déjà fait l’objet d’un partage lors de la signature de l’acte et le partage successoral ne portera que sur les autres biens.

C) Le testament-partage

C’est un acte assez rare.
En la forme, le testament-partage est un testament. Au fond, il s’agit d’un partage. Cela veut dire que l’acte doit être établi selon les formes exigées pour la validité d’un testament, et le testament-partage ne peut concerner que des successibles à l’exception des descendants de degré différent. Le consentement des personnes intéressées (gratifiées à la mort) est inconcevable car il s’agit d’un testament. C’est ce qui explique qu’il soit peu utilisé.
Selon le droit commun des testaments, le testament-partage conjonctif est interdit.
Il est révocable jusqu’à la mort du testateur et l’acte ne produit effet qu’au décès dudit testateur.
Le testament-partage peut répartir tout le patrimoine du testateur et non seulement les biens présents au moment de la rédaction de l’acte, mais aussi les biens à venir. Le testateur peut équilibrer les lots en prévoyant des soultes.
La caractéristique du testament-partage est que, contrairement à la donation-partage, il ne produit aucun effet. Au décès du testateur, les successeurs recueillent en réalité une succession instantanément partagée. Et tout se passe comme s’il s’agissait d’une succession ab intestat. Ce qui veut dire qu’il n’opère pas disposition des biens mais il opère seulement une répartition des biens. Celui qui renonce au testament-partage renonce à la succession.
Qu’il s’agisse d’un testament-partage, d’une donation-partage ou une institution contractuelle, d’un testament ou d’une donation, les pouvoirs du disposant aussi étendus soient-ils comportent des limites.






Chapitre 2 Les limites au pouvoir de modifier la dévolution légale


Le pouvoir de disposer à titre gratuit (donation, testament, donation-partage, testament-partage, institution contractuelle) comporte 2 limites :
- La prohibition des pactes sur succession future = art 722 et 1130 Cciv, mandat à effet posthume (art 812 Cciv) et renonciation à l’action en réduction
- La réserve héréditaire

Lorsque le donateur ou le testateur laisse comme héritier des descendants ou le conjoint survivant, la loi divise son patrimoine en 2 parts. La 1ère part est la quotité disponible cad la fraction du patrimoine dont son auteur peut disposer librement. La 2ème part est la réserve cad une fraction du patrimoine toujours dévolue ab intestat aux descendants ou au conjoint lorsqu’il est réservataire. Les réservataires (cad les descendants et éventuellement le conjoint) ne peuvent pas être privés de leur réserve par une libéralité.
Comme le patrimoine d’une personne est constamment soumis à des fluctuations, il n’est possible de chiffrer avec précision du montant de la réserve qu’au décès du disposant.
La loi de 2006 est venue apporter une exception notable au caractère d’ordre public de la réserve : c’est la renonciation anticipée à l’action en réduction.

Section 1 La quotité disponible et la réserve

Aujourd’hui, seuls bénéficient d’une réserve les descendants et, à défaut, le conjoint du disposant. Le montant de la quotité disponible, et donc de la réserve, dépend du nombre et de la qualité des héritiers réservataires, que laisse le défunt. C’est ainsi qu’il faut distinguer les différentes quotités disponibles, et peut-il y avoir un cumul des quotités disponibles ?

1) Les différentes quotités disponibles

Par voie de conséquence les différentes réserves.
En 1804, le Code civil établissait certes une réserve au profit des descendants, mais à défaut, les ascendants étaient réservataires. Le conjoint n’était jamais lui héritier réservataire.
La loi de 2006 a supprimé la réserve des ascendants. Mais, la suppression de leur réserve a été compensée par l’établissement à leur profit d’un droit de retour des donations consenties au de cujus, droit de retour qui dans une certaine mesure assure la conservation des biens dans la famille.
La loi de 2001 a, quant à elle, établi une réserve au profit du conjoint survivant, à la condition qu’il n’y ait pas de descendants.
Le législateur, déjà de 1804, a admis qu’on puisse gratifier plus amplement son époux qu’un tiers. C’est ainsi qu’il existe 2 catégories de quotités disponibles :
- La quotité disponible ordinaire
- La quotité disponible entre époux

A) La quotité disponible ordinaire

C’est quotité disponible ordinaire (et la réserve ordinaire) va s’appliquer d’une part lorsque le défunt laisse des descendants, et d’autre part, lorsqu’à défaut de descendants, il laisse son conjoint survivant.

1) Le défunt laisse des descendants

Le taux de la quotité disponible et de la réserve est déterminé par l’art 913 Cciv. Selon ce texte, la quotité disponible s’établit comme suit :
Elle est de moitié de la succession si le défunt laisse un enfant (donc la réserve sera de ½ au profit dudit enfant)
Elle est de 1/3 de la succession si le défunt laisse 2 enfants cad que les 2 enfants se partageront une réserve des 2/3
Elle est de ¼ de la succession si le défunt laisse 3 enfants ou plus, donc la réserve au profit des enfants sera des ¾ .
Pour l’application de ces règles, il faut considérer comme enfants, tous les descendants appelés à la succession. Les petits-enfants et arrières petits-enfants ne sont comptés que pour l’enfant dont ils sont issus car la quotité disponible se calcule en fonction des enfants des enfants, même si ce sont des petits-enfants qui profitent de la réserve en venant à la succession de leur chef.


10) Le défunt ne laisse pas de descendants mais un conjoint survivant

Depuis très longtemps, la question de la réserve du conjoint survivant a été débattue. Pendant très longtemps, un courant a été hostile à sa reconnaissance. Finalement, c’est la loi de 2001 qui a reconnu cette réserve. En présence de descendants, le conjoint n’a pas de réserve. Mais, à défaut, le conjoint bénéficie d’une réserve du ¼ de la succession. Ce qui laisse une quotité disponible des ¾.
Si le défunt avait reçu des biens de son père ou mère par libéralité ou succession, la réserve du conjoint peut se trouver plus ou moins amputée par le jeu du droit de retour partiel des collatéraux privilégiés.

N) La quotité disponible entre époux

C’est une quotité disponible spéciale : question de savoir jusqu’à combien il peut être gratifié sans porter atteinte à la réserve des enfants.
Il paraît normal que l’on puisse disposer plus largement au profit de son conjoint qu’au profit d’étrangers. D’où, une quotité disponible spéciale pour les libéralités entre époux.
Cette quotité disponible spéciale est établie par l’art 1094-1 Cciv. En réalité, ce texte ouvre une option.
On peut donner au conjoint survivant soit la quotité disponible ordinaire, soit ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit, soit la totalité en usufruit.
En principe, le choix appartient au disposant (celui qui gratifie son autre conjoint). Mais, le disposant peut laisser le choix de la quotité disponible au conjoint gratifié. En quelque sorte, l’option passe alors du disposant sur la tête du gratifié. C’est ainsi que dans ce que l’on appelle l’institution contractuelle (la donation de biens à venir entre époux), elle consiste à attribuer à l’époux qui sera survivant à son choix soit la quotité disponible ordinaire, soit ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit, soit la totalité en usufruit. Et c’est l’époux survivant qui à la mort de son conjoint qui exercera l’option transmise par le disposant de son vivant.
La question se pose de savoir si on peut cumuler la quotité disponible ordinaire et celle entre époux. Notre droit n’admet qu’un cumul partiel.


2) Le cumul partiel des quotités disponibles

On va supposer ici que le défunt gratifie à la fois son conjoint et d’autres personnes. La question est de savoir si le défunt, en gratifiant à la dois son conjoint et d’autres personnes, a entamé la réserve précisément en présence de 2 quotités disponibles qui ne sont pas les mêmes, 2 quotités disponibles qui n’expriment pas forcément 2 droits de mêmes nature ?
La quotité disponible ordinaire est toujours en pleine propriété. La quotité disponible entre époux peut comprendre des droits de nature différente.
Ex : ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit.
Il est certain que le de cujus ne peut pas cumuler intégralement le disponible entre époux et le disponible ordinaire parce que s’il le pouvait, la réserve serait complètement anéantie.
Ex : le défunt laisse 1 enfant et le conjoint survivant. La quotité disponible ordinaire est de ½ en pleine propriété. Celle entre époux est égale soit à la quotité disponible ordinaire, soit ¼ en pleine propriété et ¾ en usufruit, soit la totalité en usufruit. Supposons que le défunt gratifie un étranger de ½ en pleine propriété, et que le conjoint survivant à qui l’option a été laissée, opte également pour une moitié en pleine propriété. La réserve = 0. Donc, il ne peut pas y avoir cumul total des 2 quotités disponibles. La solution est celle d’un cumul partiel des 2 quotités disponibles. Règle posée par un arrêt important du 26 avril 1985 (D 1985 p 133). Apport essentiel de l’arrêt d’admettre un cumul partiel. Il a maintenu des règles anciennes, mais a posé une règle nouvelles.
Au titre d’une part des règles anciennes maintenues, il faut retenir 2 choses. D’une part, le de cujus ne peut toujours pas disposer cumulativement des 2 quotités disponibles en leur entier. D’autre part, chaque gratifié ne peut recevoir plus que la quotité disponible qui lui est propre. En d’autres termes, l’époux est enfermé dans la quotité disponible spéciale entre époux cad soit le montant de la quotité disponible ordinaire, soit ¼ - ¾, soit totalité en usufruit. Les autres personnes (étrangères à la famille) sont enfermées dans la quotité disponible ordinaire.
Au titre de la règle nouvelle posée, le défunt, après avoir épuisé la quotité disponible ordinaire, peut encore disposer au profit de son conjoint de l’usufruit de la réserve. C’est donc au final un cumul partiel.

Section 2 L’exception au caractère d’ordre public de la réserve

C’est la fameuse instauration par la loi de 2006 de la renonciation anticipée à l’action en réduction. La loi de 2006 est venue apporter une importante limitation.
Jusqu’alors frappé de nullité absolue, un pacte successoral portant du vivant du de cujus renonciation par un héritier réservataire présomptif à mettre en œuvre son droit sur la réserve est désormais autorisé. Pour de tels actes, la loi de 2006 (art 929 à 930-5 nouveau Cciv) a levé avec certaines précautions la prohibition des pactes sur succession future.
C’est ainsi qu’en renonçant à la vente, à une éventuelle réduction pour atteinte à sa réserve, l’héritier présomptif laisse en pratique le champ libre à son auteur pour effectuer plus largement s’il le souhaite des dispositions gratuites de biens à autrui.
Ex : des dispositions faites à un enfant handicapé pour lui assurer, après le décès de ses parents, des moyens d’existence suffisants.






Pour cela, il faut réunir des conditions :

Au fond, il faut l’accord de l’héritier présomptif et de celui dont il a vocation à hériter. C’est ainsi que se manifeste l’aspect de pacte familial que revêt cette renonciation anticipée à agir éventuellement en réduction. Cette renonciation doit être faite au profit d’une ou plusieurs personnes déterminées et seules les libéralités au profit de ces personnes n’encourent pas le risque de réduction du chef du renonçant (art 929 al 1er Cciv). La renonciation est un acte désintéressé, soumise aux conditions générales des actes juridiques. C’est ainsi qu’en cas de vice du consentement, il y aurait nullité de la renonciation (art 930 al 2 Cciv). Le renonçant doit avoir la capacité à faire une donation. L’art 930-1 al 1er Cciv dispose que le mineur émancipé est spécialement frappé de l’incapacité de consentir la renonciation anticipée.

En la forme, cette renonciation est établie par un acte authentique qui doit obligatoirement être reçue par 2 notaires (dont l’un est désigné par la Chambre départementale). S’il y a plusieurs renonçants, chacun signe séparément en présence des seuls notaires. Cet acte authentique doit déterminer l’étendue de la renonciation, toute la réserve, une partie de la réserve ou seulement un bien déterminé. Le renonçant peut demander la révocation de sa renonciation afin de restaurer ses droits à la réserve.

L’art 930-3 Cciv prévoit 3 cas :
- Celui dont il a vocation à hériter ne remplit pas ses obligations alimentaires envers lui
- Le renonçant est dans le besoin et il s’avère que ses droits de réservataire le sortiraient de cet état
- Le bénéficiaire de la libéralité qui est attentatoire à la réserve du renonçant a commis un crime ou un délit contre sa personne.
















TITRE 2 L’acquisition de la succession


En droit français, les héritiers continuent la personne du défunt. Ces droits et obligations leur sont transmis par le seul fait du décès. Mais, les successibles demeurent libres d’acquérir ou de ne pas acquérir les biens du de cujus. Justement, on appelle successible celui qui ne s’est pas encore prononcé sur l’option qu’il va prendre.
En d’autres termes, la transmission de plein droit du patrimoine du défunt ne fait pas obstacle à la liberté d’acquisition reconnue aux héritiers. Si les héritiers acceptent la succession, se posera alors la question de savoir selon quelles techniques ils acquièrent les biens héréditaires ?

Il faut distinguer la liberté d’acquisition, puis les techniques d’acquisitions.

Sous-Titre I La liberté d’acquisition

C’est ce que l’on appelle en droit le droit d’option qui comporte plusieurs thèmes ou branches.

Chapitre 1 Le droit d’option


En réalité, 2 questions se posent :
- Quels sont les délais d’option ?
- Quels sont les caractères de l’option ?

Section 1 Les délais d’option

L’option ne peut être exercée avant l’ouverture de la succession, sinon ce serait un pacte sur succession future (art 770 Cciv).
Les délais ont changé par rapport au droit antérieur. Depuis l’entrée en vigueur de la loi de 2006, l’héritier ne peut être contraint à opter avant l’expiration d’un délai de 4 mois à compter de l’ouverture de la succession (délai de réflexion qui lui est laissé).
Le nouvel art 771 al 2 Cciv ajoute : « A l’expiration de ce délai, il peut être sommé par acte extrajudiciaire de prendre partie à l’initiative d’un créancier de la succession, d’un co-héritier, d’un héritier de rang subséquent ou de l’Etat ».
En réalité, la loi de 2006 a accéléré la prise de décision des héritiers et l’action interrogatoire a été étendue aux créanciers, aux co-héritiers ou aux héritiers de rang subséquent ainsi qu’à l’Etat.
Ces différentes personnes peuvent ainsi sommer tout héritier, qui est demeuré inactif pendant les 4 mois ayant suivi le décès, de prendre position. S’il y a une sommation, l’héritier passif dispose alors d’un délai de 2 mois pour opter. S’il demeure également inactif au bout de ces 2 mois, il est réputé avoir accepté la succession purement et simplement (art 772 nouveau Cciv).
S’il n’y a pas eu de sommation de leur part de prendre partie, l’option successorale entendue cette fois-ci comme le droit héréditaire lui-même se prescrit alors par 10 ans à compter de l’ouverture de la succession. Passé ce délai, l’héritier est réputé renonçant (il y a donc perte de la vocation successorale : avant 2006, ce délai était de 30 ans).


Section 2 Les caractères de l’option

L’option est discrétionnaire. C’est un acte libre, mais aussi un acte successoral.

1) L’option : acte libre

Juridiquement parlant, c’est un acte juridique unilatéral. Ce qui caractérise l’option, c’est qu’elle est individuelle et chaque co-héritier est libre de prendre un parti différent.
Comme tout acte juridique, elle suppose la capacité et le consentement valable de son auteur.
L’art 777 Cciv dispose d’ailleurs : « L’option de l’héritier est nulle si elle est entachée de dol, d’erreur ou de violence ».
Au titre de la capacité juridique, l’art 461 Cciv dispose : « Par dérogation à l’art 768, le tuteur ne peut accepter une succession échue au mineur qu’à concurrence de l’actif net. Toutefois, le Conseil de famille peut, par une délibération spéciale, l’autoriser à accepter purement et simplement si l’actif dépasse manifestement le passif (al 1) Le tuteur ne peut renoncer à une succession échue au mineur sans une autorisation du Conseil de famille ».
Pour les successions ouvertes depuis le 1er janvier 2007, le nouvel art 775 Cciv décide que « Les héritiers de celui qui décède sans avoir opter exercent l’option séparément chacun pour sa part ». Dans le droit antérieur, les héritiers d rang subséquent étaient obligés d’accepter sous bénéfice d’inventaire, alors qu’aujourd’hui c’est à concurrence de l’actif net.

2) L’option : acte successoral

À raison de son caractère successoral, l’option ne peut être exercée qu’après l’ouverture de la succession. Ce qui caractérise l’option successorale, c’est qu’elle ne peut être ni conditionnelle ni à terme. On dit que l’option est indivisible cad qu’elle est nécessairement la même pour toute la succession. Mais, cette indivisibilité de l’option va être écartée lorsque le principe de l’unité de la succession se trouve mis en échec. C’est ainsi que le principe de l’unité de la succession est écarté en présence d’un droit de retour légal.
En conséquence, celui qui est appelé à la fois à la succession anomale et à la succession ordinaire du de cujus, peut prendre 2 partis différents (puisqu’en fait, il y a 2 successions).
L’option a un effet rétroactif au jour de l’ouverture de la succession (art 776 nouveau Cciv).












Chapitre 2 Les termes de l’option


Ou branches de l’option.
Les art 782 à 808 nouveau Cciv offrent le choix (cela n’a pas changé en 2006 sauf en matière de terminologie) à travers le triptyque suivant : soit accepter purement et simplement la succession, soit l’accepter à concurrence de l’actif net (ancien sous bénéfice d’inventaire), soit de renoncer à la succession.

Section 1 L’acceptation pure et simple de la succession

Elle est régie par les art 782 à 786 Cciv.
Cette acceptation consolide la transmission qui s’est opérée par le seul effet du décès. L’apport de la loi de 2006 a été de sécuriser cette acceptation comme le montre l’examen de ses formes et de ses effets.

1) Les formes de l’acceptation pure et simple

En principe, l’acceptation est volontaire. Exceptionnellement, l’acceptation d’une succession est imposée à titre de sanction.

A) L’acceptation volontaire

L’acceptation est pour le Code civil expresse ou tacite.

1) L’acceptation expresse

L’art 982 Cciv nous dit qu’il y a acceptation expresse quand le successible prend le titre ou la qualité d’héritier dans un acte authentique ou sous seing privé. Ce qui revient à dire qu’il y a acceptation expresse chaque fois que le successible prend la qualité d’héritier dans un écrit.
Dans la pratique, l’héritier accepter expressément en prenant cette qualité dans l’attestation immobilière après décès (requise aux fins de publicité foncière). En revanche, l’acte de notoriété constitue certes la preuve de la qualité d’héritier, mais ne fait pas la preuve qu’il accepte la succession.
L’héritier accepte purement la succession dans un autre acte appelé l’intitulé d’inventaire.

11) L’acceptation tacite

Il y a acceptation tacite chaque fois que le successible (art 782 Cciv) accomplit un acte qui implique nécessairement son intention d’accepter. C’est ainsi que si un successible vend un immeuble qui dépend de la succession (que si l’on en est propriétaire), il fait acte de propriétaire et signifie qu’il a accepté la succession (art 783 al 1er Cciv).
De même, l’héritier accepte tacitement la succession lorsqu’il transmet ses droits à d’autres successeurs qu’il désigne. C’est ce que l’on appelle la renonciation in favorem qui n’est pas juridiquement parlant une renonciation. Elle recouvre en réalité 2 opérations :
- L’acceptation tacite de la succession
- Une transmission du droit héréditaire que l’on a accepté au profit d’autres successeurs.

Le nouvel art 784 Cciv tend à remédier à une définition un peu trop extensive de l’acceptation tacite. Le législateur de 2006 pour que l’acceptation tacite soit interprétée de façon stricte.
C’est ainsi que l’alinéa 1er dispose : « Les actes purement conservatoires ou de surveillance et les actes d’administration provisoires peuvent être accomplis sans emporter acceptation de la succession si le successible n’y a pas pris le titre ou la qualité d’héritier ». Dans la pratique, il est parfois difficile de voir s’il y a eu ou pas acceptation tacite. Le successible qui accomplit un acte mais qui entend se réserver son option a intérêt à se faire autoriser par justice à accomplir l’acte. En se faisant autoriser par justice, il manifeste ainsi son intention d’agir en sa seule qualité d’administrateur.

O) L’acceptation forcée

L’art 778 Cciv impose à titre de sanction, aujourd’hui comme hier, l’acceptation pure et simple par l’héritier qui a recelé des effets de la succession (lingots d’or, des effets mobiliers) au préjudice de ces co-héritiers, ou qui a dissimulé l’existence d’un co-héritier. De manière générale, toute fraude de la part d’un héritier, qui a pour objet de rompre l’égalité entre les héritiers, est juridiquement un recel. L’auteur de ce recel, à moins qu’il n’ait remis les biens dans la succession avant toute poursuite, est privé de sa part dans ces biens. Mais, pour le surplus de la succession, même si elle comporte beaucoup de dettes, il est réputé acceptant pur et simple.
Se pose maintenant la question de savoir quels sont les effets de l’acceptation pure et simple ?

2) Les effets de l’acceptation pure et simple

Il faut distinguer la situation de l’héritier et celle des créanciers.

A) Situation de l’héritier

La situation de celui qui accepte purement et simplement une succession est en principe définitive. L’héritier ne dispose d’aucun droit de repentir cad qu’une fois qu’il a accepté, il ne peut plus renoncer. Il ne peut pas non plus l’accepter à concurrence de l’actif net (art 786 Cciv).
L’héritier acceptant remplace en principe le de cujus à la tête de son patrimoine de telle sorte que le patrimoine successoral vient en principe se confondre avec le sien propre. La conséquence juridique est qu’étant le continuateur de la personne du défunt, il devra payer les dettes et charges de la succession « ultra vires successionis » cad au-delà des forces de la succession. La conséquence pratique est que si le passif dépasse l’actif, l’héritier devra payer ce passif s’il a accepté purement et simplement. Il est arrivé en pratique qu’on découvre un passif au bout de plusieurs mois ou années  on va rechercher les héritiers qui ont accepté et les sommer de payer. C’est la raison pour laquelle le législateur de 2006 est intervenu. Depuis le 1er janvier 2007, l’acceptation pure et simple a été sécurisée (apport important). C’est ainsi que l’héritier qui a accepté purement et simplement une succession peut demander à être déchargé d’une dette qu’il avait le juste motif d’ignorer, dettes qui obéraient fortement le patrimoine (art 786 al 2 Cciv). Donc, en pratique, lorsqu’un passif important survient et que le l’héritier avait le juste motif de l’ignorer, il n’en sera plus débiteur.
Par ailleurs (autre réforme importante), l’héritier n’est plus tenu des legs de sommes d’argent qu’à concurrence de l’actif net successoral. La jp décidait qu’un legs de somme d’argent est une créance. Donc, puisque les héritiers sont tenus pour les créances, ils devaient payer même si le passif dépasse l’actif. La loi de 2006 est alors intervenu pour pallier cette situation injuste. C’est la raison pour laquelle l’hériter n’est plus tenu aujourd’hui au-delà de l’actif successoral.

P) Situation des créanciers

La confusion du patrimoine du défunt avec celui de l’héritier entraîne le fait que les créanciers du défunt et ceux de l’héritier vont avoir un gage unique. Cela va porter pour les créanciers successoraux un concours avec les créanciers personnels. Il y a un moyen pour que les créanciers successoraux passent devant les créanciers personnels. Il faut inscrire le privilège de la séparation des patrimoines qui permet aux créanciers du défunt et personnels des héritiers de se faire payer en priorité sur la succession du défunt.
Depuis le 1er janvier 2007, ce privilège est bilatéralisé seulement pour les successions ouvertes à compter du 1er janvier en ce sens que les créanciers personnels de l’héritier pourront demander à être payés sur les biens personnels de l’héritier, autres que ceux recueillis au titre de la succession, avant les créanciers du défunt.

Section 2 L’acceptation à concurrence de l’actif net

Art 787 à 803 Cciv.
Cette acceptation s’appelait auparavant l’acceptation sous bénéfice d’inventaire. Elle est réalisée matériellement par une inscription sur le registre des renonciations tenu au greffe du TGI du lieu d’ouverture de la succession.
Cette acceptation empêche les créanciers successoraux de poursuivre l’héritier au-delà des forces de la succession. Autrement dit, cette option permet à l’héritier de préserver son patrimoine personnel en cantonnant aux biens de la succession les poursuites des créanciers successoraux.
La loi de 2006 est aussi intervenue par des retouches. Afin d’accélérer le règlement de la succession, l’héritier qui déclare l’accepter à concurrence de l’actif net doit faire établir par un commissaire-priseur, huissier ou notaire un inventaire estimatif des éléments d’actif et de passif de la succession. Cet inventaire doit être déposé dans les 2 mois de la déclaration d’acceptation au TGI du lieu d’ouverture de la succession.
Passé ce délai, l’héritier bénéficiaire est réputé accepter purement et simplement (art 790 Cciv).
La déclaration d’option et l’inventaire font l’objet d’une publicité nationale (art 788 et 790 Cciv).
Les créanciers disposent d’un délai de 15 mois à compter de la publicité de la déclaration d’option pour déclarer leur créance (art 792 al 1er Cciv).
Depuis la loi de 2006, la grande idée à retenir est que l’héritier qui accepte la succession à concurrence de l’actif net a désormais un rôle central. Il règle le passif successoral (art 796 Cciv), il administre les biens qu’il recueille dans la succession (art 800 Cciv) et il décide des biens qu’il conserve ou qu’il aliène sans devoir recourir à la vente publique (art 793 Cciv). Serait pas mal de comparer le droit des procédures collectives et l’acceptation à concurrence de l’actif net.
Le successible qui a accepté à concurrence de l’actif net ne peut plus renoncer à la succession. En revanche, il peut aller vers l’acceptation pure et simple et renoncer à l’acceptation à concurrence de l’actif net.





Section 3 La renonciation

Art 804 à 808 Cciv.
Comme l’acceptation à concurrence de l’actif net, la renonciation à la succession résulte d’une déclaration expresse au TGI du lieu d’ouverture de la succession sur le registre des renonciations.
Tant que la succession n’est pas encore acceptée par d’autres héritiers ou par l’Etat, le renonçant peut revenir sur sa renonciation (comme le droit de repentir en matière de droit de la consommation).
Il peut changer d’avis seulement au profit d’une acceptation pure et simple (art 807 Cciv). Il ne peut donc plus accepter à concurrence de l’actif net.
Le renonçant est censé quant à lui n’avoir jamais été héritier (art 805 Cciv). Depuis la loi de 2006, la part du renonçant revient en priorité à ses représentants. S’il n’y a pas de représentants, sa part revient aux co-héritiers.
Les libéralités en avance de part successorale qui auraient été reçues par le renonçant seront gardées par lui définitivement à titre de libéralité hors part successorale cad à titre de libéralité préciputaire.
L’art 806 Cciv dit que bien que non tenu aux dettes et charges de la succession, le renonçant doit assumer à proportion de ses ressources sa part concernant les frais funéraires et d’obsèques à la succession duquel il renonce.

Sous-Titre 2 Les techniques d’acquisition


La dévolution successorale détermine les droits des héritiers. L’acceptation de la succession les consolide.
Se pose de la mise en œuvre pratique de ces droits cas de la transmission des droits aux héritiers ? S’il y a plusieurs héritiers, ils se trouvent alors en état d’indivision. La loi de 2006 prévoit des modalités particulières d’administration de la succession.

Chapitre 1 Transfert des biens aux héritiers

Etre titulaire de droits héréditaires et pouvoir les exercer sont 2 choses différentes.
L’héritier peut-il exercer les droits et action s du défunt sans formalité ni autorisation ?
C’est précisément au moment où il entend exercer ces droits qu’on lui demande de prouver sa qualité d’héritier.

Section 1 Les règles de fond

L’Etat n’a pas la saisine. Il doit se faire envoyer en possession. De même, n’ont pas la saisine (art 1006 Cciv) le légataire universel en présence d’héritiers réservataires acceptants. De même pour le légataire à titre universel ainsi que le légataire particulier. En revanche, tous les héritiers ont aujourd’hui la saisine.
La saisine est l’investiture légale qui confère aux héritiers, en dehors de tout fait matériel d’appréhension, le droit de se mettre en possession immédiatement des biens héréditaires et d’exercer les droits et actions du défunt.
Concrètement, la saisine fait de l’héritier le représentant légal de la succession cad que l’héritier, contrairement à l’Etat, n’a pas à demander l’envoi en possession ou la délivrance du legs.
Plus précisément, la saisine place l’héritier dans la condition même qui était celle du défunt tant à l’égard de ses droits (mise en possession) que de ses obligations (poursuite immédiate par les créanciers successoraux). Assurant une véritable continuité pour les biens et les dettes, la saisine est indivisible. Cf Civ1 20 mars 1984 (Defresnois 1984 n°33432).

Section 2 Les règles de preuve

La preuve de la qualité d’héritier se prouve par un acte de notoriété. Comme le rappelle Hildago (La preuve de la qualité d’héritier JCP N 2002 p 510), l’acte de notoriété est une œuvre de la pratique notariale. La loi de 2001 est venue codifier les principales dispositions de l’acte de notoriété dans les art 730-1 à 730-5 Cciv. C’est une preuve non contentieuse.
Lorsque l’héritier se heurte aux prétentions d’un autre successeur qui a déjà appréhendé les biens successoraux, on a alors un conflit. La preuve sera alors contentieuse. Un procès s’engage sur la détermination des successeurs. Celui qui se prétend héritier engage une action en pétition d’hérédité. Il va demander la restitution des biens successoraux et que le tribunal déclare qu’il est bien l’héritier.

Chapitre 2 L’indivision successorale

En vertu du principe de la continuation de la personne du défunt, ses héritiers sont immédiatement investis, chacun pour sa part, des droits du de cujus sur toute la base successorale.
Jusqu’au partage qui localisera leurs droits respectifs, les co-héritiers sont chacun à concurrence de leur quote-part en état d’indivision.
Cette situation est celle de l’indivision qui n’est pas propre au droit successoral (post-communautaire dans les RM). Les conventions d’indivision ne relèvent pas du droit successoral et relève de l’art 1873-1 à 1873-3 Cciv. Grand parallèle du droit de l’indivision et le droit des sociétés.

L’indivision légale n’empêche pas les indivisaires de faire une convention d’indivision. Sa définition est le concours de plusieurs droits de même nature sur un bien ou une même masse de biens sans qu’il y ait division matérielle des parts. Cette indivision légale est régie par les art 815 à 815-16 Cciv.
Dans le sillage de l’effet déclaratif du partage qui aboutit à effacer rétroactivement l’indivision, le Code de 1804 ne disait rien sur l’indivision et considérait que c’était un état temporaire et précaire. Il n’avait pas jugé utile de le régler. Surtout le Code 1804 avait posé cette grande règle que « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l’indivision et le partage peut toujours être provoqué ».
Les indivisions, en réalité, durent longtemps et sont source de chicane. C’est la jp qui a dû régler les contentieux. Le législateur a alors fait une loi du 31 décembre 1976 qui a donné naissance aux indivisions conventionnelles et aux indivisions légales.
Cette loi de 1976 a certes maintenu le principe. Mais, elle a ajouté à l’art « … à moins qu’il n’y ait été sursis par jugement ou convention ». En effet, à la demande d’un indivisaire, le tribunal peut surseoir au partage pour 2 ans au plus si sa réalisation immédiate, réclamée par exemple par un co-héritier, porte atteinte à la valeur des biens indivis (art 815 al 2 Cciv).




L’art 815-1 Cciv autorise pour sa part ce que l’on appelle un maintien forcé de l’indivision. Ce maintien concerne le logement, le local à usage professionnel et les exploitations agricoles, industrielles et libérales. Le tribunal n’est pas tenu d’imposer ce maintien de l’indivision. En pratique, il va apprécier les intérêts en présence. S’il prononce le maintien dans l’indivision, il ne peut pas dépasser en principe une durée de 5 ans, sauf renouvellement.
En outre, l’art 815 al 3 Cciv permet au tribunal saisi d’une demande de partage d’attribuer à l’auteur de la demande sa part et de maintenir pour le reste des biens successoraux l’indivision pour les héritiers qui ne souhaitent pas en sortir.
S’inscrivant dans le prolongement de la loi de 1976, la loi de 2006 poursuit au regard de l’indivision légale un objectif de souplesse dans la gestion courante des indivisions. Pour cela, le législateur, tout en maintenant le grand principe, a substitué à la règle de l’unanimité qui était source de paralysie celle de la majorité des 2/3 pour les actes d’administration et pour le renouvellement des baux d’habitation (art 815-3 Cciv).
Les indivisaires doivent informer tous les autres indivisaires des décisions qui sont ainsi prises afin qu’elles leur soient opposables.
Enfin, l’unanimité est toujours requise pour les actes ne relevant pas de l’exploitation normale et pour tous les actes de disposition, à l’exception de la vente des biens meubles qui payent les dettes et charges de l’indivision.

Le reste du droit de l’indivision n’a pas changé cad que les indivisaires ont le droit de jouir des biens divis conformément à leur destination. Chaque indivisaire peut demander sa part de bénéfice en fin d’année. Surtout, chaque indivisaire peut céder tout ou partie de ses biens indivis à un tiers sous réserve de le notifier aux autres indivisaires, qui peuvent alors exercer un droit de préemption dans le délai d’un mois.

Chapitre 3 L’administration de la succession


Ou encore modalités particulières d’administration d’une succession. 3 axes :
Le législateur de 2006 entend optimiser la gestion de la succession (sujet partiel). Optimiser la gestion de la succession : en réalité le législateur l’a déjà fait en supprimant la règle de l’unanimité dans l’indivision successorale.
Le successible qui veut accomplir des actes conservatoires peut le faire sans prendre partie sur l’option qu’il désire et ne sera pas considéré comme acceptant purement et simplement (peut s’adresser au tribunal pour le faire).
Le législateur de 2006 souhaite augmenter le recours au mandat de gestion. En effet, au mandat conventionnel conclu par les héritiers d’un commun accord (art 1984 à 2010 Cciv) s’ajoutent 2 nouveaux mandats. D’une part, le législateur a créé de toute pièce le mandat à effet posthume. Cette innovation est une des plus importantes de la loi de 2006 et il a lieu de le comparer avec la fiducie. Le propre de ce mandat à effet posthume est que le mandataire ne représente pas le mandant contrairement au droit commun du mandant mais un héritier qui en a besoin. D’autre part, le législateur de 2006 crée le mandat judiciaire. En cas de mésentente entre les héritiers, de carence ou de faute de l’un d’eux dans l’administration de la succession, un héritier, un créancier ou toute personne intéressée peut demander la désignation d’un mandataire en justice. Ce mandat est régi par l’art 813-6 Cciv.

Le dernier apport de la loi de 2006 est relatif au partage.


PARTIE II LA LIQUIDATION DU PATRIMOINE DU DE CUJUS

Liquider une succession consiste d’abord à former la masse partageable. Sur cette masse partageable, les notaires règlent le passif pour avoir un actif net. Puis, l’actif net est partagé.

Titre 1 La formation de la masse partageable

Les choses sont simples lorsqu’il n’y a qu’un seul héritier qui n’est pas réservataire parce qu’il n’y a pas ni égalité ni réserve à sauvegarder. La formation de la masse à partager devient plus complexe lorsque le défunt a consenti de son vivant des libéralités et qu’il laisse par ailleurs 2 ou plusieurs héritiers dont certains sont réservataires. Il faut alors sauvegarder l’égalité entre les héritiers et la réserve héréditaire, à moins qu’il n’y ait eu une renonciation anticipée à l’action en réduction des libéralités dépassant les quotités disponibles.

D’une part, afin de respecter, dans une certaine mesure du moins, l’égalité (« l’égalité est l’âme du partage »), les héritiers qui ont déjà été gratifiés doivent rapporter à la masse les biens soit en nature, soit simplement en valeur, qu’ils ont reçu. C’est ce que l’on appelle le rapport.
D’autre part et quant aux autres héritiers réservataires, à moins qu’ils aient renoncé par anticipation à l’action en réduction des libéralités excédant la quotité disponible, ils sont en droit de faire rentrer dans la masse successorale par le mécanisme de la réduction les biens donnés ou légués par le de cujus au-delà de la quotité disponible. Alors, il ne faut pas confondre d’une part le rapport qui satisfait des impératifs d’égalité, et d’autre part, la réduction qui a simplement pour but, lorsqu’il y a des héritiers réservataires, de reconstituer leur réserve.

Sous-Titre 1 Le rapport

Dans le Code civil, le rapport est régi par les art 843 et s. Cciv.
Le rapport est un instrument d’égalité entre co-héritiers. Le législateur, depuis longtemps, entend sauf volonté contraire du défunt que l’héritier déjà gratifié (ou qui avait contracté une dette envers lui) ne reçoive pas plus que les autres héritiers en fin de compte et tout compris.
Le Code civil est en ce sens que chaque co-héritier fait rapport à la masse des dons qu’il lui ont été fait et des sommes dont il est débiteur.
Pour l’essentiel, le législateur de 2006 a repris les règles déjà contenues dans le Code civil. En réalité, le rapport pose 2 questions :
- Y a-t –il lieu à rapport ?
- S’il y a rapport, comment s’effectue-t-il : en nature ou en valeur ?




Chapitre 1 Y a-t-il lieu à rapport ?

Tendant à maintenir l’égalité entre héritiers, le rapport ne concerne que ceux d’entre eux qui viennent effectivement à la succession, et pour les seules libéralités rapportables. D’où 2 nouvelles questions :

Section 1 La libéralité est-elle ou non rapportable ?

La réponse à cette question dépend d’une part de la volonté du disposant, et d’autre part, de la nature de l’avantage reçu.

1) Volonté du disposant

Tout dépend si le défunt n’a pas ou a entendu avantager définitivement le gratifié. Ce signifie que les règles du rapport ne sont pas d’ordre public. La loi de 2006 a changé la terminologie.
La donation est présumée faite « en avancement d’hoirie » (art 843 Cciv). la loi de 2006 a substitué cette expression à celle « en avance de part successorale ». Elle est considérée comme une simple avance sur la part que le bénéficiaire recevra sur la succession du disposant.
Donc, le donataire doit la rapporter, sauf dispense en principe expresse du donateur. La donation dans ce cas devient une donation préciputaire. La loi de 2006 parle désormais d’une donation « hors part successorale ».
À l’inverse, le legs est présumé être préciputaire. Le legs est en principe considéré comme un avantage définitif accordé au légataire. Il n’est pas rapportable, sauf si le testateur en a décidé autrement (art 843 al 2 Cciv).

2) L’avantage reçu

Sont soumis au rapport tous les avantages directs ou indirects que le défunt a fourni à l’héritier gratifié (art 843 Cciv).
Ex : sont ainsi rapportables les donations forme notariée, les dons manuels, les donations déguisées ou indirectes.
Ex : Si la libéralité comportait des charges, elles sont déduites et le rapport n’étant dû qu’à concurrence de l’avantage net reçu.
Ex : Mais, à titre d’exception, ne sont pas soumis au rapport, les frais de nourriture, les frais d’entretien et d’éducation, les présents d’usage (art 852 Cciv).
Attention, les primes payées par le défunt pour constituer une assurance-vie au profit de l’héritier présomptif, dans la mesure où elles n’ont pas été « manifestement exagérées compte tenu des ressources du défunt », échappent au rapport (art L.132-13 C.assu).






Section 2 Par qui et à qui est dû le rapport ?

1) Par qui est dû le rapport ?

Tout héritier, sauf disposition contraire du défunt, à la double condition que l’héritier vienne effectivement à la succession (l’héritier renonçant échappe donc au rapport ; donation en avancement d’hoirie à lui faite par le défunt devient une donation préciputaire), et que l’héritier ait été personnellement gratifié  cela signifie qu’en principe, il n’y a pas de rapport pour autrui. Mais, il y a en revanche rapport lorsqu’il y a représentation (art 848 Cciv).
Un héritier ne doit le rapport que s’il est en présence d’un autre héritier auquel il est dû.

2) À qui est dû le rapport ?

Ayant pour but de maintenir l’égalité entre héritiers, le rapport n’est dû par l’héritier gratifié qu’à son ou à ses co-héritiers (art 857 Cciv).
Alors se pose la question : comment effectuer le rapport ?

Chapitre 2 Comment effectuer le rapport ?

Art 858 Cciv.
2 modalités sont possibles :
D’une part, le rapport en nature :
L’héritier gratifié remet dans la masse successorale le bien qu’il avait reçu. L’avantage est l’égalité totale entre les héritiers. La masse successorale est reconstituée comme si le bien donné ne l’avait pas été. L’inconvénient est la résolution des droits (le notaire pense notamment surtout la résolution des hypothèques consenties à des tiers sur le bien donné, consentie par le donataire  cela veut dire que le bien rapporté doit revenir vierge de toute inscription successorale. Le donateur peut donner son consentement à la constitution de l’hypothèque pour éviter tout problème lors du règlement de la succession).

D’autre part, le rapport en valeur :
On parle en pratique du rapport en moins prenant (notion pratique notariale). On prendra moins dans la masse successorale. L’héritier gratifié remet dans la masse à partager la valeur du bien reçu. Cette valeur sera entièrement imputée sur sa part successorale, du moins si elle ne la dépasse pas. Si la valeur du bien soumis à rapport excède la part héréditaire du gratifié, ce dernier devra à ses co-héritiers une soulte à concurrence de l’excédent. L’avantage de ce rapport en moins prenant est que les droits consentis à des tiers par le donataire ne sont pas anéantis (contrairement au rapport en nature). Mais, l’inconvénient est que l’égalité entre les héritiers risque d’être compromise si le bien rapporté est mal évalué.


Section 1 Le champ respectif d’application des rapports en nature et en valeur

D’une part, pour les legs, la solution est simple car le rapport s’effectue toujours en moins prenant (art 843 al 2 Cciv). En effet, si le rapport avait lieu en nature, le legs serait anéanti. Par ailleurs, le legs n’est lui-même soumis au rapport que si le défunt l’a expressément ordonné.
D’autre part, pour les donations, le principe est le rapport en moins prenant (art 858 al 1er Cciv). Mais, on a une exception. Le rapport est en nature soit si la donation l’impose (art 858 al 1er Cciv), soit si le donataire choisi ce type de rapport (il ne peut choisir le rapport en nature que tout autant qu’il n’a pas grevé le bien à lui donné de charges).

Section 2 L’évaluation du rapport en moins prenant

Il faut distinguer d’une part les règles légales qui ne sont pas impératives, et d’autre part, les conventions venant modifier le système légal.

1) En l’absence de convention

Le texte de base est l’art 860 Cciv.
L’art 860 al 1er Cciv pose le principe : « Le bien est évalué au moment du partage d’après son état à l’époque de la libéralité ».
L’art 860 al 2 Cciv vise 2 hypothèses particulières :
- « Le rapport est de la valeur du bien au jour de l’aliénation s’il a été vendu ou donné »
- « Si un nouveau bien a été acquis grâce à l’aliénation, le rapport est calculé d’après ce nouveau bien au jour du partage ».

2) Incidence d’une convention

L’art 860 al 3 Cciv permet de déroger soit par une clause de la libéralité, soit par un acte postérieur, aux règles légales d’évaluation du rapport en moins prenant, à la condition de respecter la réserve qui est d’ordre public. Si elle est entamée, elle fait l’objet d’une réduction.

Sous-Titre 2 La réduction

C’est une des grandes nouveautés de la loi de 2006 que la possibilité de renoncer à l’action en réduction des libéralités qui dépassent la quotité disponible.
Art 922 et s. Cciv.
En présence d’héritiers réservataires, il faut déterminer si les libéralités que le défunt a consenties ont dépassé la quotité disponible afin de soumettre l’excédent à réduction éventuellement.
LA réduction se distingue du rapport. Le rapport tend à l’égalité entre les héritiers. La réduction ne tend pas à cette égalité, mais tend à la reconstitution de leur réserve. L’action en réduction protège seulement l’héritier réservataire. Il est le seul à pouvoir exercer l’action en réduction, sauf s’il y a renoncé.
La réserve se fixe au jour du décès. C’est à ce moment-là que l’on connaît l’ensemble des libéralités (donations, legs) que le défunt a consenti. C’est la raison pour laquelle on calcule la réserve et la quotité disponible sur une masse de biens qui s’appelle « masse de calcul de la quotité disponible », les biens étant évalués au jour du décès au sein de cette masse (au jour de l’ouverture de la succession).
En appliquant à cette masse le taux de la réserve, on obtient outre la quotité disponible ce que l’on appelle la « réserve globale » cad la réserve de tous les héritiers réservataires. Ensuite, on divise cette réserve globale par le nombre d’héritiers réservataires. De la sorte,on fixe « la réserve personnelle » qui revient à chaque héritier réservataire.

2 précisions :

Section 1 L’imputation des libéralités

Les libéralités qui ont été consenties par le défunt s’imputent-elles sur la quotité disponible ou sur la réserve ?
La grande règle directrice est la suivante : la libéralité qui n’a pas été consentie à un héritier réservataire diminue la quotité disponible. En d’autres termes, cette libéralité s’impute obligatoirement sur la quotité disponible.

Doit-on faire prévaloir, lorsque le gratifié est un héritier réservataire, sa qualité de gratifié en imputant la libéralité sur la quotité disponible ou imputer la libéralité sur sa réserve personnelle en considérant que le défunt, en le gratifiant, avait simplement entendu lui fournir sur sa part de réserve (auquel cas la quotité disponible reste intacte) ?

1) Imputation sur la quotité disponible

La libéralité s’impute sur la quotité disponible d’une part chaque fois que le disposant l’a voulu. C’est la raison pour laquelle toutes libéralités faites avec dispense de rapport s’impute sur la quotité disponible car le défunt, en dispensant son héritier fût-il réservataire de rapport, le défunt a voulu par-là même que cette libéralité s’ajoute à sa part successorale. D’autre part, la libéralité va s’imputer sur la quotité disponible chaque fois que le gratifié n’a aucun titre à recevoir la réserve. Tel est le cas des libéralités qui ont été consenties :
Tout d’abord à des personnes qui ne sont pas appelées à la succession. Ensuite, des libéralités qui ont été consenties à un héritier non réservataire. Enfin, tel est le cas de la libéralité qui a été consentie à un héritier réservataire mais qui renonce à la succession.

2) Imputation sur la réserve

La libéralité s’impute sur la réserve lorsqu’elle est faite en avance de part successorale et lorsqu’elle est faite à un héritier réservataire qui accepte la succession.
L’art 864 Cciv prévoit ici une imputation sur la part de réserve du gratifié cad une imputation sur sa réserve personnelle. L’excédent s’imputant sur la quotité disponible. Mais,une clause de la libéralité peut décider que ladite libéralité (avancement d’hoirie) s’imputera sur la réserve globale. Il y aura une application sur la réserve globale, ce qui en pratique permet de dégager un disponible plus important pour d’autres libéralités.



Section 2 La réduction des libéralités dépassant la quotité disponible

Le terme de réduction est trompeur. Il semble signifier, mais ce n’est pas exact, que toutes les libéralités seront maintenues une fois diminuées. En réalité, certaines libéralités peuvent être maintenues intégralement. D’autres seront supprimées pour le tout. Dès lors, il existe un ordre de réduction et des modes de réduction.


1) L’ordre des réductions

On commence par réduire les libéralités les plus récentes pour remonter ensuite aux plus anciennes. Vont être réduits en pratique en 1er les legs car ce sont les libéralités les plus récentes. Pourquoi ? Parce que les legs prennent effet au décès du testateur. En présence de plusieurs legs, on opèrera une réduction proportionnelle en fonction du montant des différents legs.
Si la réduction à 0 de tous les legs ne suffit pas à reconstituer la réserve, on s’attaque alors aux donations en commençant par les plus récentes (art 923 Cciv).

2) Les modes de réduction

Il existe d’une part un 1er mode de réduction : la réduction en nature. La réduction en nature, lorsqu’elle frappe un legs, va consister à ne pas exécuter ce legs en le laissant dans la masse successorale. Lorsqu’il s’agit d’une donation à réduire, si la réduction est en nature, on va la réintégrer à la succession en vue du partage.

Il existe un 2ème mode de réduction : la réduction en valeur. En pratique, cela signifie que le legs est exécuté, mais le légataire doit à la succession une indemnité dite de réduction. De même, le donataire conserve le bien à lui donné lorsque la donation dépasse disponible, il conserve le bien tout entier, mais il doit lui-aussi à la succession une indemnité de réduction.

Il faut savoir d’une part, que la réduction des libéralités (donations ou legs) faites à des non successibles a lieu en principe en nature. D’autre part, si le gratifié est appelé à venir à la succession, la donation à lui faite est réduite en valeur, tandis que le legs que lui a consenti le défunt est réduit en nature.

Le rapport et la réduction de la libéralité permettent de reconstituer la masse à partager.


















Titre 2 Le partage successoral

Le partage a une très grande importance pour la pratique devant les tribunaux (pour le partage judiciaire) et devant les notaires. La loi de 2006 a profondément remanié le partage dans le double but, d’une part, d’accélérer le partage (surtout judiciaire) et d’autre part, de le sécuriser (partiel : la sécurité du partage).
Les rapports et réductions ayant été opérés, les créanciers ayant été payés (sur la masse brute), reste une masse active nette qu’il ne reste plus qu’à partager.
Le partage est pour chaque héritier un droit. « Nul n’est tenu de demeurer dans l’indivision » (art 815 Cciv). Mais, ce n’est pas un droit absolu, il est relatif compte tenu, à propos de l’indivision, du droit au maintien dans l’indivision et du droit de surseoir au partage (art 820 et s. Cciv).
Le partage est un droit relatif. Plus précisément, le partage est l’acte amiable ou judiciaire qui substitue à la propriété indivise une propriété divise en localisant le droit de chaque cohéritier sur une partie matérielle des biens héréditaires.
Attention, cet acte n’est pas translatif contrairement à la vente, ni constitutif de droit contrairement à la constitution de l’hypothèque. Cet acte est déclaratif. Cela signifie que l’indivision est rétroactivement effacée, chaque héritier copartagé étant censé avoir reçu les biens dont il est alloti directement du de cujus.
Attention, ne pas confondre le partage définitif et le partage provisionnel. Nous étudierons le partage définitif. Ce que l’on appelle le partage provisionnel laisse subsister l’indivision : il n’y a pas partage de la propriété. En réalité, le partage provisionnel est un partage de la jouissance des biens indivis. D’une part, on retrouve bien souvent ce partage en jouissance dans une convention d’indivision. D’autre part, certains partages définitifs qui n’ont pas été opérés conformément à la loi (notamment pour protéger les incapables) valent seulement comme partage provisionnel.

Sous-Titre 1 Les règles gouvernant le partage

Ces règles sont dominées par une grande idée : l’égalité entre cohéritiers. L’égalité est l’âme du partage.
Cette égalité impérieuse explique d’une part les exigences légales quant à la réalisation du partage. D’autre part, elle explique quant aux conséquences du partage la grande règle que l’on appelle « l’effet déclaratif du partage ».

Chapitre 1 La réalisation du partage

Section 1 Le partage en la forme

La loi de 2006 exprime sa très grande faveur pour le partage amiable, parce qu’il est moins long, coûteux, moins complexe et évite le tirage au sort des lots, en raréfiant les cas de recours au partage judiciaire.

1) Le partage amiable

Simplement dans un but de clarté, nous distinguons les règles générales et les applications nouvelles du partage amiable depuis la loi de 2006.

A) Les règles générales

Le partage amiable est de loin le plus fréquent. Il se définit comme celui dont la forme et les modalités ont été choisies par les parties. C’est en principe le règle de l’autonomie de la volonté (art 835 al 1er Cciv).
Concrètement, cela signifie que l’évaluation des biens, la composition et la répartition des lots, le délai des paiements des soultes sont décidés d’un commun accord. En principe, une convention dépourvue de forme sacramentaire le réalise. À la limite, il pourrait y avoir simplement une convention verbale.
En pratique, il s’agit, dès lors que la liquidation est complexe, il s’agit d’un acte notarié. La loi de 2006 rend l’acte notarié obligatoire non seulement pour l’opposabilité du partage amiable, mais aussi pour sa validité dès lors que la masse à partager comporte un immeuble soumis à la publicité foncière (nouveauté).
Le législateur de 2006 affirme sa préférence pour le partage amiable. Aussi, permet-il un partage amiable dans des cas où il était obligatoire avant le 1er janvier 2007 de recourir au partage judiciaire.

Q) Applications nouvelles du partage amiable

C’est un point important de la réforme. (volonté de Catala) Désormais, le partage amiable est possible lorsqu’un indivisaire est présumé absent ou lorsqu’il est incapable de manifester sa volonté. Cf art 836 al 1er et 116 al 1er Cciv.
De manière révolutionnaire, il n’y a plus de partage judiciaire mais un partage amiable, mais qui demande une approbation du juge des tutelles (il n’y a plus d’homologation). Il en va ainsi lorsqu’un indivisaire fait l’objet d’un régime de protection (tutelle, curatelle) : art 836 al 2 Cciv.
Si un indivisaire est défaillant (c’est une nouveauté) et ne veut pas accepter et ne répond pas pour différentes raisons, l’art 837 Cciv prévoit que les autres indivisaires peuvent recourir à une procédure de représentation (partiel : la représentation en droit successoral) qui ne nécessite qu’une intervention judiciaire limitée. Cf art 836 al 2 et 837 Cciv.

2) Le partage judiciaire

A) Les cas

Le législateur de 2006 entend limiter le recours au partage judiciaire. Il veut que ce soit l’exception. On le voit à travers la distinction temporelle. Jusqu’au 31 décembre 2006, le partage devait obligatoirement être judiciaire si :
- Un héritier refuse de consentir au partage amiable ;
- Les héritiers sont en désaccord sur les modalités du partage ;
- Un ou plusieurs héritiers étaient présumés absent, incapable ou défaillant

Depuis le 1er janvier 2007, le partage judiciaire continue de s’imposer dans les deux 1er cas où il existe effectivement un contentieux (art 840 Cciv). Mais, en présence d’héritiers présumés absents, incapables ou défaillants, le partage n’est plus judiciaire et il ne le redevient que si le partage amiable n’a pas été autorisé ou approuvé. Cette hypothèse est prévue par coordination avec les nouveaux art 836 et 837 Cciv.
C’est le TGI du lieu d’ouverture de la succession qui est compétent.


R) La procédure

Avant l’entrée en application de la loi de 2006, le partage judiciaire, tel qu’il était rédigé par le Code Napoléon et par l’ancien Code de Procédure civile, se caractérisait par sa longueur, sa complexité et surtout par son coût en raison de la multiplication des intervenants. Ce partage a été profondément rénové.
L’action, comme par le passé, est introduite par une assignation signifiée par un cohéritier aux autres cohéritiers, soit par une requête collective de tous les cohéritiers. C’est alors que le tribunal commet un notaire et désigne un juge-commissaire. Il est procédé à l’estimation des biens héréditaires en se plaçant au jour du partage. Ce que l’on appelle les licitations (ventes aux enchères de biens éventuels) sont ordonnées par le tribunal (art 841 Cciv).
Ensuite, il est procédé à la formation de la masse partageable avec les rapports et réduction, ce qui relève du travail du notaire commis. Il est ensuite opéré composition des lots. Et, la grande nouveauté de la loi de 2006 est que le lotissement est dominé désormais par le principe d’égalité en valeur et non plus en nature.
Pour remédier à la paralysie du partage judiciaire sur fond de mésentente entre les indivisaires, les pouvoirs du notaire ont été considérablement accrus par la loi de 2006. Le notaire devient le personnage central du partage judiciaire. C’est ainsi que le notaire pourra mettre l’indivisaire défaillant en demeure de se faire représenter. Faute pour l’indivisaire d’avoir constitué mandataire dans les 3 mois de la mise en demeure, le notaire pourra demander au juge de désigner une personne qualifiée (autre notaire par exemple) qui représentera le défaillant jusqu’à la réalisation complète des opérations. Cf art 841-1 Cciv.

L’attribution des lots se fait par tirage au sort, à l’exception des biens qui font l’objet d’une attribution préférentielle qui relève des dispositions de fond.

Section 2 Le partage au fond

2 types de dispositions protègent les créanciers d’un copartageant, et les copartageants eux-mêmes.

1) Les créanciers d’un copartageant

Art 882 Cciv : « Les créanciers d’un copartageant, pour éviter que le partage ne soit fait en fraude de leur droit (par ex : en mettant au lot de l’héritier débiteur des biens faciles à dissimuler ou insaisissable) peuvent s’opposer à ce qu’il y soit procédé hors de leur présence. Ils ont le droit d’y intervenir à leurs frais ».
Ils disposent d’une action paulienne, mais ils ne peuvent attaquer un partage consommé, à moins toutefois qu’il n’y ait été procédé sans eux et au préjudice d’une opposition qu’ils auraient formé.

2) Les copartageants

Depuis le 1er janvier 2007, l’égalité en nature n’est plus imposée. Seule une égalité en valeur suffit. Une fois que l’égalité en valeur des lots est respectée, lesdits lots sont attribués à la convenance des héritiers dans le partage amiable (c’est l’avantage du partage amiable). L’attribution se fait par tirage au sort en cas de partage judiciaire, sauf le jeu de l’attribution préférentielle.

L’attribution préférentielle est une technique qui doit être obligatoirement demandée au tribunal dans le cadre du partage judiciaire. Elle permet à l’héritier qui en remplit les conditions de se voir attribué un bien avant que ne soit répartit le reste de la succession.
Elle est régie par les art 831 à 834 Cciv. la loi de 2006 n’a opéré que de petites retouches en élargissant les cas d’attribution.
Elle poursuit plusieurs objectifs :
- Préserver les entreprises en vue de ne pas altérer leur rendement (éviter leur partage, morcellement) ;
- Maintenir les conditions de vie qui existaient avant le décès, et notamment pour le conjoint survivant (protection du logement familial) ;
- Répartir de manière intelligente les lots plutôt que de laisser les attributions au tirage au sort dans le cadre du partage judiciaire.

La bêtise ou l’aléa du tirage au sort est illustré par cet exemple : le château+++
La loi de 2006 conserve l’économie générale du mécanisme de l’attribution préférentielle. Elle facilite néanmoins les attributions préférentielles portant sur des entreprises. Elle créée une obligation à la charge de l’attributaire d’accepter l’attribution préférentielle qu’il avait demandé, alors que la jp ancienne (avant 2006) permettait à celui qui avait demandé l’attribution préférentielle de ne plus la vouloir. Cf art 831 à 834 Cciv qui donnent le champ d’application de l’attribution préférentielle.

A) La demande d’attribution préférentielle

À défaut d’accord amiable, celui qui se prévaut d’une attribution préférentielle doit obligatoirement former sa demande devant le tribunal. En pratique, le problème de l’attribution ne se pose que dans le cadre d’un partage judiciaire puisque dans le partage amiable, tout le monde est d’accord sur l’attribution des lots. Dans le partage judiciaire, on a un contentieux et un copartageant réclame une attribution préférentielle.
Il faut faire la demande au TGI du lieu d’ouverture de la succession. Ce TGI apprécie les intérêts en présence si l’attribution préférentielle est facultative. Le tribunal a donc un pouvoir d’appréciation. En revanche, lorsqu’elle est de droit (art 831 à 834 Cciv), certes celui qui la réclame doit former sa demande devant le TGI. Cela reste un procédé judiciaire bien qu’elle soit de droit. Mais, ici, le tribunal se contente de vérifier si les conditions légales de l’attribution préférentielle sont biens remplies.

S) Les effets de l’attribution préférentielle

Codifiant la jp, la loi de 2006 prévoit que c’est seulement au jour du partage définitif que le bénéficiaire de l’attribution préférentielle deviendra propriétaire exclusif du bien. En pratique, cela signifie que le bien (et ses fruits, revenus) reste dans l’indivision successorale jusqu’au partage, d’une part, et d’autre part, cela signifie que la valeur du bien est estimé à la date du partage (ce qu’on appelle la « date de la jouissance divise »).
La loi de 2006 met fin à une jp qui autorisait l’attributaire à renoncer à l’attribution préférentielle jusqu’au jour du partage définitif. Cette solution jptielle avait l’inconvénient d’obliger à reprendre toutes les opérations de partage.




Chapitre 2 L’effet déclaratif du partage

Art 883 al 1er Cciv : « Chaque cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous les effets compris dans son lot ou à lui échus sur licitation et n’avoir jamais eu la propriété des autres effets de la succession ».

Attention : il y a une conséquence juridique importe. Grâce à cet effet déclaratif du partage, l’hypothèque consentie par un héritier sur un immeuble indivis mis au lot d’un autre cohéritier, va se trouver rétroactivement effacée. Pourquoi ? Parce que le constituant (celui qui a consenti à l’hypothèque) est censé n’avoir jamais eu la propriété de ce bien. Dès lors, en effaçant en quelque sorte l’indivision, l’effet déclaratif du partage que l’on oppose à l’effet constitutif de la vente assure l’égalité entre les cohéritiers.

Section 1 Le domaine d’application de l’effet déclaratif du partage

2 questions se posent :
- A quels actes ?
- A quels biens ?

1) Actes concernés par l’effet déclaratif du partage

Tout acte mettant fin à l’indivision est pourvu de l’effet déclaratif du partage. Il importe peu d’ailleurs que l’acte mette fin à l’indivision en tout ou en partie cad à l’égard de certains biens ou héritiers seulement.
Ex : le partage en nature, la cession de droits successifs d’un cohéritier à un autre, la vente amiable consentie à un cohéritier par les autres, la licitation (vente aux enchères d’un bien héréditaire lorsque l’adjudicataire est un cohéritier). En revanche, lorsqu’un étranger (extérieur à l’indivision) se porte adjudicataire, l’adjudication vaut alors vente avec son effet non plus déclaratif mais constitutif de droit.
De même, la vente amiable à un tiers étranger à l’indivision n’est plus une opération de partage avec effet constitutif de la vente.

2) Biens concernés par l’effet déclaratif du partage

Ce sont tous les biens compris dans l’indivision. Pour les créances du défunt, il y a une contradiction entre d’une part, l’art 832 Cciv. Ce texte, en intégrant les créances dans l’indivision, les soumet à l’effet déclaratif du partage, qui indiquera celui des cohéritiers censé avoir reçu la créance directement du défunt. D’autre part, avec l’art 1220 Cciv selon lequel : « Dès l’instant du décès, les créances et dettes du défunt se divisent de plein droit entre ses héritiers au prorata de leur vocation héréditaire ».
Pour résoudre cette contradiction entre les 2 textes, la jp distingue d’une part les rapports du débiteur du défunt et des cohéritiers pour lesquels elle applique l’art 1220 Cciv, et cela afin de permettre au débiteur de se libérer valablement sans devoir attendre les résultats du partage ; et d’autre part, les rapports des cohéritiers entre eux pour lesquels joue l’effet déclaratif avec ses propres conséquences.

Section 2 Les conséquences de l’effet déclaratif du partage

D’une part, le partage n’est pas translatif. C’est la raison pour laquelle en pratique au plan fiscal, les droits de mutation ne sont pas une nouvelle fois perçus. Seule est due la taxe de publicité foncière (1%).
D’autre part, le partage est rétroactif. La conséquence est l’anéantissement ou la consolidation des aliénations et constitutions de droit réel consenties par un indivisaire selon que le bien objet d’une telle opération n’est pas ou à l’inverse est mis au lot dudit indivisaire.
Sans qu’importe cette alternative, les actes accomplis par tous les indivisaires demeurent (limitation à l’effacement de l’indivision) ainsi les actes accomplis en vertu d’un mandat ou d’une décision de justice.

Sous-Titre 2 Les sanctions des règles du partage

Le partage est un acte juridique. Donc, il peut faire l’objet d’une nullité. De plus, cette règle de l’égalité commande des sanctions particulières.

Chapitre 1 La nullité du partage

Idée générale que le législateur de 2006 entend éviter autant que possible une remise en cause complète du partage qui aurait lieu s’il y avait annulation de cet acte juridique.
C’est la raison pour laquelle la nullité est régie de façon spécifique (pas seulement un simple renvoi à la théorie générale des obligations) dans les 3 nouveaux articles suivants :

L’art 887 Cciv n’apporte pas grand chose de nouveau (on le savait par la jp) : le partage peut être annulé pour cause de violence ou de dol. Il peut aussi être annulé pour cause d’erreur si celle-ci a porté sur l’existence ou sur la quotité des droits des copartageants, ou sur la propriété des biens compris dans la masse partageable. Ce qui est nouveau et spécifique au partage, c’est l’alinéa 3 = « S’il apparaît que les conséquences de la violence, du dol ou de l’erreur peuvent être réparées autrement que par l’annulation du partage, le tribunal peut, à la demande de l’une des parties, ordonner un partage complémentaire ou rectificatif ». Cette disposition est importante car on évite de remettre en cause tous les effets d’une annulation.

Le législateur de 2006 complète l’art 887 Cciv par un art 887-1 Cciv : « Le partage peut être également annulé si un des cohéritiers y a été omis (al 1er). L’héritier qui a été omis peut toutefois demander de recevoir sa part soit en nature, soit en valeur, et cela sans annulation du partage (al 2) ». Pour déterminer cette part, les biens et droits sur lesquels a porté le partage déjà réalisé sont réévalués de la même manière que s’il s’agissait d’un nouveau partage (date de la jouissance divise).

L’art 888 Cciv reprend une disposition qui existait avant la loi de 2006. Ce texte dispose : « Le copartageant qui a aliéné son lot en tout ou en partie n’est plus recevable à intenter une action fondée sur le dol, sur l’erreur ou la violence si l’aliénation qu’il a faite est postérieure à la découverte du dol ou de l’erreur, ou à la cessation de la violence ».


Chapitre 2 Les sanctions de l’inégalité

L’égalité est l’âme du partage. C’est la raison pour laquelle 2 sanctions sont applicables en la matière. Il s’agit d’une part, du recours en garantie et d’autre part, l’action en comblement de part.

Section 1 Le recours en garantie

Le Code civil nous dit que les copartageants se doivent mutuellement garantie. Certes, cette garantie paraît difficilement conciliable avec l’effet déclaratif du partage. Néanmoins, le recours en garantie se justifie pour la même raison cad assurer l’égalité des copartageants. « Le principe de l’égalité entre copartageants justifie que, conformément à l’art 884 Cciv, les cohéritiers demeurent respectivement garant les uns envers les autres des troubles et évictions procédant d’une cause antérieure au partage » (Defresnois TD n°2).
Concrètement, et c’est ainsi que le cohéritier qui est évincé d’un bien mis dans son lot et qui est évincé par le véritable propriétaire, il va agir en garantie contre les autres copartageants, la perte se répartira entre tous, y compris celui qui l’a subi. Ce dernier demande en réalité aux autres de l’indemniser au prorata de leur émoluments (art 885 Cciv). Le Cciv avait posé cette action depuis 1804. Mais, ce qui est nouveau, dans le cadre de la réduction et de l’harmonisation des délais de prescription, le législateur réduit le délai de l’action en garantie qui se prescrit par 2 ans à compter du jour de l’éviction ou de la découverte du trouble. La nouveauté principale est la suppression de l’action en rescision pour lésion et son remplacement par ce que l’on appelle depuis 2007 une action en comblement de part.

Section 2 L’action en comblement de part

Sanction nouvelle créée par la loi de 2006.

Dans le cadre de la vente, on a une action en rescision pour lésion (plus des 7/12e cad lorsque le vendeur a touché moins que les 5/12e du prix de l’objet vendu). De manière analogue, le Code de 1804 avait prévu également une action en rescision pour lésion du partage. Cette action, lorsque l’un des copartageants s’était fait léser de plus du ¼, l’ancien 890 Cciv lui donnait alors la possibilité d’agir sur ce fondement. L’inconvénient de cette solution est que la rescision pour lésion marche comme une nullité et aboutit à l’anéantissement rétroactif du partage. Or, ce que veut le législateur de 2006, c’est une sécurité des opérations de partage et des copartageants. C’est la raison pour laquelle, depuis le 1er janvier 2007, pour protéger la sécurité des copartageants et des tiers, l’action en rescision pour lésion n’est plus possible.
Afin de sanctionner néanmoins la lésion qui porte atteinte au principe fondamental de l’égalité dans le partage, la loi de 2006 organise dans les art 889 à 892 Cciv, une nouvelle action en comblement de part. En effet, désormais, lorsque l’un des copartageants établit avoir subi une lésion de plus du quart de la valeur qu’il aurait dû avoir, le complément de sa part va lui être fourni au choix du défendeur soit en numéraire, soit en nature.
L’action en comblement de part présente ce très grand avantage de ne pas entraîner d’annulation rétroactive du partage. D’où la grande idée qui se dégage de la loi de 2006 : la sécurité du partage.